Vermont: Politics and Vaccination Become Entangled

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Vermont : politique et vaccination s’entremêlent

Sachant que tout a été politisé au États-Unis, y compris la pandémie de COVID-19, il ne faut pas s’étonner que la campagne de vaccination en cours attise les divisions politiques.

Rafael Jacob

8 avril 2021

Le 1er avril dernier, le gouverneur républicain du Vermont, Phil Scott, a provoqué un tollé en accordant la priorité, dans la campagne de vaccination contre le coronavirus, aux résidants de l’État qui s’identifient comme noirs ou autochtones.

On s’interroge sur la constitutionnalité d’un tel décret, puisqu’il se base sur un critère racial pour offrir une protection médicale à une partie limitée de la population. Mais la question est plus large.

Les scientifiques savent depuis un an que le tout premier facteur de risque en ce qui concerne les complications graves de la COVID-19 est, et de loin, l’âge. Ce n’est pas le seul, bien sûr — l’obésité, le diabète et l’hypertension, pour ne citer que ceux-là, constituent tous des facteurs de risque additionnels. De plus, la prévalence des comorbidités augmente avec l’âge, ce qui rend les personnes plus vieilles encore plus vulnérables.

Si l’objectif est de « suivre la science », cette dernière est on ne peut plus claire lorsqu’il est question de vaccination : l’âge devrait être le facteur numéro un.

Et pourtant, la décision du gouverneur permet théoriquement à des jeunes en bonne santé de passer devant des personnes de 55 ans et plus ayant des comorbidités… ce qui va à l’encontre des recommandations des Centers for Disease Control and Prevention (CDC).

Pas de vase clos

Cela peut sembler mystifiant, mais cette pandémie n’agit pas en vase clos : elle frappe une société profondément déchirée par des débats et des divisions sur le plan identitaire et racial. Il est vite devenu apparent, dès les débuts de la crise sanitaire, au printemps 2020, que les communautés minoritaires souffraient disproportionnellement du virus.

Les CDC estiment à ce jour que les Afro-Américains et les Américains d’origine autochtone sont de trois à quatre fois plus susceptibles que les Blancs d’être hospitalisés en raison d’une infection au coronavirus, et risquent deux fois plus d’en mourir. Cela n’est pas tant dû à des différences biologiques intrinsèques qu’à un ensemble de facteurs socioéconomiques désavantageant ces groupes à la base.

Si le gouverneur du Vermont a décidé de prioriser des minorités ethniques, c’est justement à cause de leur risque accru d’hospitalisation et parce qu’elles ne sont pas vaccinées actuellement au même rythme que la population blanche. Phil Scott affirme que, en réaction à sa décision, son cabinet et le département de la Santé de l’État ont été la cible, particulièrement sur les médias sociaux, de « commentaires au vitriol et déplacés » teintés de racisme. Certains ont même accusé le gouverneur de mettre des vies en danger : « Des personnes blanches de 45 ans touchées par le cancer ne peuvent pas se faire vacciner, mais des adolescents de couleur en santé, eux, le peuvent ? » a martelé une élue d’un État voisin.

Loin de faire demi-tour, le gouverneur maintient le cap.

Dans un sens, cette situation constitue une progression naturelle des choses. La dernière année, particulièrement après la mort de George Floyd au Minnesota en mai 2020, a braqué les projecteurs sur la problématique des inégalités raciales, et les réactions se sont enflammées encore davantage.

Depuis, des politiciens à la grandeur du pays ont cherché à se faire les porte-étendards d’un mouvement visant à atténuer certaines de ces inégalités. Pour certains, cela a pris la forme d’un appui au retrait de monuments érigés en l’honneur d’officiers confédérés ; pour d’autres, celle de la promesse de réformer le système de justice. Pour le Vermont, cela s’est traduit par l’établissement de priorités dans la vaccination contre la COVID–19.

Recommandations virevoltantes

Toujours la semaine dernière, les CDC et leur directrice Rochelle Walensky ont fait des déclarations qui semblaient contradictoires. Tout d’abord, Mme Walensky a affirmé que « les personnes vaccinées ne transportaient pas le virus », une information dont l’organisme s’est rapidement distancié. Puis, après que les CDC ont annoncé que les personnes pleinement vaccinées pouvaient voyager, leur directrice a rappelé qu’elle recommandait toujours d’éviter les voyages. Ce à quoi les CDC ont répliqué que voyager dans ces conditions ne représentait qu’un très faible risque. Certes, permettre les voyages et les recommander sont deux choses. Or, le manque de cohésion est manifeste : ces volte-face n’ont pas eu lieu à l’intérieur de quelques mois, de quelques semaines ou même de quelques jours, mais en l’espace de quelques heures.

La science évolue peut-être très rapidement, mais pas à ce point.

La science semble indiquer que la vaccination réduirait de façon presque complète la menace de complications graves liées à une infection. Le risque zéro n’existant pas, des êtres humains arrivent à des jugements humains différents quant à ce qui devrait être encouragé ou non dans un environnement où subsiste un risque minime. Et dans ce conflit d’idées, de valeurs et de perspectives… des recommandations d’une agence scientifique sont émises.

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