The America Bernie Sanders Revealed Will Not Go Away

Published in Le Devoir
(Canada) on 27 April 2020
by Philippe Fournier (link to originallink to original)
Translated from by Laura Napoli. Edited by Laurence Bouvard.
Bernie Sanders quit the presidential race on April 8 before formally endorsing the leading candidate, Joe Biden, a few days later. Several commentators in the mainstream U.S. media, and on a much smaller scale in Quebec, have criticized Sanders for staying in the race too long, whether out of pride or self-deception. They also exaggerated his popularity, his influence and the influence of his supporters. Along with the Democratic Party establishment, they all sided with a candidate deemed safer and less radical.

Rather than listing the strategical errors or weaknesses of candidate Sanders, it is more interesting to inquire into what brought him to the forefront of the American political scene over the course of the last five years. We don’t stress nearly enough the extraordinary nature of his breakthrough into the bastion of capitalism. The idea that a socialist, or, more correctly, a social democrat, could aspire to the presidency of the United States is unprecedented in the history of the country, with the possible exception of Democratic candidate George McGovern in 1972.

Fundamentally, the emergence of “Bernie” is the expression of a dull anger, of an impatience increasingly shown toward half-measures and abstract principles unaccompanied by real substance, such as binding measures that would force a more equitable division of resources without regard to socioeconomic class, race or gender.

It also speaks to exasperation with a permanent political class that is draped in the virtues of bipartisan compromise and civility, but which, like Bill Clinton, has gutted social programs, eliminated important parts of financial regulation, and encouraged mass incarceration; or, as Barack Obama did, has favored mass deportations, ordered drone attacks, and bailed out the large financial institutions that caused the 2008 crisis; or even, as Biden did, voted for the invasion of a foreign country, Iraq, for false reasons.

This is the soft and porous center of American politics that has defined the limits of political imagination since the 1990s. It’s precisely the realism, pragmatism and moderation that will be at the center of the return to normal Biden is proposing. After four years of Trump, this program looks like real deliverance. But there is a real risk that the tensions and the discontent that propelled Sanders onto the national scene will remain.

A Passionate Outcry

Indeed, his emergence is also a passionate outcry from a significant part of the population. A large majority of young people (those 40 and younger) voted for Sanders. Some would say that it was trendy to do so, but it would be fairer to say that the support of young people stems from the fact that they are heavily in debt after their studies, have little or assets or real estate, have limited job prospects, are often overqualified and underpaid for the jobs they do hold, and are facing an unprecedented climate crisis. This young generation, part of which engineered an unprecedented ground-up mobilization, joins millions of other forgotten Americans, who struggle to pay their bills even while holding multiple jobs.

In his speeches, Sanders liked to repeat that the three wealthiest people in the United States have more money than half the population, that millions of Americans do not have health insurance, that 500,000 Americans have declared bankruptcy due to excessive medical bills, and that more than 500,000 Americans sleep in the streets each night. Regardless of who was bragging about the health of the American economy prior to the coronavirus crisis, these numbers were accurate, and the dissatisfaction of many Americans with their economic and financial situation remains palpable.

Special Interests

If the level of obscene inequality was not a sufficient reason, numerous laws passed by Congress have been written by lobbyists for banks, oil companies and other special interests for decades. This stranglehold of special interests over the government has no equivalent in Western democracies. In this context, we can excuse some Sanders supporters for being a little more forceful and uncompromising.

The vast majority of Sanders supporters will vote for Biden in November, but will not do so with a cheerful heart. Now that the coronavirus is wreaking havoc on the United States and making the appeal to create a universal health care system more attractive, it remains to be seen whether Biden will yield more ground to the party’s left wing, with Sanders and another former Democratic presidential candidate, Elizabeth Warren, at his side.

The hope for a more united world, for a resurgent welfare state within a more equitable and coordinated global economic system, depends in large part on the destiny of the United States, which has led a globalization effort focused on the reduction of production and supply costs, securitization, the flow of capital, and the extreme valuation of shareholders and private enterprise.



L’Amérique révélée par Bernie Sanders ne disparaîtra pas

Bernie Sanders a quitté la course à l’investiture démocrate le 8 avril avant d’appuyer formellement le candidat de tête, Joe Biden, quelques jours plus tard. Plusieurs commentateurs dans les grands médias américains, et à plus petite échelle au Québec, ont reproché à Sanders de s’être accroché trop longtemps, soit par orgueil ou par aveuglement. On aurait aussi exagéré sa popularité, son influence et celle de ses partisans. En phase avec l’establishment du Parti démocrate, on s’est rangé du côté d’un candidat jugé plus sûr et moins radical.

