Comment Keystone XL a transformé le parti démocrate (texte original)
L’ensemble des candidats démocrates ont dédié une partie substantielle des trois premières rondes de débat à la question des changements climatiques. Aucun autre enjeu n’a été traité de la sorte depuis le début de la course.
Alors qu’il se préparait à entamer sa campagne de réélection en 2012, Barack Obama a été confronté à une problématique toute particulière. La compagnie TransCanada avait dans ses cartes un projet massif d’oléoduc qui transporterait du pétrole de l’Ouest canadien jusqu’aux raffineries texanes situées autour du golfe du Mexique.
Or, puisque l’oléoduc en question, nommé Keystone XL, allait traverser la frontière canado-américaine, TransCanada devait obtenir le feu vert de l’administration Obama avant d’en commencer la construction.
Politiquement, l’enjeu était un véritable cauchemar pour Obama, puisqu’il mettait en opposition deux piliers de la coalition électorale du Parti démocrate : les syndicats qui, d’un côté, appuyaient le projet et les groupes environnementalistes, de l’autre, qui le rejetaient.
C’était ce que l’on appelle communément un « Catch-22 » : le président allait frustrer une partie de sa base, peu importe la décision qu’il prendrait. Dans ce contexte, Obama a tergiversé, repoussé, imposé délai après délai avant de dévoiler son jeu… puis, en janvier 2012, à dix mois du vote, a annoncé qu’il s’opposait formellement à Keystone XL.
Cette décision, et les batailles politiques et juridiques qui s’en sont suivies jusqu’à la toute fin du second mandat Obama, est même venue brouiller les relations diplomatiques avec le gouvernement canadien, mené à l’époque par Stephen Harper, farouche partisan du projet.
Si le monde n’a pas arrêté de tourner avec cette décision de Barack Obama, la dynamique politique autour de l’environnement, elle, a clairement changé.
Plus spécifiquement, le Parti démocrate est devenu de plus en plus agressif sur la question de la promotion de l’environnement et de la lutte non seulement à la pollution de façon générale, mais à plusieurs industries du secteur énergétique spécifiquement.
Ainsi, quatre ans plus tard, en 2016, la successeure d’Obama à la tête du parti, 2016, Hillary Clinton faisait ouvertement campagne en promettant de « mettre beaucoup de mineurs de charbon au chômage » !
Aujourd’hui, à l’aube des primaires présidentielles de 2020, les différents aspirants majeurs du côté démocrate se disputent une chaude lutte à savoir lequel (ou laquelle) sera vu comme étant le plus audacieux en la matière.
Même le meneur actuel de la course, l’ex-vice-président Joe Biden, très largement perçu comme étant le plus modéré du lot, a promis un plan pour le climat avoisinant les 2000 milliards de dollars, des émissions de gaz à effet de serre « nulles » d’ici 2050, et une élimination totale des combustibles fossiles. La compétition à sa gauche, incluant la sénatrice du Massachusetts Elizabeth Warren, va jusqu’à promettre l’élimination des émissions de gaz à effets de serre pour les nouvelles voitures d’ici dix ans.
L’ensemble des candidats démocrates ont dédié une partie substantielle des trois premières rondes de débat à la question des changements climatiques. Ils ont également participé à des événements spéciaux sur le sujet, incluant un marathon télévisé de sept heures organisé par le réseau CNN au début du mois. Aucun autre enjeu n’a été traité de la sorte depuis le début de la course.
Rien de cela ne revient à dire qu’une victoire présidentielle démocrate l’an prochain assurera l’adoption de mesures législatives majeures touchant l’environnement. Toutefois, un peu comme dans le dossier des armes à feu, bien que l’appareil législatif demeure largement paralysé pour l’instant à Washington, les changements au sein du Parti démocrate, eux, sont bien réels. Et leurs impacts ne font sans doute que commencer à se faire sentir.
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