Donald Trump s’était illustré en nommant à l’étranger des représentants incompétents ou hostiles à leurs pays d’accueil. S’il veut remettre la diplomatie américaine sur les rails, le nouveau président, Joe Biden, doit rompre avec cette politique.
Le président Joe Biden a réservé au département d’Etat (l’équivalent des affaires étrangères) sa première visite à un ministère de l’administration américaine, jeudi 4 février. C’est un signe fort : son prédécesseur, Donald Trump, avait préféré aller saluer d’abord le Pentagone et la CIA. « L’Amérique est de retour », a proclamé le nouveau président démocrate, exprimant clairement sa volonté de voir ce retour sur la scène mondiale se traduire par la diplomatie plutôt que par la force. La première mesure qu’il a annoncée, l’arrêt de l’aide américaine à l’Arabie saoudite dans la guerre au Yémen, en est une illustration.
M. Biden veut aussi ressusciter un appareil diplomatique particulièrement maltraité par le président Trump et son homme lige à la tête du département d’Etat, Mike Pompeo. Méprisé, appauvri, instrumentalisé, le corps diplomatique américain vient de vivre quatre années difficiles et avait bien besoin de cette injection de confiance présidentielle : « Nous avons besoin de vous, a assuré Joe Biden devant un groupe de fonctionnaires. Vous êtes le visage de l’Amérique. »
Beaucoup à faire
Il y a beaucoup à faire. Donald Trump a été le chef de l’exécutif qui a le plus largement exploité la longue tradition américaine de nomination d’amis politiques à des postes d’ambassadeurs, ces fameux « political appointees » sans expérience des relations extérieures, dont le plus grand mérite est d’avoir contribué au financement de la campagne électorale du président. Pendant quatre ans, le « visage de l’Amérique » a été celui de M. Trump mais aussi, dans les capitales alliées, celui d’émissaires personnellement choisis parmi ses affidés.
Au mieux, comme dans le cas de l’ambassadrice Jamie McCourt à Paris, ex-copropriétaire de l’équipe de baseball Dodgers de Los Angeles qui avait versé 400 000 dollars pour la campagne Trump, ils ont été insipides. Initialement confirmée par le Sénat comme ambassadrice auprès du Royaume de Belgique, Mme McCourt avait été subitement réorientée sur Paris lorsque le président Trump avait découvert, lors de sa visite du 14 juillet 2017, que les Etats-Unis n’avaient pas d’ambassadeur en France. Au pire, comme dans le cas de Richard Grenell, ambassadeur à Berlin, et de Gordon Sondland, son collègue auprès de l’UE, ils ont activement mené des politiques hostiles. M. Grenell a par exemple appelé les extrêmes droites européennes à s’unir sous la houlette du chantre du national-populisme américain Steve Bannon – heureusement en vain.
A Londres, Woody Johnson, qui a fait fortune dans la National Football League, est accusé d’avoir œuvré – en vain, là aussi – pour obtenir l’organisation du tournoi national Open de golf sur un des terrains que possède Donald Trump en Grande-Bretagne. Tous ont en commun d’avoir eu des relations particulièrement difficiles avec les diplomates de carrière sous leurs ordre ; Jeffrey Gunter, dermatologue et ambassadeur en Islande, a ainsi épuisé sept adjoints en deux ans.
S’il veut changer la face de l’Amérique, M. Biden et son secrétaire d’Etat, Tony Blinken, si bon connaisseur de l’Europe, peuvent commencer par nommer des ambassadeurs normaux, sérieux et compétents. Paris est traditionnellement un poste prestigieux offert à des fidèles, mais certaines personnalités de poids comme Pamela Harriman et Felix Rohatyn ont su se révéler d’excellents ambassadeurs. Au moment où les relations transatlantiques amorcent un virage délicat, un choix judicieux de représentants des Etats-Unis serait une première marque d’égards pour leurs partenaires européens.
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