Joe Biden à mi-chemin de son programme pour « rebâtir » l’Amérique
Le plan d’investissement dans les infrastructures a été définitivement adopté par le Congrès vendredi soir. Le plan social et climatique reste à voter. Les démocrates espèrent capitaliser sur ce premier succès pour démontrer leur capacité à agir et à améliorer les fondamentaux du modèle américain.
Par Véronique Le Billon
Publié le 7 nov. 2021 à 12:05Mis à jour le 7 nov. 2021 à 14:58
« Aujourd’hui est un bon jour. » Joe Biden n’a pas boudé son plaisir, samedi, pour saluer l’adoption du plan d’investissement dans les infrastructures, la veille, à la Chambre des représentants . Un projet de loi courant sur plusieurs années et prévoyant de consacrer 1.200 milliards de dollars, dont 550 milliards de nouveaux financements, à des investissements pour rénover les ponts, les routes, le rail, les ports et les aéroports. Mais aussi les réseaux électriques et Internet ou encore les bornes de recharge pour voitures électriques. Le plan ayant déjà été adopté au Sénat en août , Joe Biden, qui veut « rebâtir en mieux » l’Amérique ( « Build Back Better ») n’a plus qu’à y apposer sa signature.
L’adoption de ce premier plan est une victoire politique pour le président américain, fragilisé par le retrait chaotique en Afghanistan, une élection perdue pour son camp en Virginie et une inflation qui gâche la sortie de crise sanitaire. Investir dans les infrastructures est un serpent de mer politique : les infrastructures américaines ont vieilli et les Etats-Unis se sont fait doubler dans tous les classements internationaux par l’Europe et maintenant l’Asie. Donald Trump avait promis un grand programme de remise à niveau, comme ses prédécesseurs, sans finalement oser se plonger dans un dossier pourtant réputé parmi les plus consensuels dans le pays.
A mi-chemin
Une part des élus républicains a d’ailleurs ajouté ses voix à celles des démocrates pour adopter le texte (19 sur 50 au Sénat, 13 sur 213 à la Chambre). C’était initialement la volonté de Joe Biden – montrer qu’un consensus politique était encore possible aux Etats-Unis. Cela a finalement été la planche de salut du texte à la Chambre : six élus de l’aile gauche du parti démocrate, dont Alexandria Ocasio-Cortez, ont finalement refusé de voter le plan de dépenses, jugeant ne pas avoir assez d’assurances sur l’avenir du plan social et climatique négocié en parallèle.
Car Joe Biden n’en est qu’à mi-chemin de la réforme de fond qu’il veut mener dans le pays avant les élections de mi-mandat dans un an. Le plan social et climatique, lui, prévoit en vrac l’école gratuite dès trois ans, des aides à la garde d’enfant, des crédits d’impôts à l’achat de voitures électriques, et des hausses d’impôts sur les plus riches pour financer l’ensemble.
La Maison-Blanche, qui souhaiterait un vote la semaine du 15 novembre, a déjà divisé par deux l’enveloppe de dépenses prévue, à 1.750 milliards de dollars, pour espérer décrocher un accord entre modérés et progressistes. Le projet de plan fait désormais l’impasse sur le congé maternité payé, après avoir remis à plus tard la hausse du salaire minimum il y a quelques mois.
Aucune voix démocrate ne pourra faire défaut au Sénat et une petite poignée seulement à la Chambre, aucun soutien n’étant cette fois attendu côté républicain. Joe Biden est rompu aux négociations parlementaires, mais l’aile gauche et les centristes sont plus que jamais à couteaux tirés. « Je ne négocie pas en public, mais je suis confiant que nous voterons ce plan », a-t-il assuré samedi.
« Des emplois syndiqués »
Les démocrates espèrent capitaliser sur leur premier succès législatif pour démontrer leur capacité à agir et à améliorer les fondamentaux du modèle américain, à un an des élections législatives de mi-mandat. « Nous créons davantage d’emplois, des emplois syndiqués, qui ne peuvent pas être délocalisés », a mis en avant Joe Biden. Et ces postes « ne demanderont pas de diplôme universitaire », a-t-il précisé, s’adressant ainsi aux cols-bleus qu’il veut ramener dans le giron démocrate.
Le plan sur les infrastructures, qui doit soutenir la croissance, arrive dans une période de pénurie d’effectifs , et pourrait contribuer à tirer les salaires et les prix vers le haut. Les travaux s’étaleront toutefois sur près d’une décennie. Et si leur montant paraît gigantesque, ils sont à remettre en perspective avec la taille de l’économie américaine – un PIB proche de 21.000 milliards de dollars l’an dernier. Ils seront financés par des fonds non utilisés de la lutte contre le Covid et une série de mesures fiscales (notamment sur les cryptomonnaies). L’office budgétaire du Congrès, le CBO, prévoit tout de même un creusement du déficit budgétaire.
Véronique Le Billon (Bureau de New York)
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