«En évinçant John Bolton, Trump en a-t-il fini avec les ‘néocons’?»
Donald Trump s’est séparé de son conseiller à la sécurité nationale John Bolton. Si certains y voient un signe d’instabilité de la part du Président américain, pour l’essayiste Hadrien Desuin, cette décision marque son indépendance, une attitude qui pourrait s’avérer payante lors des prochaines élections.
«J’ai informé John Bolton hier soir que ses services ne sont plus nécessaires à la Maison blanche. Je n’étais pas du tout d’accord avec bon nombre de ses suggestions, comme d’autres membres de l’administration, et c’est pourquoi j’ai demandé à John sa démission, qui m’a été remise ce matin.»
Déjà désavoué publiquement à plusieurs reprises, John Bolton aurait présenté lui-même sa démission la veille du tweet présidentiel. Le fiasco des négociations avec les Talibans, qui devaient se tenir en grande pompe à Camp David à quelques jours de l’anniversaire du 11 septembre, a fait déborder le vase. Les «autres membres de l’administration» n’ont qu’à bien se tenir.
Fidèle à sa réputation d’inlassable faucon, Bolton était partisan d’une ligne extrêmement dure sur les sujets iranien, coréen, chinois et israélien. Ses positions étaient si prévisibles que son maître s’en moquait ouvertement. Il était finalement plus écouté lorsque Donald Trump regardait ses éditoriaux sur Fox news, à une époque où le président américain devait rassurer son camp, à quelques semaines des élections de mi-mandat au Congrès. Mais le président n’était pas le seul à se plaindre de Bolton. Mike Pompeo, secrétaire d’État, pourtant sur la même ligne, cherchait également à l’écarter. Un grand classique: les relations entre le ministre des Affaires étrangères et le conseiller à la sécurité ont toujours été difficiles dans l’histoire des États-Unis.
Bolton a compris qu’il était plus facile de conseiller le président depuis l’extérieur de la Maison-Blanche plutôt que de l’intérieur. N’est-ce pas Tucker Carlson, le journaliste-vedette de la chaîne Fox news qui dans un éditorial aurait décidé le président de ne pas bombarder l’Iran?
Trump aime s’entourer de faucons, on pense à la patronne de la CIA, Gina Haspel, ou encore au nouveau secrétaire à la Défense, Mark Esper. Mais, paradoxalement, il veut négocier la paix à peu près partout. Même sur l’Iran, Donald Trump ne semble pas complètement fermé. Quant à la Russie, il ne cache pas son attirance pour Vladimir Poutine. Il agit comme s’il aimait mettre en avant des collaborateurs agressifs pour mieux jouer le rôle de médiateur et de conciliateur. Il ne serait pas surprenant que le successeur de Bolton soit tout aussi partisan d’une politique étrangère agressive. Le poste n’est pas simple tant il est difficile de suivre la ligne présidentielle, tant le président aime secouer son entourage et lui prouver qu’il peut se forger son opinion tout seul.
Donald Trump ne cherche pas son Henry Kissinger, l’habile conseiller à la sécurité en qui Richard Nixon avait placé toute sa confiance. Il usera bientôt un quatrième conseiller en moins de 4 ans, sans compter les intérims.
Mais politiquement, il sait que cette attitude est payante. Ses électeurs l’ont élu, lui seul et non pas ses conseillers. En sacrifiant régulièrement ses collaborateurs, le président américain prouve aux Américains qu’il a l’autorité sur «l’État profond». Par lui, le peuple américain reste aux commandes. Et il saura s’en souvenir dans un an, pour sa réélection.
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