Trump Could Unwittingly Revamp the Chinese Economy

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Sans le vouloir, Trump pourrait requinquer l’économie chinoise

La conclusion à court terme d’un accord commercial entre la Chine et les États-Unis est improbable. Pour Xi Jinping, le président chinois, un tel accord serait toutefois le bienvenu. Cela lui permettrait de réformer le modèle économique chinois, laissant habilement à la Maison-Blanche le rôle de Père Fouettard.

D’une série de tweets acerbes, le président Trump a torpillé il y a quelques semaines les négociations commerciales entre la Chine et les États-Unis. En s’attaquant à Huawei, il n’a fait que jeter de l’huile sur le feu. En conséquence, la probabilité qu’un deal soit conclu dans les prochains mois a été réduite à 30%. Nous estimons à 20% la probabilité d’une guerre commerciale “full blown” ou totale, et à 50% celle de pourparlers soutenus tout au long de l’année mais sans résultat concret.

Les deux présidents attendent pourtant impatiemment la conclusion d’un deal. En ce qui concerne Donald Trump, son aura de “deal maker” a en effet urgemment besoin d’être confirmée. Par ailleurs, ce deal est nécessaire pour maintenir à leur niveau les Bourses d’actions qu’il a, selon ses propres dires, poussées vers le haut. On peut en déduire qu’une forte correction l’incitera certainement à montrer davantage de souplesse.

Xi Jinping, le président chinois, devrait lui aussi pousser un “ouf” de soulagement, car l’impact économique de cette guerre commerciale commence à se faire sentir. Il vient s’ajouter au ralentissement de la croissance auquel la Chine doit faire face suite à la transformation de son économie, par ailleurs nécessaire.

En 2013 déjà, le prédécesseur de Xi, Wen Jiabao, avait lui-même qualifié l’économie chinoise de “chaotique, déséquilibrée et intenable”.

Vider les bulles spéculatives

Depuis lors, Xi a repris les rênes d’une main de fer et centralisé davantage la coordination. Les deux derniers adjectifs de Wen sont cependant toujours d’actualité. Trois grands défis doivent être relevés: le “désamorçage” de la bulle spéculative de la dette, la mise en ordre du système bancaire parallèle et la réduction de la participation de l’État dans les entreprises publiques.

La dette totale chinoise – des secteurs public, financier et non financier – a doublé depuis 2008 pour atteindre près de 300% du PIB. Une part importante des crédits a été financée via un gigantesque système bancaire parallèle. Il s’agit d’un système de crédit non réglementé – donc impossible à contrôler – qui opère parallèlement aux banques commerciales. Les pouvoirs publics chinois ont fermé les yeux sur ces pratiques parce qu’elles permettaient de financer les acteurs de marché comme les autorités locales, agents immobiliers et petites et moyennes entreprises privées ayant des difficultés à obtenir des crédits via le circuit officiel.

Cette politique de tolérance a pris fin il y a deux ans. C’est ce qui explique notamment que les dettes du secteur non financier aient baissé de 5 à 7 points de pourcentage du PIB, par comparaison au pic de 2016.

Un peu plus de la moitié de ces dettes sont entre les mains des entreprises contrôlées par l’État. Elles représentent un autre casse-tête pour les leaders chinois. Elles ont joué un rôle crucial dans le maintien de la stabilité du modèle économique chinois. Elles reçoivent énormément de subsides et créent de gigantesques surcapacités. C’est aussi ce qui explique leurs pertes structurelles.

Xi Jinping a promis lors de son entrée en fonction de prendre ce problème à bras-le-corps, mais il s’est fait de nombreux ennemis en tentant de lutter contre la corruption et de reprendre le pouvoir sur l’armée chinoise. Le grand nettoyage dans ces entreprises étatiques a donc été reporté aux calendes grecques.

Mouton noir volontaire

La réduction des subsides et de la participation de l’État dans ces entreprises publiques est une des exigences des Américains. Xi a donc ainsi une excuse pour s’y attaquer, contre la volonté de ses opposants chinois. Une suppression complète des entreprises d’État n’est sans doute pas réaliste. Une évolution vers le modèle singapourien, où les entreprises publiques sont obligées par une autorité de contrôle d’être aussi efficaces que les entreprises privées, offre une piste de réflexion. Cela permettrait d’augmenter la productivité en Chine et de remettre plus rapidement le pays sur le chemin de la croissance.

De nombreuses autres revendications américaines seraient également positives à long terme pour la croissance chinoise. Dans sa tentative d’évoluer du “Made in” au “Created in China”, et des produits chinois à des marques chinoises, la Chine a tout intérêt à mieux protéger la propriété intellectuelle.

Cette stratégie s’inscrit parfaitement dans le programme “Made in China 2025”, dont l’ambition est de propulser la Chine vers une position de leader absolu dans 10 secteurs prometteurs et généralement de haute technologie. C’est la seule manière pour le pays de faire définitivement partie du club des pays développés et d’éviter de rester coincé dans le “piège du revenu intermédiaire”, à l’instar de pays comme l’Afrique du Sud et le Brésil.

La Chine réussirait aussi plus rapidement à augmenter la qualité de ses propres produits si elle ouvre la porte aux produits et services étrangers. La baisse des droits de douane et la suppression de nombreux obstacles non tarifaires (par exemple les licences, les barrières juridiques, etc.) feraient baisser les prix des produits importés et augmenteraient le pouvoir d’achat des consommateurs chinois. Le président chinois transformerait ainsi une menace en opportunité économique. Et laisserait ainsi à la Maison-Blanche le rôle de Père Fouettard responsable des réformes controversées.

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