Madeleine Albright: Pioneer of Foreign Policy

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Le 5 décembre 1996, le président Bill Clinton écrit un chapitre de l’histoire des États-Unis en nommant Madeleine Korbel Albright à la tête du Département d’État. Après avoir été confirmée dans cette fonction par un vote unanime au Sénat, elle prête serment le 23 janvier 1997 et devient la 64e secrétaire d’État des États-Unis d’Amérique, la première femme à occuper ce poste.

Professeure et diplomate, Madeleine Albright (qui est décédée cette semaine, le 23 mars) s’est fortement inspirée de ses racines et a su, par son parcours exceptionnel, marquer son temps. Elle a dû faire face à un monde en pleine redéfinition, devant œuvrer à la construction d’un « nouvel ordre mondial » de l’après-guerre froide, concept évoqué par l’administration précédente, mais en mal de définition et de moyens pour l’opérationnaliser. Tout au long de son mandat, elle a sans cesse travaillé à promouvoir les valeurs de la démocratie, mais surtout, elle a brisé ce plafond de verre que l’histoire a trop souvent imposé aux femmes désireuses de contribuer à la construction du monde.

Donner leurs voix aux femmes

Dès les années 1980, à partir de son poste de professeure en Affaires internationales à l’Université Georgetown, elle s’affirme de façon tangible en faveur d’un rôle accru des femmes dans le monde de la politique étrangère. Elle prend alors la direction du Women in Foreign Service Program, destiné à faciliter l’accès des femmes à une carrière en administration internationale.

Comme secrétaire d’État, Madeleine Albright a poursuivi son travail pour faire une place de choix aux femmes dans l’administration gouvernementale américaine. À ce dernier égard, elle tient à ce que son entourage professionnel immédiat comporte une importante représentation féminine ; elle veut démontrer concrètement que, du poste de conseillère particulière à celui de secrétaire générale en passant par celui de conseillère au Département d’État, les femmes peuvent aspirer à une carrière au sein du gouvernement fédéral américain : les Krsitie Kenney, Wendy Sherman, Bonnie Cohen et Elaine Shocas ouvrent la voie.

Le président Clinton est sensible à cette dimension, puisqu’autour de la table du Cabinet, Madeleine Albright côtoie d’autres femmes à qui il a accordé sa confiance : Janet Reno comme procureure générale ; Donna Shalala, comme secrétaire à la Santé et aux Services sociaux ; Alexis Herman, comme secrétaire du Travail ; Carol Browner, comme administratrice de l’Agence pour la protection de l’environnement ; et Charlene Barshefsky, comme représentante au Commerce et négociatrice en chef pour les États-Unis d’Amérique.

Le tout a eu pour résultats que « l’appui du président à l’avancement des femmes en tant qu’objectif de politique étrangère a été bien accueilli dans les hauts lieux administratifs des affaires internationales », dira le biographe d’Albright, Thomas Lippman.

Travailler pour la démocratie

Pour Madeleine Albright, le développement économique et l’instauration d’une vie meilleure pour les femmes partout dans le monde passent également par la mise en place d’instances démocratiques. Tout autant que la cause des femmes, la défense de la démocratie l’anime. Ce thème devient donc un autre cheval de bataille, car Madeleine Albright croit profondément en son pouvoir de libération des peuples et en la capacité des États-Unis à favoriser son émergence partout dans le monde.

La préservation des intérêts et des valeurs des Américains, que sont la démocratie et le respect des droits de la personne, devient donc la carte maîtresse de toutes les interventions du Département d’État. Les moyens que Madeleine Albright utilise pour y parvenir dépendent des pays avec lesquels elle négocie. Mais en contrepartie, la secrétaire d’État cherchera à contribuer de façon constante au débat sur la démocratisation en politique étrangère. Pour certains, cela signifie favoriser l’émergence de la démocratie plus largement sur la planète. Pour d’autres, cela prend plutôt le sens d’ouvrir le processus de formulation de la politique étrangère à la population et d’abaisser les murs qui ferment traditionnellement ce milieu à la population en général. Madeleine Albright travaille aux deux aspects.

Ainsi, devant l’apathie populaire envers la politique étrangère, elle investit nombre d’heures avec plusieurs groupes de citoyens pour tenter d’expliquer en quoi les relations internationales américaines les concernent directement. Dès le début de son mandat, la secrétaire d’État se rend directement auprès des gens. Elle sillonne le territoire tout entier pour expliquer sa position quant à la menace qui plane toujours sur le pays et les éventuelles décisions que son administration entend mettre en œuvre pour y faire face.

Il en résulte des liens solides désormais tissés avec la population américaine. Madeleine Albright s’est donné comme objectif de recréer un consensus politique autour de buts cruciaux en matière de politique de sécurité, à une époque où la disparition d’un ennemi commun, le communisme, rendait difficile toute tentative en ce sens. Cette initiative a été caractérisée par le journaliste du Washington Post Michael Dobbs d’innovation que nul autre n’avait entreprise depuis Henry Kissinger.

Pour Madeleine Albright, la politique étrangère « consiste à avoir une influence sur les actions des pays dans une direction qui serve vos intérêts [certes, mais aussi qui] respecte vos valeurs », dira-t-elle dans ses mémoires. Force est de constater que son legs est plus riche que ce constat, pourtant déjà porteur de tout un programme.

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