How Mass Shootings Serve Political Polarization

Published in Le Devoir
(Canada) on 14 August 2019
by Antoine Ross Trempe (link to originallink to original)
Translated from by Laura Napoli. Edited by Helaine Schweitzer.
The recent mass shootings in the United States have once again resurrected the endless political wars among rival clans. The left despairs that the right points to mental illness as the sole explanation for these attacks. The right flinches at any sociopolitical explanation, like systemic racism or radicalization. It is disheartening to see that these tragedies, instead of prompting serious reflection, give way to this childishness and to a war of insults where the goal is not to understand, but to score points.

The problem is that politics and the search for the truth are antithetical. This conflict between political rhetoric and the quest for truth has been known to philosophers since Plato. From this perspective, we can better understand that the noises that come from politicians’ mouths are not for the purpose of analyzing the situation or getting to the root causes, but to please a militant base with rich donors and, in brief, to score emotional goals in the political arena. When Donald Trump and his acolytes say that the shootings are the work of “deranged” or “crazy” individuals, they are not making a diagnosis. They are performing a political maneuver to avoid talking about two subjects that would disserve the current occupant of the White House: gun control and Trump’s responsibility for rising racial tensions in the United States.

Meanwhile, on the left, we see people writing that any psychological explanation is automatically a sign of membership in the “populist right.” We still don’t know the precise motivations of the shooters in El Paso and Dayton, but we know that radicalization is likely at work in at least one of these instances. What we call ideological radicalization is a psychological phenomenon worthy of our interest and a perfectly legitimate object of study. To say that there is no psychological explanation is simply absurd. But radicalization is a complex phenomenon that doesn’t necessarily implicate a mental health diagnosis, as defined by modern psychiatry.

We know, for example, that people who join white supremacist groups or religious sectarian groups are deeply transformed by these experiences. It is called reprogramming: neo-Nazi (or religious) ideology disrupts a person’s values by reconfiguring his relationships with others, with authority, with his notions of justice and injustice, his place in the world and his identity, etc. These new programs thus act like malware, or anti-programs, that short-circuit new followers’ “normal” programs. This is why it is easier to convert children or adolescents, and why cults tend to uproot and isolate their followers, so that they will only be tapping into the ideology’s sole narrative framework. This isolation can be physical, but today it is also virtual: While Jim Jones chose Guyana in the 1970s for his cult, ideologues today choose 8chan and the closed vessel of the darknet.

The causes of this radicalization and the reasons why some people are more vulnerable to them than others remain numerous and complex: a sense of inferiority, of injustice before a world that they no longer understand, an inability to project oneself in time, self-hatred, professional or romantic resentment and depression, etc. Violent ideology thus furnishes all the answers and identifies all the culprits in order to turn self-hatred into hatred of the other. Add to that the absolutely criminal access to firearms, and it’s only a matter of time before the irreparable act recurs.

The recent rise in mass shootings is also strongly correlated with new technologies that act as a megaphone for ideologically vulnerable people. We can only applaud the decision by several media outlets to no longer name the shooters and to no longer speak of their modus operandi or their personal history. While we wait for better gun control and the closing of darknet recruiting channels, this is the best prophylaxis for removing one of the main incentives for these acts: the act of dying and recording one’s name in the big, bloody book of infamy.

We can only hope that in these times of crisis, the cacophony of declarations of allegiance and score settling provoked by those who make petty politics their livelihood will not bury true reflection on the causes of this crisis and its resolution.



