Violence: The Poison of Political Debate in the US

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Un élu républicain ose parodier le meurtre d’une collègue démocrate, sans choquer la hiérarchie de son parti. Où est passée la notion de décence dans le débat politique?

Comment ne pas être pris de vertige par cette succession d’événements? Jugez plutôt. Cette semaine aux Etats-Unis, Steve Bannon, l’ex-conseiller de Trump, s’est rendu au FBI, refusant de coopérer avec la commission spéciale du Congrès, qui enquête sur l’attaque du Capitole du 6 janvier 2021, et promet «l’enfer» aux démocrates. Le lendemain, l’un des émeutiers, l’homme-chaman aux cornes de bison, écope de 41 mois de prison . Deux autres procès emblématiques font les gros titres, sur fond de racisme.

Un blâme officiel, si rare…

Mais ce n’est pas tout. Mercredi, la Chambre des représentants a infligé un blâme officiel, une procédure rare, à l’élu républicain Paul Gosar, fervent soutien de Trump et proche de l’extrême droite. Parce qu’il a tweeté une vidéo dans laquelle il se représente en train de décapiter l’élue démocrate progressiste Alexandria Ocasio-Cortez (AOC) et d’attaquer le président Biden avec un sabre. Il a surtout reçu le soutien de l’ensemble des républicains, sauf deux, déjà marginalisés.

Circulez, il n’y a rien à voir? On aurait tort de voir dans cette dernière affaire une simple blague de mauvais goût d’un élu polémiste. Révélatrice de l’extrême polarisation politique aux Etats-Unis, l’attitude de Gosar est problématique à plus d’un titre. En banalisant la violence en politique, ce dernier contribue à encourager la haine. Et il n’est pas le seul. Faut-il rappeler que l’élue Marjorie Taylor Greene, adepte de QAnon, estime que la speaker démocrate Nancy Pelosi mérite une «balle dans la tête»?

Où a passé la décence?

Bien sûr, il n’est pas étonnant que les esprits s’échauffent à un an des élections de mi-mandat, où les républicains espèrent reprendre la majorité au Congrès. Le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche ne s’apparente par ailleurs plus à un scénario totalement fictif. Mais l’attitude de la hiérarchie républicaine invite à réfléchir. Et donne un avant-goût des batailles à venir. Où est passée la notion de décence dans le débat politique? Mercredi, le leader de la minorité républicaine à la Chambre ne s’est pas offusqué de la représentation du meurtre d’une élue, mais bien de la sanction imposée par les démocrates, dénonçant un «abus de pouvoir».

Or, pour un élu du Congrès, parodier la décapitation d’AOC, c’est non seulement insulter l’institution et risquer d’encourager des actes de violences réels, comme ceux survenus un certain 6 janvier. C’est aussi porter un nouveau coup à la démocratie.

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