Trump et la destruction du droit international
La pluie de décrets signés et les menaces proférées par le nouveau président des États-Unis dès son investiture (contre l’Afrique du Sud, le Canada, le Danemark-Groenland, le Mexique ainsi que la déportation massive des migrants et des Palestiniens de Gaza) ont accablé le monde entier. En effet, nombre de ces décrets font fi du droit international et par conséquent de la coopération internationale.
Certes, les gouvernements successifs des États-Unis se sont bien souvent arrangés pour ne pas respecter les normes internationales lorsqu’ils les considéraient comme des obstacles à leurs propres intérêts: interventions militaires en Serbie-Kosovo (1999), Afghanistan (2001) et en Irak (2003), sans mandat de l’ONU, retrait de l’Unesco (1984 et 2017) et du Conseil des droits de l’homme (2007 et 2018), entre autres. Cependant, l’ampleur des attaques du nouveau gouvernement états-unien est inédite dans sa détermination de vouloir, semble-t-il, détruire le système multilatéral.
En tant qu’observateur privilégié de l’ONU et des relations internationales avec son statut auprès de cette institution depuis quarante-cinq ans, le Cetim s’interrogeait déjà dans un livre publié il y a vingt ans sur les menaces de liquidation qui pesaient sur elle. Y sommes-nous?
Concurrencés par la Chine et d’autres pays «émergents» sur le plan économique, les États-Unis ont pour principale motivation de maintenir leur domination coûte que coûte, tout en se posant comme défenseurs des sociétés transnationales. Cette attitude a d’ailleurs été saluée par les grands patrons européens mondialisés, habitués à mettre en concurrence les États pour avoir de moins en moins de contraintes légales possibles à leurs profits. En réalité, il s’agit d’une fuite en avant qui ne fera qu’exacerber les conflits, surtout des guerres de plus en plus destructrices, voire une guerre nucléaire.
En effet, la marchandisation du monde par des intérêts privés, avec l’exploitation des travailleurs et des ressources naturelles à bon marché, se fait avec des armes et par l’imposition de mesures coercitives, impliquant des «guerres permanentes», voire «préventives», comme les ont inventées les États-Unis. D’ailleurs, ces derniers, avec leurs alliés membres de l’OTAN, arrivent en tête avec presque deux tiers des dépenses en armement au niveau mondial. L’asservissement des peuples est à ce prix.
Dans ce contexte, l’existence même de l’ONU, et a fortiori de la Genève internationale, est compromise, si les autres États, en particulier la Suisse, restent les bras croisés.
Un rempart
Le Cetim a toujours défendu le système multilatéral incarné par l’ONU et s’est fortement engagé en son sein, tout en encourageant les mouvements sociaux de l’investir, comme en témoigne l’adoption en 2018 de la Déclaration sur les droits des paysans par l’Assemblée générale de l’ONU. Malgré ses lacunes, l’ONU constitue un rempart face à l’arbitraire du plus fort pour la protection de plus faibles. À ce titre, elle a contribué entre autres à la décolonisation et s’est engagée fortement pour l’abolition du régime d’apartheid en Afrique du Sud. Ses mécanismes sont indispensables pour l’élaboration de normes internationales et la protection de droits humains afin d’assurer le vivre-ensemble, l’accès à la justice des victimes de violations, mais aussi la promotion de la démocratie et le développement solidaire. Il est dans l’intérêt de la majorité des États, y compris la Suisse, de défendre le multilatéralisme.
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