Coveted Wealth

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L’ambitieux « Plan pour les familles américaines » vient composer une trilogie dans l’offensive du président Joe Biden de relancer l’économie et de colmater de sérieuses brèches visant à propulser le virage social des politiques américaines. À défaut d’un rééquilibrage, il devrait en résulter une réduction des inégalités, avec une contribution un peu plus calibrée des revenus de 400 000 $US et plus aux recettes fiscales de l’État.

Au plan de soutien d’urgence suivi d’un plan de relance autour d’investissements dans les infrastructures appuyé sur une hausse de l’impôt des grandes entreprises s’ajoute une intervention à caractère sociale ciblée sur les enfants, les familles et les étudiants et financée par les mieux nantis : investissement dans l’éducation (plus de 500 milliards $US), dans les soins pour enfants (225 milliards) et de santé (200 milliards), accent sur les familles (225 milliards) et les crédits d’impôt (500 milliards)…

Ce programme de 1800 milliards sur 10 ans a pour principale source de financement une injection de 80 milliards dans l’accroissement de l’infrastructure et de la capacité de vérification et de recouvrement de l’Internal Revenue Service. L’agence estime que l’évasion fiscale engendre des pertes annuelles de quelque 1000 milliards en revenus fiscaux, et aussi que le groupe des 1 % parvient à éviter l’impôt sur 20 % de leur revenu, en moyenne. L’on espère recueillir ainsi un petit 700 milliards sur 10 ans.

Hausse du taux d’imposition sur les gains en capital pour les 0,3 % d’Américains les plus riches et ciblage niché des successions (300 milliards), colmatage d’échappatoires et récupération de taxes éludées par les contribuables et les propriétaires d’entreprises campant dans les échelons de revenu supérieur (360 milliards), hausse du taux d’imposition (plus de 110 milliards) et resserrement de règles comptables (100 milliards) complètent l’essentiel du financement, selon une compilation publiée par l’American for Tax Fairness.

Approche consensuelle

Si certains prédisent des débats musclés au Congrès, rarement une telle approche n’a-t-elle fait consensus dans les multiples sondages. Fox News, Yahoo News, Washington Post, CNBC, Reuters… L’appui à une plus grande contribution des revenus supérieurs atteint généralement les 65 %, doublant le pourcentage se disant opposé. Selon l’un d’eux, 88 % des démocrates se montrent favorables à une augmentation de l’imposition des revenus de 400 000 $US et plus, mais également 45 % des républicains. Sur la question d’une réduction des échappatoires fiscales, un sondage du Financial Times réalisé en octobre fait ressortir un appui favorable chez 89 % des démocrates et chez 86 % des républicains. Le soutien est aussi prononcé sur la question d’un renforcement des mesures de vérification de l’agence du revenu. Bref, il y a momentum.

Dans un autre sondage, 72 % des répondants déplorent que la pandémie a été l’occasion pour les plus fortunés de s’enrichir davantage. Si le creusement des inégalités est un phénomène qui s’inscrit dans le temps, la pandémie a été une autre occasion de braquer les projecteurs sur une division asymétrique prenant de l’ampleur. Un rapport publié par l’American for Tax Fairness et l’Institute for Policy Studies à partir des données du magazine Forbes indique que la croissance de la richesse des milliardaires américains s’est accélérée au cours de la période de 13 mois terminée le 12 avril. Ils se sont enrichis de 1620 milliards $US durant cette pandémie, portant leur valeur à 4560 milliards $US, en hausse de 55 %. Du groupe, les 15 plus riches ont vu leur fortune croître de 71 % dans l’intervalle, contre 48 % pour les autres milliardaires.

Au total, les États-Unis comptaient 719 milliardaires au 12 avril, 45 % d’entre eux venant des secteurs de la finance et de la technologie. Ils détenaient près de quatre fois plus de valeur que les 165 millions d’Américains composant la moitié inférieure de la société, soit 4560 milliards contre 1010 milliards selon une compilation faite à partir des données de la Réserve fédérale.

Des bémols

Le tout est cependant à mettre selon la perspective que cet accroissement de la richesse n’est pas le monopole des milliardaires. Cette moitié inférieure a tout de même vu sa valeur croître de 68 % en 13 mois, de 600 milliards à 1010 milliards, l’impulsion des programmes gouvernementaux d’aide et de soutien aux revenus comptant toutefois sûrement pour une partie de cette progression.

Aussi, le marché boursier n’a évidemment pas été amical qu’aux ultrariches durant cette pandémie. Au 31 mars, un fonds équilibré a livré un rendement médian de 24 % sur un an. Celui d’un fonds d’actions canadiennes a été de 43 %, de 41 % pour un fonds d’actions américaines, selon les univers AON. Les petits investisseurs qui auraient misé sur l’éveil des petites capitalisations auraient comptabilisé un rendement médian de 84 % entre les 31 mars 2020 et 2021.

Que dire de la flambée immobilière ? Au 31 mars, le prix médian d’une maison unifamiliale au Québec était en hausse de 24 % sur un an, de 22 % pour une copropriété.

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