Certain American states are really pressure cookers these days. From Arizona to Texas and Idaho to Michigan, there are "patriots" occupying symbolic sites, attacking journalists, intimidating health care workers, insulting people who wear masks as fear mongers, etc., as if the virus were nothing but a political issue!
According to Madeleine Albright, however, had this crisis been managed differently, there would be another state of affairs. It's rather like 9/11, when Americans waged a fight against an evanescent enemy and fear gripped the land since no one knew where the next blow might come from, perhaps a nuclear bomb or biological warfare? Just like 19 years ago, this break will define the world before this disaster and the one after. In attitudes. In international relations.
Yet even if the majority of Americans are cooperating with the management of this crisis, in this case, stay-at-home orders, any similarity to 9/11 stops there. Instead of rising in popularity like his predecessor George W. Bush in 2001, the current president is falling in the polls. According to Real Clear Politics, 58% of Americans think their country is going in the wrong direction, and 53.4% disapprove of the handling of the coronavirus crisis.
Instead of bringing people closer together, Trump is driving them apart, calling for rebellion in Michigan, liberation for Virginia and freedom in Pennsylvania. This week, he supported the suspension of the Michigan legislature in order to prevent armed protesters from breaking into the Capitol building. He also favors intervention by armed militias in Texas to force businesses to reopen, claiming he is protecting law and order. He erodes the stay-at-home policies of certain states as neighboring ones opt for reopening. These disagreements at the highest levels, combined with the president’s rejection of scientific evidence, feed conspiracy theories that float around in the air like contagious particles. These theories, which date back to the early years of the American republic, have been documented. They illustrate a major cultural feature of Americans, one that historian Richard Hofstadter noted in 1964 as "the paranoid style in American politics." Sometimes amazing or disconcerting, and sometimes amusing, such theories are most disturbing when they are near the center of power, as with McCarthyism. But generally, the creators of conspiracy theories are on the fringes, where they are lightly mocked and seldom feared.
3 Factors that Change the Situation
First, there is the social context. In the anxiety ridden post-9/11 world, with a society scarred by a financial crisis in 2008 that plunged many Americans into a permanent precarious position, and where the whole social structure, including family, religion and demography is rapidly changing, these theories make everything overly confusing. These factors give meaning to incompetence and interfere with clear decision-making.
Next, there is America's growing polarization. As the political center gradually shrinks, the major parties are no longer the large umbrella groups they used to be, but now align according to ideology and values which erase previous regional differences. Thus, the line between "viral truth," which claims that the coronavirus danger is exaggerated, and "liberal bias," which holds that people may have to stay at home for a long time, stretches along the same partisan fracture as the rest of American society, extending from the local level up to Congress. And a study by the Harvard Kennedy School’s Misinformation Review finds that these differences are abetted by people's preferred media sources, such as the conservative Fox News, which claims that COVID-19 is being used by opponents to damage President Trump.
Finally, there is the president himself. The fact that he repeatedly tweets conspiracy theories, such as the idea he spread this week that California’s 25th Congressional District election was partly stolen, or his vague hints at "Obamagate," turn previously marginal notions more mainstream. These include white supremacy, which has gained steam during Trump's presidency during which more people have died in America as a result of the far right's racist and anti-Semitic terrorism than from Islamic terrorism.
Rather like members of the tea party in 2009, the groups that are mobilizing against social isolation measures benefit from Trump’s support, be it the conservative fortunes of the DeVos and Durr families, his Fox News mouthpiece, as well as parasites like Alex Jones with his InfoWars, or the fact that they join with those who fear a racial civil war, with militias, with pro-gun lobbies and with anti-government and anti-vaccine groups.
These people are increasingly coming forward more openly, with ever less fear of public criticism. In an election year, this development, along with the decline in the legitimacy of American institutions, might therefore lead to spiraling tensions whose outcome cannot be predicted.
Certains États sont désormais de véritables cocottes-minute : de l’Arizona au Texas, de l’Idaho au Michigan, des « patriotes » occupent des lieux emblématiques, agressent des journalistes, intimident des travailleurs de la santé, insultent des porteurs de masque qu’ils accusent de fomenter la peur… Alors que le virus, lui, n’a que faire de la politique.
Pourtant, écrit Madeleine Albright, cette crise, différemment gérée, aurait pu être tout autre. Un peu comme après le 11 Septembre, lorsque les Américains menaient une bataille contre un ennemi évanescent, lorsque là aussi la peur berçait le pays, car nul ne savait d’où viendrait la prochaine salve… (bombe radiologique, contamination bactériologique, et où ?). En 2020, comme il y a 19 ans, cette césure définira le monde d’avant et celui d’après. L’adaptation des contrôles frontaliers. Les mentalités. Les relations internationales.
