Il est périlleux d’utiliser un terme chargé comme « fascisme », mais il y a aussi des risques à ignorer que le trumpisme s’en approche dangereusement.
Non, Donald Trump n’est pas Hitler et les trumpistes ne sont pas des nazis, pas plus que ceux qui prônent le passeport vaccinal.
Rien de plus facile – et de moins utile – que de lancer des épithètes exagérées dans les débats politiques. Il ne faut toutefois pas oublier les leçons de l’Histoire, car plusieurs caractéristiques du trumpisme en rappellent de sombres épisodes.
Insignifiantes exagérations
Jacques Parizeau aimait citer Talleyrand, qui disait que « tout ce qui est exagéré est insignifiant ». Il avait raison. Malgré tous ses défauts, Donald Trump n’est pas Hitler et ses partisans ne sont pas des nazis.
N’empêche que de plus en plus d’analystes politiques, à gauche comme à droite, n’hésitent pas à signaler de troublants parallèles entre le trumpisme et certains mouvements fascistes ou populistes autoritaires de droite.
Le mot en F
C’est le cas de David Frum, ancien conseiller de George W. Bush, qui décrit dans un article récent des relents de fascisme – ou à tout le moins de péronisme – dans plusieurs agissements des républicains. Il n’est pas le seul. De nombreux historiens et politologues font des observations semblables.
Quand Donald Trump caricature ses opposants comme des radicaux d’extrême gauche et traite les médias d’ennemis du peuple, on entend l’écho de Mussolini qui qualifiait tous ses opposants de bolchéviques et d’autres autocrates qui muselaient la presse.
Les républicains auraient pu renoncer au trumpisme après novembre 2020. Ils ont plutôt réaffirmé que leur parti est un culte de la personnalité, où chaque élu doit se prosterner devant « l’empereur en exil » de Mar-A-Lago et adhérer au « Grand mensonge » de sa victoire volée. Pour le trumpisme, ce mensonge s’apparente aux mythes fondateurs des fascistes.
Comme les démocrates sont considérés comme des traîtres à la nation, les républicains n’ont aucun scrupule à multiplier les obstacles à l’exercice du droit de vote pour leurs partisans minoritaires ou défavorisés.
L’autojustification du recours à la violence pour s’emparer du pouvoir politique est un autre trait du fascisme. On en retrouve des traces dans la banalisation – ou même la défense – de l’insurrection violente du 6 janvier au Capitole par de nombreux républicains. Trump louange encore les émeutiers qui ont répondu à son appel et les républicains du Congrès feront tout pour entraver l’enquête sur ces événements tragiques.
L’Histoire rime
Pour haranguer les trumpistes, le « mot en F » est contre-productif, mais pour comprendre le trumpisme, il est essentiel.
Les trumpistes qui méritent cette étiquette honnie sont loin d’être majoritaires dans l’électorat, mais, en noyautant le Parti républicain, ils sont parvenus à normaliser des idées et des pratiques qui sont dans le passé parvenues à éteindre la démocratie.
L’Histoire ne se répète pas nécessairement, mais elle rime.
Le risque d’échec de l’expérience démocratique américaine n’est ni exagéré ni insignifiant et il ne faut pas avoir peur des mots pour le dire.
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