Plutôt que de répertorier les erreurs stratégiques et les faiblesses du candidat Sanders, il est plus intéressant de se questionner sur ce qui l’a porté au-devant de la scène politique américaine au cours des cinq dernières années. On ne soulignera jamais assez le caractère extraordinaire de sa percée dans le bastion du capitalisme. L’idée qu’un socialiste, ou plus justement un social-démocrate, puisse aspirer à la présidence des États-Unis est inédite dans l’histoire du pays, à l’exception peut-être du candidat démocrate George McGovern en 1972.

Au fond, l’émergence de « Bernie » est l’expression d’une colère sourde, d’une impatience de plus en plus marquée envers des demi-mesures et des principes abstraits qui ne s’accompagnent pas d’une solidarité réelle, c’est-à-dire de mesures contraignantes qui forceraient un partage plus équitable des ressources sans égard à la classe socio-économique, la race ou le genre.


Elle témoigne aussi de l’exaspération à l’égard d’une classe politique permanente qui se drape dans les vertus du compromis bipartisan et de la civilité, mais qui, tel Bill Clinton, a sabré les programmes sociaux, éliminé des pans importants de la réglementation financière, encouragé l’incarcération à grande échelle ; ou encore, comme l’a fait Barack Obama, a favorisé les déportations massives, ordonné des attaques de drones, renfloué les grandes institutions financières qui ont causé la crise de 2008 ; ou bien a été favorable, comme le fut Joe Biden, à l’invasion d’un pays étranger sous de fausses raisons, l’Irak.

C’est ce centre mou et poreux de la politique américaine qui a défini les limites de l’imagination politique depuis les années 1990. C’est précisément le réalisme, le pragmatisme et la modération qui seront au centre du retour à la normale proposé par Biden. Après quatre ans de Trump, ce programme a les apparences d’une véritable délivrance. Mais il y a un risque réel que subsistent alors les tensions et le mécontentement qui ont propulsé Sanders sur la scène nationale.

Un cri du cœur

En effet, son émergence est aussi le cri du cœur d’une partie importante de la population. Une forte majorité de jeunes (jusqu’à 40 ans) a voté pour Sanders. Certains diront qu’il s’agit d’une mode, mais il serait plus juste de dire que le soutien des jeunes provient du fait qu’ils sont lourdement endettés après leurs études, n’ont pas ou très peu d’actifs et de biens immobiliers, ont des perspectives d’emploi limitées, sont souvent surqualifiés et sous-payés pour les emplois qu’ils occupent, et font face à une crise climatique sans précédent. Cette jeune génération, dont une partie a entrepris une mobilisation par le bas sans précédent, se joint à des millions d’autres Américains oubliés qui peinent à payer leurs comptes même en cumulant les emplois.

Dans ses discours, Sanders se plaisait à répéter que les trois personnes les plus riches des États-Unis possèdent plus de richesses que la moitié de la population, que des millions d’Américains n’ont pas d’assurance-maladie, que 500 000 Américains ont déclaré faillite en raison de frais médicaux trop élevés et que plus de 500 000 Américains dorment dans la rue chaque soir. N’en déplaise à ceux qui vantaient la santé de l’économie américaine avant la crise du coronavirus, ces chiffres étaient exacts et l’insatisfaction de beaucoup d’Américains quant à leur situation économique et financière demeure palpable.

Intérêts particuliers

Si le niveau d’inégalité obscène n’était pas une raison suffisante, quantité de lois votées au Congrès sont carrément écrites par les lobbyistes des banques, des compagnies pétrolières et d’autres intérêts particuliers depuis des décennies. Cette mainmise des intérêts particuliers sur le gouvernement n’a pas d’équivalent dans les démocrates occidentales. Dans ce contexte, on pourra excuser certains partisans de Sanders d’être un peu plus remontés et intransigeants.

La très grande majorité des partisans de Sanders voteront pour Joe Biden en novembre, mais ne le feront pas de gaieté de cœur. Alors que le coronavirus fait des ravages aux États-Unis et rend l’appel à créer un système de santé universel plus séduisant, reste à voir si Biden cédera plus de terrain à l’aile gauche du parti, avec Bernie Sanders et l’autre ex-candidate à l’investiture démocrate Elizabeth Warren à ses côtés.

L’espérance d’un monde plus solidaire, d’un État-providence résurgent à l’intérieur d’un système économique global plus équitable et coordonné, dépend en bonne partie de la destinée des États-Unis, qui a piloté une mondialisation axée sur la réduction des coûts de production et d’approvisionnement, la titrisation, la fluidité des capitaux et la valorisation extrême de l’actionnariat et de l’entreprise privée.
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