Behind Nvidia, the Entire Electronics Industry Is Starting To Look Grim*

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Sur injonction de l’administration Biden, l’entreprise californienne de haute technologie ne pourra plus vendre à la Chine sa dernière puce, le modèle A100. Une manière de stopper l’avance de Pékin en matière d’intelligence artificielle, note Philippe Escande, éditorialiste économique au « Monde ».

Signe des temps, depuis vingt ans, le sommet de la technologie électronique n’est pas réservé aux avions de chasse et autres matériels de pointe de la défense, mais aussi aux joueurs de jeux vidéo, qui, souvent, mettent en scène ces mêmes armes de guerre. L’explication est simple : les jeux demandent des capacités de calcul considérables pour générer des images virtuelles au réalisme à couper le souffle. C’est ainsi que la société américaine Nvidia, grande spécialiste des cartes graphiques pour gameurs, est devenue, en deux décennies, la société électronique la plus chère du monde. Car le traitement d’images est dorénavant la pierre angulaire des systèmes d’intelligence artificielle.

La dernière puce de Nvidia, le modèle A100, contient 54 milliards de transistors sur un petit carré de la taille d’un ongle. Elle peut effectuer cinq millions de milliards d’opérations par seconde. Sortie en 2020, elle a équipé les superordinateurs du laboratoire américain du département de l’énergie, à Argonne (Illinois), puis, très rapidement, les systèmes de reconnaissance d’images en Chine.

Ce ne sera plus possible. La firme a annoncé, jeudi 1er septembre, que le gouvernement américain lui interdisait à présent de vendre le A100 aux Chinois, ainsi que ses autres modèles en cours de développement. L’administration Biden sait que Pékin est incapable de produire un composant aussi sophistiqué et ne le sera pas avant longtemps. Elle entend ainsi stopper l’avance chinoise en matière d’intelligence artificielle.

De la pénurie au trop-plein

Pour Nvidia, le coup est rude. La Chine représente le quart de ses ventes et, le 26 août, l’entreprise californienne avait déjà prévenu que ses résultats seraient affectés par la baisse du marché des PC. Derrière Nvidia, c’est toute la filière électronique qui commence à faire grise mine. Le géant Intel a annoncé des pertes sur son dernier trimestre.

Cela ne s’arrangera pas avec la multitude de nouvelles usines de fabrication de puces qui vont s’ouvrir dans les deux ans à venir aux Etats-Unis et en Europe, au nom de la souveraineté industrielle. De la pénurie au trop-plein. Comme les Européens s’en rendent compte avec le gaz russe, les sanctions économiques peuvent faire aussi mal à celui qui les inflige qu’à celui qui les subit.

Surtout quand elles touchent une filière aussi mondialisée. Nvidia a été créé en 1993 par l’Américano-Taïwanais Jen-Hsun Huang. Il fait produire ses puces à Taïwan, dans les usines de TSMC, lui aussi contraint de replier la toile en Chine. Entre surcapacités à venir et guerre économique, l’électronique mondiale se prépare des temps bien difficiles.

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