Trump and His Wall: A Crisis and a Provocateur

Published in Le Devoir
(Canada) on 11 June 2019
by Guy Taillefer (link to originallink to original)
Translated from by Hal Swindall. Edited by Elizabeth Cosgriff.
Propelled by his xenophobic promise to rid the United States of its "illegals" and close the door to all who wish to enter, by which he means the large number of women and children fleeing misery and gang violence in Central America, Donald Trump is, after 2 1/2 years, increasing the problems raised by what is at stake in the immigration issue exponentially. Without a doubt, this will suit him politically despite all the social, human and economic damage caused by his actions, especially south of the Rio Grande, but north of it as well.

Trump's obsession with his "wall" has resulted in numerous political setbacks: renouncing the preposterous demand that Mexico pay for the wall, and congressional defeat in a show of force over the wall's budget, which led to a federal government shutdown for 35 days last winter, etc. Now in a gross misrepresentation of facts, he is extricating himself from a comparable setback by pretending that he has obtained Mexico's cooperation with "unprecedented steps" which will "greatly reduce, or eliminate" illegal immigration from Mexico.

With his simplistic foreign policy founded on punitive measures, Trump wants to pretend that his threat of a 5% tariff on imported Mexican products forced Mexican President Andres Manuel Lopez Obrador, known as AMLO, to make the alleged concession. But this is quite false. If Trump has decided in his own head to do nothing about the tariffs, it could be argued that he backed down due to opposition by the business lobby from all sides, from the Republican Senate, the Democrats and even from members of his own team who warned him of the negative impact of such a tariff on both the American and Mexican economies, which are closely linked.

In any case, this latest episode is an example of behavior evidenced in the new book, “Siege: Trump Under Fire,” by Michael Wolff, which lays out the emptiness and the stupidity of Trump's decision-making.

On the other hand, The New York Times reported Monday, June 10, that AMLO had already acquiesced for some time to Washington's demands: first in December 2018 by accepting the continuation of a program under which applicants for refugee status would have to remain in Mexico while the American immigration authorities considered their cases, and then in March by agreeing to deploy the National Guard to his southern border.

If Trump is thus unable to truly flaunt his "agreement," the fact remains that his policy continues to wreak havoc. In particular, these so-called new measures will only serve to put Mexico in an even more impossible situation, stranded between the U.S. and Central America.

The detention camps in northern Mexico are already overflowing, and the number of interrogations of migrants without legal documentation in the U.S. reached 144,000 in May, a record number for the past 10 years. Meanwhile, in southern Mexico, the number of Central Americans crossing the border has nearly quadrupled over previous years to more than 300,000 during the first quarter of 2019. All this presents AMLO, who took office last year, with a double migratory crisis.

The double crisis presents a double challenge: No one could really expect President Obrador to calm the situation given his tempestuous counterpart, whose capacity for troublemaking is immense. As a man of the left, AMLO has tried to reconcile the orders coming from America with a migration policy based on respect for human rights and economic development. His problem is how to square the circle. His policy of openness, especially with humanitarian visas, has caused an unmanageable rush of refugees in southern Mexico, which is a godsend for smugglers.

AMLO is very much alone in this fight, even though it is evident that the solutions to El Salvador, to Guatemala and to Honduras are not Trump's blind immigration policy or the complacent support of corrupt governments, but a regional and multilateral approach that stresses school construction, an independent judiciary, the battle against climate change, etc. The conditions for sustainable development would appear more attainable if the means and the will to achieve them existed in the political realm.


Porté par la promesse xénophobe de débarrasser les États-Unis de ses « illégaux » et de fermer la porte à tous ceux qui cherchent à y entrer — lire des femmes et des enfants fuyant en grand nombre la misère et la violence des gangs en Amérique centrale —, Donald Trump se trouve en fait depuis deux ans et demi à aggraver de façon exponentielle les problèmes soulevés par les enjeux d’immigration. Et sans doute cela lui convient-il électoralement, malgré tout le mal social, humain et économique que cause son inconséquence, surtout au sud du Rio Grande, mais au nord aussi.