Comment les tueries de masse servent la polarisation politique

Les récentes tueries de masse aux États-Unis ont de nouveau fait ressurgir les interminables guéguerres politiques entre clans rivaux. À gauche, on se désespère que la droite pointe la maladie mentale comme unique cause explicative de ces attaques. À droite, on sourcille devant toute explication sociopolitique, comme le racisme systémique ou la radicalisation. Il est désolant de voir que ces tragédies, au lieu de susciter une réflexion sérieuse, donnent lieu à ces enfantillages et à une guerre d’insultes dont le but est non pas de comprendre, mais de marquer des points.
Le problème, c’est que la politique et la recherche de la vérité sont antinomiques. Cette opposition entre la rhétorique politique et la quête de la vérité est connue des philosophes depuis Platon. À partir de cet éclairage, on comprend mieux que les bruits qui sortent de la bouche des politiciens n’ont pas pour objectif d’analyser la situation ou de relever les causes profondes, mais de plaire à une base militante ou aux riches donateurs et, bref, de compter des buts émotifs dans l’arène politique. Quand Donald Trump et ses acolytes disent que les tueries sont l’oeuvre d’individus « dérangés » ou « fous », il ne s’agit pas d’un diagnostic. Il s’agit d’une manoeuvre politique pour éviter de parler des deux sujets qui desserviraient l’actuel locataire de la Maison-Blanche : le contrôle des armes et sa responsabilité dans la montée des tensions raciales aux États-Unis.
Pendant ce temps, à gauche, on voit des gens écrire que toute explication psychologique est automatiquement un signe d’appartenance à la « droite populiste ». On ne connaît pas encore les motivations précises des tueurs d’El Paso et de Dayton, mais on sait que la radicalisation est vraisemblablement en cause dans au moins l’un des cas. Ce qu’on appelle la radicalisation idéologique est un phénomène psychologique digne d’intérêt et un objet d’étude parfaitement légitime ; de dire qu’il n’y a aucune explication psychologique est simplement absurde. Mais la radicalisation est un phénomène complexe qui n’implique pas nécessairement un diagnostic de santé mentale, tel que défini par la psychiatrie moderne.
On sait, par exemple, que les gens qui adhèrent à des groupes de suprémacistes blancs ou des groupes sectaires religieux sont transformés en profondeur par ces expériences. On parle de reprogrammation : l’idéologie néonazie (ou religieuse) vient chambouler les valeurs de la personne en reconfigurant son rapport aux autres, à l’autorité, son sentiment de justice et d’injustice, sa place dans le monde, son identité, etc. Ces nouveaux programmes agissent ainsi comme des malwares — ou antiprogrammes — qui court-circuitent les programmes « normaux » des nouveaux adeptes. Voilà pourquoi il est plus facile de convertir les enfants ou les adolescents et pourquoi les groupes sectaires ont tendance à déraciner et à isoler les adeptes : pour que ceux-ci ne soient en contact qu’avec la seule trame narrative de l’idéologie. Cet isolement peut être physique, mais il est aujourd’hui aussi virtuel : alors que Jim Jones avait choisi le Guyana dans les années 1970 pour installer sa secte, les idéologues d’aujourd’hui choisissent 8chan et le vase clos du Dark Web.
Les causes de ces radicalisations et les raisons expliquant que certaines personnes y sont plus vulnérables demeurent multiples et complexes : sentiment d’infériorité, d’injustice devant un monde qu’on ne comprend plus, incapacité de se projeter dans le temps, haine de soi, ressentiment professionnel ou amoureux, dépression, etc. L’idéologie violente vient alors fournir toutes les « réponses » et identifier tous les « coupables » pour transmuer la haine de soi-même en haine de l’autre. Ajoutons à cela l’accessibilité — absolument criminelle — aux armes à feu, et ce n’est qu’une question de temps avant que l’irréparable se reproduise.
L’augmentation récente des tueries de masse est aussi fortement corrélée avec les nouvelles technologies qui agissent comme un mégaphone pour des gens idéologiquement vulnérables. On ne peut qu’applaudir la décision de plusieurs médias de ne plus nommer les tueurs, de ne plus parler de leur modus operandi ni de leur histoire personnelle. En attendant un meilleur contrôle des armes à feu et la fermeture des canaux de recrutement du Dark Web, c’est la meilleure prophylaxie pour retirer l’un des principaux incitatifs de ces passages à l’acte : celui de mourir célèbre en inscrivant son nom dans le grand livre sanglant de l’infamie.
Il ne reste plus qu’à espérer qu’en ces temps de crise, une véritable réflexion sur les causes et les solutions ne sera pas, une fois encore, enterrée par la cacophonie des déclarations d’allégeance et des règlements de compte provoquée par ceux qui font de la petite politique leur gagne-pain.
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