And what if the prisons were emptied? In these times of budget austerity, American leaders have imagination. Until now, prison overcrowding only bothered the editorialists of the New York Times and organizations that defend minorities. And now the idea is gaining ground: from Kansas to California, the state penal administrations are vying to outdo each other with initiatives to relieve the prisons. One wonders if this is really the moment to put detainees back on the streets, which are covered by fewer policemen due to cuts in the budgets of local communities, but this is the way it is. With the help of the crisis, even partisans of the all-repressive are coming to think differently.
The United States has a ways to go. The country, it must be remembered, is the champion of the world in incarceration. It even outstrips China, which is four times more populous. With less than 5 percent of the world population, America counts nearly a quarter of the planet’s prisoners. Since 2008 the growth has stopped, but currently there are still 2.3 million under lock and key, or 1 adult in 100 (as opposed to 1.5 million prisoners in China). If we add individuals who are free on probation or parole, the number reaches 7.3 million, or 1 adult in 31. According to the Pew Center on the States, an independent organization that analyses politics in the 50 states, 1 in 9 African-Americans, age 20 to 34, is in prison. And 109 minors are serving a life sentence, without possibility of reduction, even though their crime did not lead to a human death: a situation without equivalent in developed countries. Seventy-seven among them are in Florida.
In thirty years, the prison population has tripled, due to infractions of drug laws. Specialists do not agree on the effects of these measures. But it would be difficult not to mention that the United States has seen a spectacular drop in criminality. In cities like New York, Dallas, Los Angeles, it is at its lowest level in forty years.
But today incarceration costs too much. Forty-three states are in debt, and the prisons are their second greatest expense, after Medicaid, the health insurance for the poor. Far above education. For the governor of California, Arnold Schwarzenegger, a system that devotes 45 percent more to prisons than to universities, “is turned on its head.” Last week, he proposed to prohibit such a disproportion through constitutional amendment. California is one state where detainees have made a collective complaint against overcrowding. The justice system has supported them. It ruled that the governor must reduce the number of detainees by 40,000 in two years (but it was appealed to the Supreme Court).
Forced to eliminate school bus service or to close the library to pay the prison bill, elected officials have attacked operation costs. The majority of states have already eliminated guard posts or drastically cut their salaries. Some have limited the number of medical and dental visits given to detainees. Georgia has reduced the number of meals (but the number of calories remains the same, it has asserted!). Four states have completely closed facilities, like Colorado or Michigan, where the prison population has already shrunk by 8 percent in 18 months.
In the longer term, the states are also revisiting their penal policy. Several of them have replaced sentences for violation of parole with public service. Kansas has put in place a system of points for good behavior, which convert to days of reduction in sentence. Others impose rehabilitation to substitute prison for drug use. Nothing very original, but a new idea in the country of "three strikes and you’re out.”
To reduce the prison population, there is still one infallible solution: free the innocents. In this respect, the American justice system is not failing. Thanks to DNA tests, 249 detainees determined to be not guilty have been released since 1989. In December, James Bain, 54 years old, left his cell after thirty-five years of prison, which, to date, makes him the record-holder, if you can call it that, for judicial error. He was sentenced in 1974 for life for the rape of a 9 year old child. Thanks to a compensation law voted in Florida (50,000 dollars for year of incarceration), he should receive 1.75 million dollars. The same week, Donald E. Gates, imprisoned in Arizona, was found innocent after twenty-eight years behind bars. He had also been sentenced based on dubious testimony. He took the Greyhound to Washington, with a ticket given by the government, winter clothing and a fortune of 75 dollars.
Contre le déficit, vidons les prisons, par Corine Lesnes
LE MONDE | 13.01.10 | 13h42
Et si on vidait les prisons ? Par ces temps d'austérité budgétaire, les responsables américains ont de l'imagination. Jusqu'ici, la surpopulation carcérale ne dérangeait que les éditorialistes du New York Times et les associations de défense des minorités. Voilà que l'idée fait son chemin : du Kansas à la Californie, les administrations pénales des Etats rivalisent d'initiatives pour désengorger les prisons. On pourrait se demander si c'est bien le moment de remettre les détenus dans les rues, parcourues de moins de policiers du fait des coupes dans les budgets des collectivités locales, mais c'est ainsi. La crise aidant, même les partisans du tout-répressif en viennent à réfléchir autrement.
