Referendum on Abortion and Cannabis: Will Florida Become a Swing State Again?

<--

PASSIONS AMÉRICAINES. Le 5 novembre, le même jour que la présidentielle, les électeurs du « Sunshine State » se prononceront sur l’IVG. Cette consultation, en mobilisant les défenseurs de ce droit, peut galvaniser le camp démocrate qui croit à présent à sa victoire.

Le 1er avril 2024, la Cour suprême de Floride a publié deux arrêts importants. Dans l’un, elle valide les lois de l’Etat limitant l’accès à l’avortement. Ce faisant, elle ouvre la voie à l’entrée en vigueur du texte, impulsé par le gouverneur Ron DeSantis, qui interdit l’interruption volontaire de grossesse (IVG) après six semaines de grossesse et qui fait de la Floride l’un des Etats fédérés les plus restrictifs en la matière. Une victoire significative pour les républicains, mais une victoire de courte durée.

Car dans l’autre arrêt, la même Cour suprême rend possible un référendum sur le sujet le 5 novembre, le même jour que l’élection présidentielle. Le travail de terrain, engagé depuis des mois par les associations féministes, a donc été payant. Il faudra 60 % de réponses favorables pour que le droit à l’avortement jusqu’à la viabilité du fœtus (ce qui, en gros, reprend l’arrêt « Roe » de la Cour suprême des Etats-Unis de 1973, rendu caduc par l’arrêt « Dobbs » en juin 2022) soit garanti dans la Constitution de la Floride. Dans le même arrêt, enfin, est actée, toujours pour le 5 novembre, la tenue d’un référendum sur la légalisation de la marijuana à usage récréatif.

Ces décisions sont très importantes pour la campagne présidentielle, jusqu’à faire potentiellement basculer le vote. En effet, elles pourraient fortement mobiliser un électorat féminin et jeune. Depuis « Dobbs », les référendums sur l’avortement ont, y compris dans les Etats conservateurs, donné raison aux défenseurs de ce droit. Si cela se confirme une nouvelle fois, qui, de Joe Biden ou de Donald Trump, cet électorat favorisera-t-il lors du (même) scrutin ? Rien n’est écrit, bien entendu, mais la perspective de ces deux référendums, qui peuvent galvaniser leurs adversaires, est une mauvaise nouvelle pour les républicains.

Les candidats conservateurs feront-ils campagne sur un message anti-avortement ? Ou choisiront-ils d’en parler le moins possible ? Le premier scénario serait une erreur stratégique et ils risquent de ne pas maîtriser le second tant les démocrates vont, eux, marteler le sujet à coups de clips et de storytellings soigneusement choisis. Donald Trump s’est exprimé, ce lundi 8 avril, pour défendre l’arrêt « Dobbs » et dire son opposition à une loi fédérale limitant l’avortement. Il sait que, même dans l’électorat républicain, on est aujourd’hui, dans des proportions inédites, favorable à ce droit.

Une liberté individuelle

Le Covid-19 est passé par là et, avec lui, les débats sur l’immixtion de l’Etat dans la vie privée et les libertés individuelles : en Floride, ils furent particulièrement houleux. Or la loi de DeSantis, précisément, en revenant sur ce droit, qui faisait de l’Etat un refuge pour les femmes dans le sud des Etats-Unis, a agrandi la brèche. Et si les hommes politiques remettent en cause ce droit, qui dit qu’ils ne reviendront pas sur d’autres à l’avenir ? Tel sera le message des démocrates destiné à l’électorat indépendant et républicain.

La Floride peut-elle redevenir un swing State, autrement dit être en mesure de repasser dans le camp démocrate ? Trump l’a emporté de 3 points sur Biden en 2020, mais De Santis a été réélu gouverneur avec 19 points d’écart en 2022. Des sièges au Sénat (celui de Rick Scott, par exemple, gagné de justesse en 2018) et à la Chambre des Représentants sont aussi en jeu. Or, de petits impacts à la marge, dans certains districts, peuvent suffire à faire basculer la majorité.

Les démocrates croient donc à leur victoire, qui donnerait les 30 grands électeurs du « Sunshine State » à Biden (trois fois plus que le Wisconsin et deux fois plus que le Michigan). Alors que l’Alabama monte le volume de la petite musique reconnaissant les embryons congelés comme des personnes et que la Cour suprême des Etats-Unis s’apprête à rendre sa décision sur la pilule abortive, la Maison-Blanche promet de son côté une loi fédérale garantissant l’accès à l’avortement sur tout le territoire et a publié, le 18 mars, un décret pour faire progresser la recherche et l’innovation dans le domaine de la santé des femmes. L’Etat fédéral vient également de faciliter l’accès à la fécondation in vitro pour ses fonctionnaires, grâce notamment à un remboursement des soins pouvant aller jusqu’à 25 000 dollars par an (23 000 euros).

Aux élections de mi-mandat de 2022, les candidats démocrates au Congrès et aux postes de gouverneur qui soutenaient le droit à l’avortement ont fait mieux que Joe Biden en 2020, notamment dans des Etats clés de l’Arizona, du Michigan, de la Pennsylvanie et du Wisconsin, dans un électorat très spécifique et convoité comme jamais : les femmes blanches diplômées du supérieur et vivant dans une banlieue résidentielle. Trump aimerait regagner des points auprès de ces électrices types. Le discours qu’il leur propose, jusqu’ici, est surtout sécuritaire et nationaliste : il dit vouloir les protéger des « migrants violeurs ». Son refus affiché d’aller plus loin que « Dobbs », alors qu’il en est un des artisans majeurs, peut-il les convaincre de (re) voter pour lui ?

About this publication