What Lessons Shall Be Learned from the Failure of 5G in the United States?

 

 

 

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Quels enseignements faut-il tirer de l’échec de la 5G aux Etats-Unis ?

Les Etats-Unis ont joué un rôle pionnier dans le déploiement de la 5G. Mais l’expérience se révèle pour le moins mitigée à ce stade. Un cas d’école dans l’adoption précoce des nouvelles technologies riche d’enseignements pour les opérateurs qui n’ont pas encore sauté le pas.

Les Etats-Unis ont tenu à être le premier pays au monde à lancer la 5G en novembre 2018 pour l’accès fixe à internet à haut débit comme alternative sans fil à la fibre optique, puis en avril 2019 pour les services mobiles, une primeur partagée cette fois avec la Corée du Sud. Et pour cause : ils font de la 5G une technologie clé de leur souveraineté et un axe fort de leur course technologique avec la Chine.

Pas d’allocation de fréquences moyennes

Mais ce lancement s’est fait dans la précipitation sans attendre l’attribution par la FCC (Federal Communications Commission) de fréquences dans la bande moyenne de 3,5 GHz occupée par les militaires. Et cela se voit dans les choix des quatre opérateurs nationaux, devenus trois depuis la fusion en avril 2020 de Sprint et T-Mobile US.

AT&T et Verizon ont tout de suite fait le pari des bandes à ondes millimétriques de 28 et 39 GHz pour des services d’accès fixe et sans fil à internet à haut débit. L’avantage de cette option est de faire ressentir aux utilisateurs l’intérêt de la 5G en termes de débit, avec une amélioration d’un facteur 40 par rapport à la 4G. Mais la faible couverture des antennes dans ces bandes de fréquences la restreint aux zones métropolitaines les plus denses.

T-Mobile US a opté pour la bande de 600 MHz et Sprint pour celle de 2,5 GHz, en partage avec leurs réseaux 4G, avec l’avantage d’assurer d’emblée une bonne couverture mais l’inconvénient de peu d’augmentation des débits par rapport à la 4G+, la dernière évolution de la 4G. ” Les opérateurs américains sont partis tôt dans une logique de déploiement rapide, explique à L’Usine Nouvelle Pierre Renaldo, consultant en télécoms au cabinet Wavestone. Ce modèle les cantonne soit à des services d’internet mobile classiques sans amélioration perceptible de l’expérience utilisateur par rapport à la 4G+, soit à des services d’accès fixe à internet pour toucher de nouveaux foyers difficiles à raccorder au haut débit par fibre optique. “

Le déploiement freiné par le Covid-19

Aussi le déploiement peine à dépasser la phase de test. ” La couverture par la 5G reste limitée à quelques villes pilotes et seulement à certaines parties de ces villes, précise à L’Usine Nouvelle Gleen O’Donnell, analyste au cabinet Forrester. Les villes les plus denses comme New York, Boston ou San Francisco sont les premières à bénéficier de cette technologie. Le gouvernement promet que la 5G résoudra le problème du haut débit en milieu rural aux États-Unis. Je suis sceptique. “

La pandémie du Covid-19, qui frappe durement les Etats-Unis, n’aide pas. ” Elle semble avoir temporairement neutralisé l’hystérie autour de la 5G, remarque Gleen O’Donnell. Les demandes de nos clients ont considérablement diminué sur le sujet, car nos entreprises clientes se sont repliées sur des technologies plus tactiques et pragmatiques. Nous nous attendons à ce que l’intérêt recommence à augmenter au deuxième trimestre de 2021. Cela donnera aux opérateurs le temps d’affiner leurs offres et d’améliorer leur couverture. “

Les opérateurs attendent la libération de la bande de fréquences de 3,5 GHz pour franchir une nouvelle étape. Ce que le président Donald Trump a promis de faire, laissant miroiter des enchères sur ces fréquences avant la fin de 2021. ” Ce sera une étape importante, car ces fréquences moyennes offrent un bon compromis entre débit et couverture “, note Pierre Renaldo, de Wavestone.

Erreurs de marketing

Il n’existe pas de chiffres donnant la mesure du déploiement de la 5G aux Etats-Unis, mais il y aurait un peu plus de 1 million d’abonnés. C’est peu comparé aux 8 millions en Corée du Sud et surtout aux chiffres de la Chine, aujourd’hui le pays le plus avancé dans la 5G avec 500 000 antennes installées et 160 millions d’abonnés, dont plus de 100 millions rien que pour ses deux plus grands opérateurs, China Mobile et China Telecom.

Pour Stéphane Téral, analyste en télécoms au cabinet LightCounting, l’expérience des Etats-Unis s’avère pour le moins mitigée. ” Pour l’instant, il n’y a rien de nouveau par rapport à la 4G puisque cette 5G n’est que de la 4G sous cortisone !, estime-t-il. Mêmes les services d’accès fixe à internet dans les fréquences à ondes millimétriques ne font pas de bruit. Verizon ne donne ni nombre d’abonnés, ni chiffre d’affaires. Ses services promettent de très forts débits mais pour quoi faire ? “

Gleen O’Donnell pointe des erreurs de marketing et communication. ” Les consommateurs étaient enthousiasmés par le potentiel de la 5G, mais ont été déconcertés par le marketing des opérateurs qui ont embelli la 4G pour la vendre à tort comme de la 5G, critique-t-il. Beaucoup ne voient pas encore concrètement la valeur de la 5G, car la 4G fonctionne «assez bien» et la 5G a un coût plus élevé. Quant aux entreprises, elles restent en mode «attendre et voir» pour déterminer si la 5G basée sur les opérateurs répondra à leurs besoins. Les cas d’usage phares de la 5G se révèlent insaisissables et controversés. Par exemple, les véhicules autonomes sont souvent présentés comme un cas d’usage convaincant, mais beaucoup, y compris moi-même, le contestent.”

Manque de contenu

Ces difficultés de départ ne préjugent pas de l’issue commerciale à long terme. ” Cette première déception est classique dans l’adoption des nouvelles technologies, rappelle Pierre Renaldo. Elle est comparable à celle connue dans la 4G. Il faut laisser du temps aux usages d’émerger. C’est le contenu qui manque aujourd’hui. C’est l’arrivée de services comme Netflix qui a révélé l’intérêt de la 4G. Ce sera pareil pour la 5G. Il faut voir aussi le déploiement de la 5G comme un processus graduel. Ce que les Américains proposent aujourd’hui n’est que le premier pas avec des services s’appuyant sur un cœur de réseau 4G. Les choses changeront quand ils passeront à un cœur de réseau 5G.” Ce qui pourrait intervenir à la fin de 2021, en avance sur la France où cela n’est pas attendu avant 2023.

Pour Stéphane Téral, de LightCounting, les Américains paient le prix de leur départ précoce. ” Rien ne sert de courir, il faut partir à point, conseille-t-il aux opérateurs qui n’ont pas encore franchi le pas. Il faut rappeler que le business case de la 5G n’est pas basé sur les consommateurs qui aujourd’hui ne voient pas beaucoup de différence entre 4G et 5G, sauf si vous avez un smartphone qui reçoit les ondes millimétriques dans un hotspot. Il vise tout le reste : connexions massives d’objets, industrie 4.0, aviation, transport, agriculture, énergie… En plus, en Chine, les opérateurs ont commencé à constater une très forte augmentation de la consommation d’énergie des antennes 5G, les obligeant à les éteindre pendant la nuit. Or un des paramètres clés du cahier des charges 5G est de diminuer la consommation d’énergie !”

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