Kamala Harris, a New Target for Donald Trump’s Racist Attacks

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Kamala Harris, nouvelle cible des attaques racistes de Donald Trump

La colistière du candidat démocrate Joe Biden représente une large et dynamique diaspora noire dont l’influence est grandissante aux États-Unis. Et c’est justement ce qui irrite le président Donald Trump…

Une étape cruciale vient d’être franchie dans le calendrier qui mène tout droit à l’élection présidentielle américaine du 3 novembre : Joe Biden a finalement choisi Kamala Harris comme colistière sur le ticket démocrate.

Ce choix n’est pas surprenant, tant la sénatrice de Californie faisait partie des grandes favorites pour ce poste convoité. Elle réunit beaucoup de qualités : elle est une femme (une condition sine qua non), noire (de père jamaïcain et de mère indienne, elle se définit elle-même comme telle), démocrate centriste mais attentive aux demandes de l’aile gauche du parti ; très à l’aise à la télévision et bonne débatteuse (ce qui sera utile face à Mike Pence).

Ses quelques faiblesses (une campagne moyenne lors des primaires démocrates ; un échange aigre-doux avec Biden lors d’un débat télévisé, et un bilan de procureure de Californie qui pose question au moment où la police américaine est sur la sellette) n’ont finalement pas pesé lourd, et le camp démocrate a unanimement salué la décision de Biden.

Identité noire

D’un point de vue sociologique, Kamala Harris représente parfaitement la nouvelle vague migratoire venue d’Asie et des Caraïbes qui a transformé la société américaine à partir de la fin des années 1960. Au XXe siècle, nombreuses ont été les personnalités politiques d’origine caribéenne : Marcus Garvey, Stokely Carmichael, Shirley Chisholm, Colin Powell et tant d’autres.

La mère de Kamala Harris, venue d’Inde, éleva ses deux filles en valorisant leur identité noire, et la sénatrice n’a jamais renié cet héritage : « Je suis née noire. Je mourrai noire. Je ne vais pas m’excuser auprès de ceux qui ne comprennent pas » confia-t-elle dans une interview en 2019.

De fait, être « noir » aux États-Unis renvoie à un monde diasporique très large qui inclut celles et ceux qui ont des ancêtres africains, ou sont africains eux-mêmes. Cela n’équivaut pas à être « africain américain », une identité qui renvoie à celles et ceux issus d’ancêtres esclaves sur le territoire américain.

Comme Barack Obama, dont le père était kenyan, Kamala Harris fait partie d’un monde noir diasporique dynamique, dont l’influence est grandissante aux États-Unis. Cela a pu faire grincer quelques dents du côté de certains Noirs américains, qui regrettent que les Noirs qui accèdent, ou sont en mesure d’accéder aux plus hautes fonctions, soient issus de la diaspora plutôt que du monde africain américain stricto sensu, mais ces voix discordantes sont très minoritaires.

Le choix de Kamala Harris est très largement approuvé par les Noirs américains en général, si l’on en juge par les réactions des éditorialistes, des réseaux sociaux, et les reportages de presse. Les prochains sondages devraient confirmer ces bonnes dispositions.

Un ticket rassurant

Du côté de la population blanche, Kamala Harris est également une personnalité consensuelle : elle est une femme, ce qui devrait conforter l’avance des démocrates dans l’électorat féminin. Rappelons qu’en 2016, Trump avait rassemblé 53 % des suffrages des femmes blanches, en dépit de son machisme décomplexé.

Il devrait en aller différemment en novembre, pour des raisons qui tiennent à la manière dont Trump a géré la crise sanitaire, et au mouvement Black Lives Matter, qui bénéficie d’un soutien majoritaire de leur part.

Certes, l’électorat fidèle à Trump ne changera pas d’avis, mais il ne suffit pas au président sortant pour être réélu. Dans les États critiques du Michigan, du Wisconsin et de la Pennsylvanie, une très large majorité de femmes blanches est désormais acquise aux démocrates.

Dans des États habituellement conservateurs comme le Texas ou la Géorgie, les femmes modérément républicaines pourraient bien faire la différence, en votant Biden-Harris, un ticket finalement rassurant.

Vitupérations racistes

Côté républicain, la riposte n’a pas tardé. Sans craindre de se contredire, Trump et ses amis dénoncent le « gauchisme » supposé de Kamala Harris, tout en fustigeant ses actions de procureure intransigeante.

De manière plus venimeuse, Trump s’est interrogé sur le droit de Harris à être candidate à la vice-présidence. Certes, la californienne a plus de trente-cinq ans (première condition légale), mais est-elle bien née aux États-Unis (seconde condition) ? La question est absurde, puisque la sénatrice est née à Oakland — et peu importe la nationalité de ses parents.

Mais Trump veut instiller le doute, comme il l’avait fait avec Obama. Avec d’autres enragés, il avait questionné son lieu de naissance, en dépit de l’acte officiel que l’ancien président avait présenté pour couper court aux rumeurs.

De fait, aux yeux de Trump, un homme noir ou une femme noire ne peuvent légitimement aspirer à la fonction présidentielle, car ils ne sont pas tout à fait américains. Les vitupérations du président ne s’attaquent pas seulement aux choix politiques de ses adversaires, mais aussi à leur américanité, lorsqu’ils ne sont pas blancs.

En cela, Trump rappelle fortement les gouverneurs racistes du Sud profond dans les années 1960 : il ne tolère les Noirs que lorsqu’ils restent à leur place, et qu’ils ne s’avisent pas de remettre en cause la hiérarchie sociale et raciale.

S’il était battu en novembre prochain, Trump devrait laisser la place à celui qui fut le vice-président d’Obama et qui a choisi une femme noire comme vice-présidente. Horreur ! On comprend dès lors que sa hargne en soit décuplée. Ses tweets rageurs ne visent pas seulement ce que proposent Biden et Harris, mais aussi ce qu’ils représentent.

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