Analyse
Vingt après les attentats de New York et de Washington, la prison américaine de Guantanamo est toujours en service, sur la base américaine à Cuba. Trente-neuf personnes y sont encore détenues, dont le cerveau présumé des attaques du 11 septembre 2001, de nouveau jugé avec quatre autres accusés à partir du mardi 7 septembre.
11 Septembre : la prison de Guantanamo, héritage encombrant des années George W. Bush
Un drapeau américain flotte sur la prison de Guantanamo, en octobre 2018.
Trou noir juridique dès son inauguration et symbole des excès de la « guerre contre la terreur » de George W. Bush, la prison américaine de Guantanamo a peu à peu disparu du débat politique. Elle reste pourtant toujours en service, alors que la guerre qui l’avait justifiée, aux yeux des autorités américaines – la guerre en Afghanistan – est, elle, officiellement terminée.
Encore une quarantaine de détenus
Inaugurée en janvier 2002 pour accueillir les « combattants illégaux » capturés en Afghanistan, la prison américaine de Guantanamo compte encore 39 détenus. Au total, 780 hommes et mineurs sont passés par ce lieu conçu par l’administration Bush pour enfermer, loin du sol américain, des prisonniers auxquels les États-Unis ne reconnaissaient pas le statut de prisonniers de guerre. Au plus fort de la « guerre contre la terreur », 675 personnes étaient incarcérées à Guantanamo.
En juillet, l’administration Biden a procédé à son premier transfert. Abdul Latif Nasser, un Marocain détenu depuis 2002, avait été accusé d’avoir collaboré avec les talibans. Aucune charge n’a toutefois été présentée contre lui et il avait été déclaré « libérable » dès 2016.
Sous Donald Trump, le dossier d’Abdul Latif Nasser n’avait toutefois pas avancé. Au final, il lui aura fallu attendre cinq ans, et le départ du président républicain, pour être libéré et retrouver son pays d’origine.
Cinq détenus accusés d’avoir été impliqués aux attentats du 11 septembre
Parmi les 39 détenus encore présents à Guantanamo, dix sont dans la même situation qu’Abdul Latif Nasser : ils ont également été estimés libérables par une commission réunissant les principales agences américaines (FBI, CIA etc.). Dix-huit autres sont derrière les barreaux, sans qu’aucune charge n’ait été retenue contre eux.
Parmi les derniers prisonniers de la base américaine à Cuba, seuls onze ont été formellement inculpés. Cinq sont visés pour avoir participé à l’organisation des attentats du 11 septembre 2001. Capturés en 2002 et 2003, le cerveau présumé des attaques et quatre autres prisonniers sont accusés, entre autres, de terrorisme, et risquent la peine de mort.
Inculpés en 2012, ils attendent leur jugement, qui ne devrait pas intervenir avant plusieurs mois. Stoppé au début de l’année 2019 pour cause de pandémie de Covid-19, leur procès a repris mardi 7 septembre. Mais la procédure, devant des tribunaux militaires, donne lieu à de très nombreux différends entre accusation et défense, ce qui explique, pour partie, la lenteur de la justice de Guantanamo. L’un des points délicats est notamment la recevabilité des éléments à charge, notamment en raison des techniques d’interrogatoires très controversées des années Bush.
Joe Biden veut en finir avec Guantanamo… comme Barack Obama avant lui
Depuis son arrivée à la Maison-Blanche, Joe Biden a fait part de sa volonté de fermer la prison de Guantanamo. Mais comment ? En janvier 2009, sitôt arrivé à la Maison-Blanche, Barack Obama avait signé un décret ordonnant la fermeture du symbole des années Bush. Une signature restée sans suite, le Congrès s’opposant au rapatriement des détenus sur le sol américain.
Même s’il a fait part publiquement de sa volonté de fermer Guantanamo, Joe Biden est plus prudent que son prédécesseur démocrate. Son administration a néanmoins remis en place sans tarder les commissions en vigueur sous Barack Obama et chargées d’étudier l’éventuel transfert vers un autre pays des détenus contre lesquels aucune charge n’a été retenue.
Selon le Center for Constitutional Rights (CCR), qui défend des détenus devant les tribunaux, le coût de la prison de Guantanamo peut être évalué à 540 millions de dollars par an – soit un coût actuel de plus de 13 millions de dollars par détenu. Ce qui en ferait, toujours selon le CCR, la « prison la plus chère au monde ».
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