Toujours est-il que l’obsession qui l’habite au sujet de son « mur » a beaucoup été faite depuis son élection de reculades politiques : renoncement à l’exigence délirante consistant à le faire financer par le Mexique ; défaite face au Congrès dans l’épreuve de force budgétaire qui a donné lieu, l’hiver dernier, à un arrêt des activités du gouvernement fédéral pendant une période record de 35 jours… En grossier manipulateur des faits, c’est encore à une relative reculade qu’il se livre tout en prétendant avoir obtenu de Mexico l’assurance qu’il appliquera des « mesures sans précédent » qui permettront « de réduire grandement, ou d’éliminer » l’immigration illégale venant du Mexique.

Pratiquant simpliste d’une politique étrangère fondée sur l’application de mesures punitives, il voudra prétendre que la menace d’une taxe de 5 % sur les produits importés du Mexique a fait céder le gouvernement du président Andrés Manuel Lopez Obrador (dit AMLO). Alors que c’est plutôt faux. Si M. Trump a renoncé à n’en faire qu’à sa tête, on peut avancer que c’est au vu des objections qui lui ont été faites de tous bords par les milieux d’affaires américains, le Sénat à majorité républicaine, les démocrates et des membres de son propre entourage quant aux impacts nuisibles qu’aurait une telle mesure sur deux économies très étroitement imbriquées.

Ce nouvel épisode dans la vie selon Donald Trump vient en tout cas illustrer le propos de l’écrivain Michael Wolff qui, dans son nouveau livre intitulé État de siège, étale le vide et la bêtise décisionnels dans lesquels opère ce président.

Le fait est, d’autre part, écrivait lundi le New York Times, qu’AMLO avait déjà acquiescé depuis quelque temps à certaines des exigences de Washington : d’abord en décembre dernier en acceptant la prolongation d’un programme par lequel les candidats au statut de réfugié seraient autorisés à demeurer au Mexique en attendant que les autorités migratoires américaines étudient leur cas ; puis en mars, en approuvant le déploiement de la Garde nationale à sa frontière sud.

Si donc M. Trump ne peut pas vraiment parader avec cet « accord », il reste que sa politique migratoire continuera de faire des ravages. En particulier, ces prétendues nouvelles mesures ne font que placer un peu plus encore le Mexique dans une situation impossible, écartelé entre les États-Unis et l’Amérique centrale.

Les camps de rétention débordent déjà dans le Nord mexicain et le nombre d’interpellations de sans-papiers a atteint en mai aux États-Unis une ampleur inédite en dix ans (144 000) — alors qu’au sud, le nombre de Centraméricains qui traversent la frontière a presque quadruplé par rapport aux années précédentes — à plus de 300 000 lors du premier trimestre de 2019. Ce qui confronte AMLO, arrivé au pouvoir l’année dernière, à une double crise migratoire.

Double crise, double défi : on ne peut guère reprocher au président Obrador de chercher à calmer le jeu face à son intempestif et puissant homologue, dont le pouvoir de nuisance est grand. Homme de gauche, AMLO a tenté de concilier les injonctions américaines avec une politique migratoire fondée sur le respect des droits de la personne et le développement économique. Le défi est de l’ordre de la quadrature du cercle. Sa politique d’ouverture, sous forme notamment de « visas humanitaires », a déclenché au sud une ruée ingérable de réfugiés… et une manne pour les passeurs.

En ce combat, AMLO est bien seul, alors qu’il est évident que les solutions au Salvador, au Guatemala et au Honduras passent non pas par la politique migratoire aveugle de M. Trump et par un soutien complaisant à des gouvernements corrompus, mais par une approche régionale et transversale valorisant la construction d’école, une justice indépendante, la lutte contre les changements climatiques… Autant de conditions de développement durable qui sonneraient moins creux si existaient, en plus grande proportion dans nos mondes politiques, les moyens et la volonté de les remplir.


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