Les Etats-Unis ont du chemin à faire. Le pays, faut-il le rappeler, est le champion du monde de l'incarcération. Il devance même la Chine, qui est quatre fois plus peuplée. Avec moins de 5 % de la population mondiale, l'Amérique compte presque un quart des prisonniers de la planète. Depuis 2008, l'accroissement a cessé, mais actuellement, ils sont encore 2,3 millions sous les verrous, soit 1 adulte sur 100 (contre 1,5 million de prisonniers en Chine). Si on ajoute les individus qui sont en liberté surveillée ou conditionnelle, le nombre atteint 7,3 millions, soit 1 adulte sur 31. Selon le Pew Center on the States, un organisme indépendant qui analyse les politiques des 50 Etats, un Noir sur 9, âgé de 20 à 34 ans, est en prison. Et 109 mineurs purgent une peine de prison à vie, incompressible, bien que leur crime n'ait pas entraîné mort d'homme : une situation sans équivalent dans les pays développés. 77 d'entre eux se trouvent en Floride.
La surpopulation carcérale s'explique par la politique pénale qui a suivi la vague de crime et l'épidémie de crack des années 1980. Par le fait de condamnations automatiques, les juges ont frappé sans distinction les simples toxicomanes et les trafiquants de drogue. De nouvelles lois ont imposé des peines sévères à la troisième infraction (selon le principe dit de "3 strikes out" hérité du base-ball).
En trente ans, la population des prisons a triplé, sous l'effet des infractions à la législation sur les stupéfiants. Les spécialistes ne sont pas d'accord sur les effets de ces mesures. Mais il serait difficile de ne pas mentionner que les Etats-Unis ont connu une baisse spectaculaire de la criminalité. Dans des villes comme New York, Dallas, Los Angeles, elle est au plus bas depuis quarante ans.
Mais aujourd'hui l'incarcération coûte trop cher. 43 Etats sont en déficit, et les prisons représentent leur deuxième poste de dépenses, après Medicaid, l'assurance-santé pour les pauvres. Loin devant l'éducation. Pour le gouverneur de Californie, Arnold Schwarzenegger, un système qui consacre aux prisons 45 % de plus qu'aux universités "marche sur la tête". La semaine dernière, il a proposé d'interdire pareille disproportion par voie d'amendement constitutionnel. La Californie est un Etat où les détenus ont déposé une plainte en nom collectif contre la surpopulation. La justice leur a donné raison. Elle a condamné le gouverneur à réduire de 40 000 le nombre de détenus en deux ans (mais il en a appelé à la Cour suprême).
Contraints d'éliminer les services de bus scolaire ou de fermer la bibliothèque pour payer la note des prisons, les élus se sont attaqués aux coûts de fonctionnement. La plupart des Etats ont déjà supprimé des postes de gardien ou amputé leurs salaires. Certains ont limité le nombre de visites médicales et de dentiste fournies aux détenus. La Géorgie a réduit le nombre de repas (mais le nombre de calories reste le même, a-t-elle assuré !). Quatre Etats ont carrément fermé des établissements, comme le Colorado ou le Michigan, où la population carcérale a déjà diminué de 8 % en dix-huit mois.
A plus long terme, les Etats revoient aussi leur politique pénale. Plusieurs d'entre eux ont remplacé les peines pour violation du régime de liberté conditionnelle par des travaux d'intérêt général. Le Kansas a mis en place un système de points pour bonne conduite, à convertir en jours de réduction de peine. D'autres imposent des cures de désintoxication pour se substituer à la prison pour usage de drogue. Rien de très original, mais une pensée nouvelle au pays du "3 strikes out".
Pour réduire la population carcérale, il existe encore une solution infaillible : libérer les innocents. A cet égard, la justice américaine ne faiblit pas. Grâce aux tests ADN, 249 détenus jugés non coupables ont été remis en liberté depuis 1989. En décembre, James Bain, 54 ans, a quitté sa cellule après tente-cinq ans de prison, ce qui, à ce jour, fait de lui le recordman, si l'on peut dire, de l'erreur judiciaire. Il avait été condamné en 1974 à la perpétuité pour le viol d'un enfant de 9 ans. Grâce à une loi d'indemnisation votée en Floride (50 000 dollars par année d'incarcération), il devrait toucher 1,75 million de dollars. La même semaine, Donald E. Gates, détenu dans l'Arizona, a été reconnu innocent après vingt-huit ans derrière les barreaux. Lui aussi avait été condamné sur un témoignage douteux. Il a pris le Greyhound pour Washington, avec un billet offert par le gouvernement, des vêtements d'hiver et un pactole de 75 dollars.
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