When will the foolishness that is racism and profiling be neither legal nor illegal, but simply impossible? When will we live in a society where these ideas, finally dead, will only be known, along with other ancient beliefs, to be studied in university departments?
The world could find nothing better to make of this militant for black rights, who was in fact a white woman, than a big deal. What a joke — Rachel Dolezal is white, and thought she was a black militant! Of course, this singular case was classified as a societal phenomenon. Seen in this light, this incredible story would be a perfect illustration of a leftist ideology that leads to identifying, to the point of such mimicry, with the plight of the most unfortunate. Altogether it is a bit like “The Human Stain,” the novel by Philip Roth, but with the plot turned inside out.
Do you know of other similar cases? Perhaps that of Louis Wolfson, an American who once lived in Quebec, who tried furiously to forget his language, English, by converting the words that floated up in his consciousness into syllables from foreign languages. But that was quite unique. Cases of racist killers, like that of Charleston or the island of Utoya, are more common.
In Montreal, the Tribunal of Human Rights just fined “a black woman” for having “publicly humiliated a woman of Egyptian origin.” And of course, some blowhards disguised as public thinkers immediately took the opportunity to argue that racism is therefore not only a problem amongst white people. But what does this story really tell us about the social reality of entire communities? To everyone’s confusion, in the end we understand nothing.
Does it suffice to say that we are all German Jews, as the old slogans suggests? I doubt it. We can support, care, and show empathy. We can put ourselves in another’s place and some even take themselves for others, but we can never be the Other.
Have you ever tried being black to see? Native American? French Canadian in a country with black sand? Muslim in this time of paranoia? We do not slide into the Other’s skin the way we want to. But understanding the social injuries caused by racism and profiling should make us get past the stage of our voluntary blindness.
We continue today in countless news bulletins to feel obliged to state the skin color or religion of certain individuals, as if that must be one of the elements useful in comprehending events. If you say for example that a man from Laval stole a car, it is not the same thing as saying that a black person stole this car. The statement that the thief is black resounds as to suggest worry, even though no matter what, the insurance claim for the stolen car will be the same.
Take the case of the First Nations. The ethnologist Isabelle Picard, member of the Huron-Wendat Nation, was thirteen years old at the time of the Oka crisis. She told me that she began to feel expressions of racism immediately after this crisis to which she had no connection. “Since then I’ve been constantly hearing curious comments on my origins.”
The day she bought a house in Montreal, the proprietor thought she was Italian. “When I explained to her that I was a native, she responded, “It would be better not to tell the neighbors that.” Someone has seriously asked me if I had the same menstrual cycle as humans or animals. And several times, I have been asked at what age feathers grow out of our heads.”
In a detailed analysis that they just released, The League for the Rights and Liberation of Peoples shows that the Montreal police have broken up nearly all student and anti-capitalist protests. The police force does this by using methods that are practically never used for other types of protests that, for example, don’t provide any more of an itinerary. Since 2011, there have been 7,000 arrests.
“We aren’t profiling, but we make selections based on the type of people who are going to do this sort of protesting,” explains Anie Samson, vice-president of the Executive Council in charge of public security, at a meeting of the municipal council on June 15. You read right: the Montreal police, according to the person in charge, wouldn’t carry out any profiling, but rather a “selection” in “the name of common sense.” What a pretty synonym.
“There is a certain ordinary racism that is defended by common sense,” replied council member François Limoges. “In certain cities in the southern United States, a white policeman will tell you, “everyone knows: it is such and such ethnic group that commits misdemeanors; it’s common sense.” And Mayor Coderre stood to say that it was inappropriate — in the name of the precision of the French language, no less — to mix apples and oranges. Yet it would be so much better to taste a world in which several fruits were no longer seen as stones.
Quand donc ces bêtises que sont le racisme et le profilage seront-elles ni légales ni illégales, mais tout bonnement impossibles ? Quand vivrons-nous dans une société où ces idées enfin mortes ne seront plus connues, avec d’autres croyances anciennes, que pour être étudiées dans des facultés d’universités ?
De cette militante des droits des Noirs qui était en fait une Blanche, le monde n’aura finalement trouvé rien de mieux à faire que des gorges chaudes. Quelle bonne blague : Rachel Dolezal était blanche et se prenait pour une militante noire ! Il s’en est trouvé, bien sûr, pour classer ce cas singulier à titre de phénomène de société : cette histoire abracadabrante serait dans cette perspective l’illustration parfaite d’une idéologie de gauche qui mène à s’identifier, jusque dans pareil mimétisme, au sort des plus malheureux. En somme, un peu comme La tache, le roman de Philip Roth, mais dont on aurait retourné la trame comme un gant.
