Venezuela: Toward a Return to the ‘Cold War’?

 

 

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Au Venezuela, c’est la crise; deux hommes se disputent le pouvoir. Aussi, les Etats-Unis, toujours prompts, en pareilles occasions, à proposer leurs services «au plus offrant» pour «sauver le monde libre», soutiennent-ils Juan Guaido, le jeune patron de l’Assemblée nationale qui s’est autoproclamé «président» alors que la Russie, agissant, comme à son accoutumé, au nom du sempiternel principe de «non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats», entend prêter main forte au président Nicolas Maduro. Autant dire que jusque-là, tout rentre dans l’ordre «normal» des choses…

C’est dans ce cadre, d’ailleurs, que pour sortir de cet imbroglio, Washington a présenté, au Conseil de Sécurité des Nations-Unies, un projet de résolution exprimant son «plein soutien» à l’Assemblée Nationale vénézuélienne en tant que «seule institution démocratiquement élue» dans le pays, a souligné sa «profonde préoccupation devant la violence et le recours excessif à la force par les autorités vénézuéliennes contre des manifestants pacifiques et non armés» et appelé, enfin, ledit Conseil, à faciliter une aide humanitaire internationale et à mettre en œuvre «un processus politique conduisant à une élection présidentielle libre, juste et crédible».

Or, comme il fallait s’y attendre, le document américain a immédiatement suscité une contre-proposition de la part de la Russie qui a présenté, de son côté, un «texte alternatif» dans lequel elle exprime «l’inquiétude» du Conseil face «aux menaces de recourir à la force contre l’intégrité territoriale et l’indépendance politique » du Venezuela et dénonce «les tentatives d’intervenir dans des sujets qui relèvent principalement d’affaires intérieures». Le texte rédigé par Moscou en appelle, enfin, «à un règlement de la situation actuelle (…) via des moyens pacifiques» et soutient «toutes les initiatives visant à trouver une solution politique entre les vénézuéliens» dans le cadre du «Mécanisme de Montevideo» c’est-à-dire sur la base d’un dialogue national tel qu’il a été arrêté à Montevideo mercredi 6 Février par le Mexique, l’Uruguay et les pays de la Communauté des Caraïbes; un texte qui n’exige pas la tenue d’une élection présidentielle anticipée comme le réclament l’opposition vénézuélienne et les pays qui la soutiennent car elle constituerait une entrave à un dialogue inter-vénézuélien.

Le «mécanisme» précité prévoit, notamment, la création des conditions d’un contact direct entre les acteurs concernés, la recherche de points communs et d’opportunité de flexibilisation des positions et d’identification d’accords potentiels, la construction et la signature d’accords basés sur les résultats de la phase de négociation avec des caractéristiques et un calendrier préalablement établi et, enfin, la concrétisation des engagements pris lors de la phase précédente avec un accompagnement international. Soutenu par le Secrétaire Général des Nations-Unies, Antonio Guterres, «le Mécanisme de Montevideo» a été présenté dès le lendemain à la Conférence du Groupe International de Contact sur le Venezuela qui se tenait dans la capitale Uruguayenne et qui réunissait huit pays européens (Allemagne, Espagne, France, Italie, Portugal, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suède) et quatre d’Amérique latine (Uruguay, Bolivie, Costa Rica et Equateur).

Ainsi, avec l’exacerbation de la crise politique qui sévit au Venezuela, un petit air de cette «guerre froide» du siècle dernier que nous croyions révolue, semble être revenu en ce début d’année 2019 dès lors que sur ce dossier, ce sont deux blocs emmenés par Moscou et Washington qui s’affrontent, chacun soutenant son «champion»; Maduro pour les uns, Guaido pour les autres…

En outre, en désignant Eliott Abrams au poste d’émissaire spécial chargé de «restaurer la démocratie» au Venezuela, alors que c’est ce même homme qui, dans les années 80, avait été chargé, par la Maison Blanche, de veiller à l’acheminement de «l’aide américaine» aux «contras» dans leur guérilla antigouvernementale au Nicaragua, Washington semble, en effet, vouloir réactiver la fameuse «doctrine Monroe» énonçant «l’Amérique aux Américains» qui avait été «ébranlée» lorsqu’en 1961, Fidel Castro avait pris l’initiative d’un rapprochement avec l’Union Soviétique mettant, ainsi, le territoire américain sous la menace d’une éventuelle attaque par des missiles soviétiques lancés depuis Cuba. On connait la suite avec le fameux débarquement de la Baie des Cochons et cet étranglement économique de l’île qui a duré plus de cinq décennies.

Considérant, enfin, que le président auto-proclamé aurait déjà donné son accord pour une intervention militaire «étrangère» au Venezuela et que cette dernière ne pourrait donner lieu qu’à un «éclatement» du pays dont – à n’en point douter – les vénézuéliens paieront le prix fort, il n’y a plus qu’à espérer revivre le statu quo ante qui prévalait lors de l’époque de la guerre froide quand, pour la sauvegarde de la paix et au nom de l’équilibre des forces, les uns et les autres faisaient jouer leur droit de véto à tour de rôle. Alors, attendons pour voir…

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