The United States Should Keep Its Promise to China

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LE CERCLE – Selon Lu Shaye, ambassadeur de Chine à Paris, Washington a trahi ses engagements en imposant à son pays de nouveaux droits de douane. S’il appelle de nouveau au dialogue, il avertit que ce ne sera pas à n’importe quel prix.

À la fin du mois de juin dernier, les chefs d’Etat chinois et américain sont convenus, lors de leur rencontre à Osaka, de reprendre les négociations commerciales dans un esprit d’égalité et de respect mutuel. Les Etats-Unis ont alors déclaré qu’ils n’imposeraient plus de droits de douane supplémentaires à l’encontre des importations chinoises.

Un mois plus tard, les Etats-Unis annonçaient leur décision d’appliquer, à compter du 1er septembre, 10 % de taxes supplémentaires sur des marchandises chinoises, pour une valeur d’environ 300 milliards de dollars. De plus, au mépris de la réalité, ils accusaient la Chine de manipuler sa monnaie, faisant ainsi monter la tension sur le contentieux commercial sino-américain.

Le plus risible, c’est que, tordant une fois de plus le cou à la réalité et en dépit des faits, les Etats-Unis ont accusé la Chine de ne pas avoir tenu ses promesses d’achat de produits agricoles américains et de bloquer les exportations de fentanyl vers leur pays. Pourtant, depuis la réunion d’Osaka, 2,27 millions de tonnes de soja américain ont bien été expédiées vers la Chine et, depuis le 1er mai, la Chine applique une réglementation plus stricte que les Etats-Unis sur le fentanyl.

Le dernier rapport du Fonds monétaire international (FMI) indique clairement que l’excédent du compte courant de la Chine en 2018 n’est que de 0,4 % de son PIB, bien en deçà du seuil de 3 % correspondant à la définition américaine d’un « manipulateur de devises ». Alors d’où sort l’accusation de « manipulation de devises » ?

Contrairement à la versatilité américaine, la position chinoise, lors des négociations commerciales, n’a jamais varié. Notre souhait le plus sincère est, dans le respect mutuel et sur un pied d’égalité, de parvenir à un accord avec les Etats-Unis. En revanche, il est hors de question de subir des pressions, des menaces et des chantages extrêmes, de même qu’il est impensable de sacrifier nos intérêts fondamentaux et notre droit légitime au développement uniquement pour parvenir à un accord. S’il s’agit de dialoguer, notre porte est grande ouverte. S’il s’agit de se battre, nous nous battrons jusqu’au bout.

Ce qu’il faut maintenant, c’est que les Etats-Unis prouvent à la Chine et au monde entier, d’une part, leur sincérité et, d’autre part, qu’ils sont un interlocuteur digne de foi.

Inutile de le nier, cette guerre commerciale a aggravé les difficultés de notre économie. Cependant, à l’étranger, on a largement sous-estimé sa capacité de résilience. Ainsi, notre croissance a progressé de 6,3 % en glissement annuel au premier semestre de cette année. Au mois de juillet, nos exportations ont connu la meilleure performance depuis trois mois et notre « purchasing managers index » (PMI) a connu son premier rebond pendant la même période.

Dans le même temps, nous n’avons pas ralenti le rythme de notre restructuration économique. Le dernier rapport McKinsey montre qu’entre 2015 et 2018, pour onze trimestres, la consommation a contribué pour plus de 60 % à notre croissance. A ce rythme, le marché chinois surclassera en taille cette année le marché américain pour devenir le plus grand marché de consommation au monde. La part de nos exportations rapportée à notre PIB est également passée de 17 % en 2007 à 9 % aujourd’hui. Laurence Boone, économiste en chef à l’OCDE, estime que l’économie chinoise est en phase de rééquilibrage. Stephen S. Roach, chercheur chevronné de l’université Yale, souligne que le dynamisme croissant du secteur des services en Chine constitue un facteur de renforcement de l’économie.

A l’heure où le monde connaît une intégration croissante des filières industrielles, l’escalade du conflit commercial sino-américain n’a rien de réjouissant pour les autres pays. 60 % des exportations de la Chine vers les Etats-Unis sont produites par des entreprises étrangères, y compris européennes, implantées en Chine. Le FMI a révisé à la baisse sa prévision de croissance pour l’UE cette année à 1,30 %, contre 1,60 % en début d’année.

Mais, plus grave encore, la brutalité commerciale des Etats-Unis ne frappe pas que la Chine. À l’heure actuelle, aucun pays ne devrait se croire à l’abri des flammes, et encore moins imaginer qu’il pourra piller la maison pendant qu’elle brûle. En fait, sur ce point, les intérêts de tous les pays sont étroitement liés, et leurs destins sont interdépendants. N’est-il donc pas temps de tous nous unir pour dire « NON » à l’unilatéralisme et au protectionnisme ?

Lu Shaye est ambassadeur de Chine à Paris.

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