US Presidential Election: The Least Conventional of Conventions

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Présidentielle américaine : la moins conventionnelle des conventions

Editorial. Reflet d’une campagne présidentielle à nulle autre pareille, la convention démocrate, en format virtuel, éclaire l’enjeu pour les électeurs de Joe Biden : celui de la sauvegarde de la démocratie

Pour les familiers du rite quasi séculaire des conventions des partis politiques américains, dont le folklore et l’énergie donnent tous les quatre ans une impulsion décisive à la campagne électorale présidentielle, celle que le Parti démocrate a ouverte lundi 17 août est sans conteste la moins conventionnelle de toutes.

Ce qui est traditionnellement un grand spectacle politique dans une arène couverte surchauffée est remplacé cette semaine, pour cause de Covid-19, chaque soir en ligne jusqu’à jeudi, par un show virtuel de deux heures où les orateurs s’expriment depuis chez eux. Une convention politique, aux Etats-Unis, c’est trois ou quatre jours d’éloquence, de musique, d’ovations, de rires et de larmes parfois, et surtout d’enthousiasme militant qui, couronné par le lâcher de ballons après le discours d’acceptation du candidat ou de la candidate, lui permet d’affronter, gonflé à bloc, la dernière longueur de la campagne.

Rien de tout cela ne franchira cette année le filtre des écrans, ni pour le Parti démocrate du candidat Joe Biden, ni pour le Parti républicain du candidat Donald Trump. Cette campagne de 2020 n’est pareille à aucune autre ; la convention démocrate, qui devait se tenir à Milwaukee avant que la pandémie ne tue près de 170 000 personnes aux Etats-Unis, en est l’inévitable reflet.

Deux facteurs définissent cette campagne : le coronavirus et Donald Trump. Car si la pandémie a profondément bouleversé l’élection de 2020, depuis la saison des primaires jusqu’à l’organisation du scrutin, le 3 novembre, c’est bien le président sortant, lui-même un président à nul autre pareil, qui en est le centre. Michelle Obama, dont le discours a clos la première soirée de la convention démocrate lundi, ne s’y est pas trompée, attaquant frontalement celui qui a succédé à son mari en 2016 : « Donald Trump n’est pas le bon président pour notre pays », a-t-elle dit sur un ton grave. « Complètement dépassé », « il n’est pas à la hauteur du moment » que traversent les Etats-Unis.

Bernie Sanders, rival malheureux de Joe Biden dans les primaires, n’a pas hésité à comparer ce « moment » à celui qui a frappé l’Allemagne nazie : pour lui, « l’enjeu de cette élection est la sauvegarde de notre démocratie ».

La phrase n’est pas excessive. Plus grave que le format réduit des conventions, la complexité de l’organisation du scrutin du 3 novembre, si la pandémie continue à sévir, et les soupçons que fait délibérément peser M. Trump sur d’éventuelles fraudes dans le vote par correspondance, sont potentiellement lourds de conséquences. Traumatisés par l’incapacité de l’équipe au pouvoir à Washington à contrôler l’épidémie de Covid-19, de plus en plus d’Américains se demandent aujourd’hui si la même équipe sera capable d’assurer la validité du scrutin et d’assumer une éventuelle défaite le soir du 3 novembre.

L’enjeu est donc double pour Joe Biden, sa coéquipière Kamala Harris et le Parti démocrate. Il leur faut, bien sûr, promouvoir un véritable projet politique alternatif qui dépasse le simple rejet de Donald Trump grâce auquel M. Biden jouit actuellement d’une bonne avance dans les sondages. Mais il leur faut aussi susciter suffisamment d’adhésion et de motivation démocratiques dans l’électorat pour que la victoire du ticket Biden-Harris, si elle est confirmée par les urnes, soit suffisamment large et éclatante pour être incontestable. En cela, l’énergie insufflée par une convention traditionnelle aurait été utile.

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