Hongkong, victime de l’affrontement sino-américain
Editorial. Pékin veut durcir son emprise sur Hongkong, au mépris du principe « un pays deux systèmes ». L’attitude jusqu’au-boutiste de Donald Trump n’incite malheureusement pas la Chine à la modération.
Le principe « un pays, deux systèmes », qui régit depuis 1997 les relations entre la Chine et Hongkong, vit ses dernières heures. L’Assemblée populaire nationale chinoise devrait approuver, jeudi 28 mai, un projet de loi imposant à Hongkong une loi sur la « sécurité nationale ». Prévu par l’article 23 de la mini-Constitution de Hongkong, ce texte dispose l’interdiction de tout acte de trahison, de sécession, de sédition et de subversion contre la Chine. Il n’avait jamais été formellement introduit, en raison de la très forte opposition des Hongkongais, qui le jugent liberticide.
Un an après d’immenses manifestations pacifiques contre le projet de loi visant à favoriser les extraditions vers Pékin, six mois après des élections marquées par un raz-de-marée démocrate, les dirigeants chinois ont décidé de passer outre et d’imposer à Hongkong une loi dont ses habitants ne veulent surtout pas. Le message est simple : Hongkong, c’est la Chine. Seul Pékin est à même de dire ce qui relève encore des « deux systèmes ».
Xi Jinping montre surtout ici qu’il est dans une impasse. Depuis un an, les dirigeants chinois ont multiplié les faux pas à propos de Hongkong, transformant un mouvement de protestation à l’origine limité en une révolte contre le régime communiste. Des milliers de jeunes ont été arrêtés, quelques-uns incarcérés, et la jeunesse de Hongkong n’a plus rien à perdre. Elle ne manifeste pas pour des jours meilleurs, mais contre un avenir qui ne peut, pour elle, être que pire. L’introduction d’une loi de sécurité nationale ne ramènera évidemment pas le calme.
Coup de force
Jusqu’où est prêt à aller Pékin ? Un nouveau raidissement du régime serait malheureusement la suite logique d’une politique qui assimile toute contestation à une « sédition », et tout dialogue à une faiblesse. L’Occident, de son côté, paraît à court de solutions. En multipliant ces derniers mois les provocations à l’égard de Pékin dans tous les domaines, Washington s’est décrédibilisé. Plus la Maison Blanche prétend venir en aide aux démocrates hongkongais, plus la population chinoise soutient son gouvernement.
L’argument de Pékin selon lequel les démocrates de Hongkong sont « manipulés » par les Etats-Unis n’est pas crédible, mais l’utilisation des contestataires par l’administration Trump a sérieusement nui à leur cause. Le nouveau coup de force de Pékin est tout autant la réponse à Donald Trump d’un pouvoir chinois devenu nationaliste, qu’une action destinée à ramener le calme à Hongkong.
Vendredi 22 mai, Josep Borrell, le haut représentant de l’Union européenne pour la politique extérieure, a rappelé l’« attachement » de l’Union européenne au principe « un pays, deux systèmes », qui permet à Hongkong de bénéficier d’un « haut degré d’autonomie ». Il a souligné « l’importance de la préservation du débat démocratique » et du respect des droits de l’homme. Mais l’Europe, hélas, ne semble pas en mesure de faire entendre la voix de la raison à Pékin.
Lorsque la Grande-Bretagne a rétrocédé Hongkong à la Chine, le 1er juillet 1997, le monde était relativement optimiste, convaincu que la Chine et l’Occident allaient se rapprocher. Hongkong devait être l’un des moyens de ce rapprochement. Un quart de siècle plus tard, c’est malheureusement l’inverse qui s’est produit. Hongkong est devenu le symbole de la difficile cohabitation entre deux systèmes de plus en plus antithétiques.
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