Même si la grande majorité des Américains soutient une gestion de crise adaptée — ici les mesures de confinement — la comparaison s’arrête là. Au lieu de gagner l’appui très majoritaire de sa population comme George W. Bush en 2001, le président glisse dans les sondages : selon l’indice de Real Clear Politics, 58 % considèrent que le pays va dans la mauvaise direction, et 53,4 % désapprouvent sa gestion de la pandémie.
Au lieu de rassembler, il divise. Appelant à la révolte au Michigan, à la libération de la Virginie, à la liberté pour les Pennsylvaniens, il légitime la suspension de la session de la législature au Michigan cette semaine pour éviter que, de nouveau, des manifestants armés n’entrent dans l’enceinte du Capitole. Il justifie l’intervention de miliciens armés venus patrouiller devant des commerces texans souhaitant rouvrir… pour les protéger des forces de l’ordre. Il érode les mesures de confinement prises par certains États, lorsque les voisins optent pour le déconfinement. Ces discordances au plus haut niveau, conjuguées au désaveu présidentiel des données scientifiques, alimentent les théories du complot, les propulsant dans l’air ambiant comme autant de particules contagieuses. Ces théories, qui abondent depuis les débuts de la République américaine, sont largement documentées dans la littérature scientifique. Et surtout, elles reflètent un des traits culturels des Américains, identifié en 1964 par l’historien Richard Hofstadter, qui évoque le « style paranoïaque en politique américaine ». Parfois étonnantes, déroutantes, amusantes aussi, elles sont plus inquiétantes lorsqu’elles s’approchent du pouvoir comme sous le maccarthysme. Mais en principe, les artisans des théories du complot sont en marge, un peu raillés, rarement craints.
Trois éléments changent la donne.
D’abord le contexte. Dans un monde post-11 Septembre anxiogène, dans une société scarifiée par la crise financière de 2008 qui a plongé de nombreux Américains dans une situation de précarité pérenne, alors que la société américaine est en rapide mutation (la structure de la famille, les pratiques religieuses, la démographie) ces théories, simples, réduisent la complexité à une dimension intelligible. Elles donnent un sens à ce qui est souvent de l’incompétence et des errements du processus décisionnel.
Ensuite, la polarisation croissante. Alors que petit à petit le centre s’étiole, les partis ne sont plus les grands ensembles parapluies qu’ils ont pu être et s’alignent sur des idéologies, des valeurs, aplanissant les différences géographiques et régionales préexistantes. Ainsi, la démarcation entre le « véritalisme viral » (ce virus est une exagération) et le « biais libéral » (il faut confiner durablement) s’aligne clairement sur des lignes de fracture partisane qui se déclinent du local au fédéral, jusqu’au Congrès. Ces profondes divergences sont d’ailleurs alimentées par la polarisation médiatique, selon une étude publiée en avril dans la Harvard Kennedy School Misinformation Review corrélant la consommation de médias conservateurs comme Fox News avec la croyance que la COVID-19 est instrumentalisée aux dépens du président.
Enfin, le président lui-même. Le fait qu’il retweete abondamment des théories du complot (comme dans sa série de tweets sur le possible vol de l’élection partielle du 25e district de Californie cette semaine), en lançant régulièrement des thèses complotistes (comme le nébuleux « Obamagate »), normalise des discours autrefois plus marginaux. À commencer par celui du suprémacisme blanc dans un contexte où, dans le monde, l’extrême droite a le vent dans les voiles et alors que le terrorisme d’extrême droite / antisémite / raciste, a fait plus de morts au cours des dernières années aux États-Unis que ceux qui sont motivés par l’islamisme radical.
Les groupes qui se mobilisent ainsi contre les mesures de confinement — analogues dans une certaine mesure aux Tea Partiers de 2009 — bénéficient d’appuis qui leur confèrent une réelle résonance… qu’il s’agisse du soutien financier de fortunes conservatrices (comme les familles DeVos et Durr), du porte-voix qu’offre Fox News, du rôle d’acteurs parasites comme Alex Jones avec InfoWars ou du fait qu’ils fédèrent ceux qui craignent l’avènement d’une guerre civile raciale, des milices locales, des lobbies locaux pro-armes, des groupes anti-gouvernementaux et des membres de groupes anti-vaccins.
Ils avancent de plus en plus à visage découvert, craignant de moins en moins l’opprobre public. Et en année électorale, l’érosion concomitante de la légitimité des institutions américaines est donc susceptible de générer une spirale de tensions dont il est bien difficile de prévoir l’issue.
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