The Strength of Trump’s Conspiracy Theory

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Le maître de la Maison-Blanche, qui éructe chaque jour un peu plus sur Twitter, joue délibérément de cette partition complotiste qui a lui a si bien réussi jusqu’ici.

« Merdre » alors ! Comme le héros du théâtre de l’absurde de Jarry, Ubu-Trump livre chaque jour son lot de citations farcesques. Sa rage vengeresse est décuplée par la procédure de destitution lancée par le camp démocrate, à propos de sa conversation téléphonique avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky. Le maître de la Maison-Blanche est en effet soupçonné d’avoir conditionné son aide à l’Ukraine au lancement d’une enquête sur les affaires locales du fils de son rival démocrate Joe Biden.

Mais si @realDonaldTrump éructe chaque jour un peu plus sur Twitter, ce n’est pas par simple esprit de provocation. Donald et ses alliés jouent une partition complotiste délibérée, qui leur a jusqu’ici bien réussi. Scénario ? Donald est le héros qui rend à l’Amérique sa grandeur, et sert le peuple. Et tous ceux qui ne sont pas d’accord sont soit des imbéciles aveuglés par leur esprit partisan, soit des ennemis qui conspirent contre la patrie !

Une fable paranoïaque

Donald Trump croit-il réellement à cette fable paranoïaque ? Mystère. Mais complotisme et intimidation affleurent dans toutes ses interventions. Un jour, il tweete : « Comment est-il possible de destituer le Président qui a créé la meilleure Economie dans l’histoire de notre Pays… » ? Sous-entendu : quoi que j’aie fait, je suis le champion, donc foutez-moi la paix ! Le lendemain, lors d’une conférence de presse avec le président finlandais (qui ne sait plus où se mettre), il esquive la question insistante d’un journaliste de Reuters d’un « C’est à moi que tu parles ? » digne du De Niro de « Taxi Driver ».

Une publicité politique caricaturale met en scène « Mister Nice Guy » – Trump, qui renégocie les mauvais accords commerciaux, protège les frontières et crée des emplois… tandis que « The Swamp » – le marécage démocrate haineux – veut l’abattre. Trump retweete frénétiquement les éditorialistes de Fox et de Breitbart qui accusent les « Do Nothing Democrats » (démocrates qui ne font rien) d’avoir monté une « chasse aux sorcières », un « mensonge », une « arnaque ». Mais paradoxalement, le président assume pleinement de demander – en privé ou en public – à des responsables étrangers d’enquêter sur ses adversaires à la présidentielle. Il a même affirmé à plusieurs reprises que la Chine devrait, elle aussi, « commencer une enquête sur les Biden » !

Il pulvérise les codes de la diplomatie

C’est que le président américain passe son temps à pulvériser les codes de la diplomatie. Selon le « Washington Post », Trump a tour à tour promis à l’Arabie saoudite de l’aider à intégrer le G7, félicité le despote philippin Rodrigo Duterte (qui a fait assassiner sans sommation des milliers de ses concitoyens) pour son « magnifique boulot sur le problème de la drogue », et demandé à Vladimir Poutine des conseils sur la meilleure manière d’amadouer le président nord-coréen Kim Jong-un…

Gare aux voix dissidentes ! Ceux qui n’approuvent pas à 100 % les actions du président génial sont des « menteurs », des « escrocs » ou des « corrompus ». Y compris dans le camp républicain. Mitt Romney se dit choqué par la conversation avec Zelensky ? Il est aussitôt qualifié de « connard prétentieux », qui ne sait même pas gagner une élection.

A l’évidence, le style complotiste de Trump clive profondément. Selon le site FiveThirtyEight, plus de 53% des Américains désapprouvent sa politique, avec 46,5 % en faveur de la procédure de destitution, et 44,7 % contre. Sans surprise, les républicains – majoritaires au Sénat – soutiennent toujours massivement le président, ce qui devrait empêcher sa destitution. Tant que le « Grand Old Party » fait corps derrière lui et que l’économie tient, Donald Trump pourra se maintenir… et même – qui sait? – être réélu en novembre 2020.

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