Vous connaissez d’autres cas semblables ? On pourrait penser, peut-être, à celui de Louis Wolfson, un Américain qui vécut un temps au Québec, essayant furieusement d’oublier sa langue, l’anglais, en convertissant les mots qui affleuraient à sa conscience en des syllabes de langues étrangères. Mais c’est assez unique. L’est moins le cas de tueurs racistes, comme celui de Charleston ou de l’île d’Utoya.
À Montréal, le Tribunal des droits de la personne vient de condamner à une amende « une femme noire » pour avoir « humilié en public une femme d’origine égyptienne ». Et il s’est trouvé tout de suite, comme de raison, quelques fanfarons déguisés en penseurs publics pour plaider que le racisme n’est donc pas uniquement l’affaire des Blancs. Mais que nous dit en fait cette histoire sur la réalité sociale de communautés entières ? À tout confondre, on finit par ne rien comprendre.
Suffit-il de se dire que nous sommes tous des Juifs allemands, comme le suggéraient les vieux slogans ? J’en doute. On peut appuyer, soutenir, faire preuve d’empathie, on peut se mettre à la place de l’autre, certains se prennent même pour d’autres, mais on ne peut jamais être l’Autre.
Avez-vous déjà essayé d’être noir pour voir ? Amérindien ? Canadien français au pays des sables bitumineux ? Musulman en ces temps de paranoïa ? On ne se glisse pas comme on veut dans la peau de l’Autre. Mais comprendre les blessures sociales que causent le racisme et le profilage devrait tout de même nous faire dépasser le stade de notre aveuglement volontaire.
On continue aujourd’hui, dans bien des bulletins de nouvelles, à se sentir obligé de préciser la couleur de la peau ou la religion de certains individus, comme si cela constituait forcément des éléments utiles à la compréhension d’événements. Si vous dites par exemple qu’un homme de Laval a volé une voiture, ce n’est pas la même chose que de dire qu’un Noir a volé cette voiture. De préciser que le voleur est noir redouble pour ainsi dire l’inquiétude alors que les assurances verseront, quoi qu’il arrive, la même somme pour la voiture dérobée…
Prenez le cas des Premières Nations. L’ethnologue Isabelle Picard, membre de la nation huronne-wendat, avait 13 ans au moment de la crise d’Oka. Elle me racontait que l’expression du racisme s’était fait sentir pour elle à partir de cette crise à laquelle elle n’était pourtant pas liée. « Je n’ai jamais arrêté depuis d’entendre de curieux commentaires sur mes origines. »
Le jour où elle achète une maison à Montréal, la propriétaire croit qu’elle est italienne. « Quand je lui ai expliqué que j’étais autochtone, elle m’a répondu : “c’est mieux de pas le dire aux voisins”. On m’a déjà demandé très sérieusement si, pour mes menstruations, j’avais le même cycle que les humains ou les animaux. Et plusieurs fois, on m’a demandé à quel âge les plumes nous poussaient sur la tête. »
Dans une analyse détaillée qu’elle vient de produire, la Ligue des droits et libertés démontre que la police de Montréal a démantelé la quasi-totalité des manifestations d’étudiants ou d’anticapitalistes. Elle le fait selon des modalités qui ne sont pourtant pratiquement jamais utilisées pour d’autres types de manifestations qui, par exemple, ne fournissent pas davantage d’itinéraire. Depuis 2011, il y aurait eu 7000 arrestations.
« On ne fait pas du profilage, mais on fait de la sélection sur le type de gens qui vont faire cette manifestation », explique Anie Samson, vice-présidente du Conseil exécutif, responsable de la sécurité publique, à l’occasion d’une séance du conseil municipal le 15 juin. Vous avez bien lu : la police de Montréal, selon sa responsable, ne ferait aucun profilage, mais plutôt une « sélection », au « nom du gros bon sens ». Un joli synonyme quoi.
« Il y a un certain racisme ordinaire qui est défendu par le gros bon sens », a répliqué le conseiller François Limoge. « Dans certaines villes du sud des États-Unis, un policier blanc va vous dire “on le sait ben : c’est tel groupe ethnique qui commet les méfaits ; c’est du gros bon sens”. » Et le maire Coderre de se lever pour dire qu’il ne convient pas — au nom de la précision de la langue française, rien de moins — de mélanger les pommes avec les oranges. On voudrait pourtant bien finir par goûter à un monde dont plusieurs fruits ne seraient pas toujours perçus comme des noyaux.
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