Election de Donald Trump : « Make America Small Again », une bonne nouvelle ?
Prenant acte de la fin de la prétention des Etats-Unis à régenter le monde, les Européens doivent maintenant se rapprocher de ce qu’on appelle le Sud Global et contribuer à l’édification d’un monde réellement multipolaire, estime le journaliste et éditorialiste Guillaume Duval.
« Ce sont les hommes qui font l’histoire, mais ils ne savent pas l’histoire qu’ils font », disait fort justement Karl Marx. Il est évidemment trop tôt pour saisir toutes les implications de la victoire de Donald Trump. Il paraît néanmoins très probable qu’une de ses principales conséquences sera, contrairement au slogan de campagne de Trump, de « make America small again », de mettre fin à la prétention impériale des Etats-Unis à régenter le monde. Une prétention qui s’était progressivement développée depuis 1918 pour culminer après 1989.
Malgré sa rhétorique de campagne, la victoire de Trump, c’est d’abord en effet la reconnaissance que les Etats-Unis n’ont plus les moyens de cette ambition impériale, que la société américaine est trop divisée et affaiblie, que les Américains eux-mêmes vont trop mal pour continuer à dépenser des mille et des cents en dehors des Etats-Unis afin de soutenir l’Ukraine et probablement demain défendre Israël ou Taïwan. Obama et Biden avaient déjà engagé ce mouvement en laissant tomber les Syriens et en abandonnant l’Irak et l’Afghanistan, mais Trump va probablement le parachever avec une politique plus radicalement isolationniste.
Les Américains peuvent se le permettre. Ils sont autonomes en gaz et en pétrole et n’ont que deux voisins immédiats : le Canada et le Mexique. D’une certaine façon c’est évidemment une bonne chose compte tenu des multiples c… que les Etats-Unis ont fait un peu partout dans le monde au nom de cet imperium (même si bien sûr nous devons aussi leur rester éternellement reconnaissants d’avoir par trois fois sauvé la démocratie en Europe au XXe siècle pendant les deux guerres mondiales et pendant la guerre froide). Sans parler aussi des dégâts considérables qu’a faits sur toute la planète l’extension du mode de vie et de consommation américain, du fait du soft power associé à cet imperium, en termes de pollution, de dégradation des relations sociales et de (mauvaise) santé publique.
La question centrale dans ce contexte est bien sûr celle de savoir qui va combler ce vide à l’avenir. S’il s’agit de la Chine dictatoriale de Xi Jinping, nous n’aurons évidemment pas vraiment gagné au change. Mais le pire n’est pas toujours sûr : la Chine de Xi Jinping, vieillissante, en crise économique et sociale profonde est probablement plus faible qu’elle n’en a l’air. Si ce qui succède à l’imperium américain est plutôt au contraire un monde durablement multipolaire sans hegemon clairement dominant, cela pourrait peut-être permettre de construire cette fois un véritable multilatéralisme où chacun pourrait trouver sa place. Et c’est à cela que les Européens doivent travailler maintenant. Mais cela implique de faire de gros efforts pour nous rapprocher de ce qu’on appelle le Sud Global. Alors que la politique européenne en matière de migration comme le soutien apporté au régime de Netanyahou ont au contraire dressé ces pays contre nous toutes ces dernières années.
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