Putin's 'Strategic Surprise' and NATO's Awakening

Published in Les Echos
(France) on 3 April 2014
by Jacques Hubert-Rodier (link to originallink to original)
Translated from by Bora Mici. Edited by Gillian Palmer.
Whatever the conclusion of the crisis in Ukraine may be, Russia's annexation of Crimea had one important consequence: forcing NATO out of its post-Afghan torpor and refocusing the Atlantic Alliance on Europe.

As legend has it, NATO will have won the Cold War without having fired a single shot. But the alliance, which survived that period against all odds, is on the search for a new grand mission to follow its retreat from Afghanistan, which is scheduled for the end of 2014. And a few months before the summit of the heads of state or NATO's governing body in September in Wales, Vladimir Putin ends up shaking it out of its torpor with a "strategic surprise." This time, we are not talking about Central Asia or the eastern parts of Africa faced with terrorism and piracy, but about Europe's defense and security, the raison d'être of NATO, which has become the largest military alliance today, with 28 member states representing more than 900 million people.

It's true, since the fall of the Berlin Wall, NATO has grown eastward, expanding with three former Soviet republics — Estonia, Lithuania, Latvia — and old USSR allies at the center of the Warsaw Pact, dismantled in 1991 — Albania, Bulgaria, Romania, Hungary, Poland, Czechoslovakia and RDA, plus Croatia and Slovenia. Nonetheless, Vladimir Putin set a geographic boundary to this expansion: "The two former Soviet republics of Ukraine and Georgia should not be part of the Atlantic Alliance."

Since the Russian president has recently contributed to the avoidance of the signing of a friendly agreement between Kiev and the European Union before Ukrainian President Yanukovitch's deposition in 2008, a few weeks before the entry of Russian troops in South Ossetia, Putin had largely upset President Bush's project to give NATO candidate status to Georgia and Ukraine. Cleverly, he knew how to put pressure on both Angela Merkel and Nicolas Sarkozy.

Today, like a chess player, the Russian president has advanced other pieces on the map of Europe. By annexing Crimea, six years after Georgia lost one-third of its territory with the proclamation of the independence of South Ossetia and Abkhazia under Russian protection, he caught the Atlantic Alliance by surprise.

Putin's "blows" took place in a larger context marked by a trend of American troops retreating from a Europe that was considered peaceful and without risk for any major conflict. A real push toward a defense-oriented Europe did not accompany this retreat, which led to a reduction of 60,000 American military personnel, as compared to the 300,000 during the Cold War. The reality is more so a reduction in European military budgets. Now, these budgets represent 1.6 percent of their GDPs, which falls below the organization's 2 percent goal and is far from the 4 percent of the United States.

In contrast, Russia has announced a very significant increase in its military expenditures for the coming years. But we should not overblow Russian military strength. It is still far from that of the United States, even from China's. And this gap could still grow. Because if there is no question that we are really talking about the return to a cold war between two opposing blocs, NATO's awakening is requiring the allies to strengthen their ranks and promote the "smart defense" (shared intelligence and plans) initiative of the alliance's secretary-general, Anders Fogh Rasmussen.

Sure, neither the United States nor the Europeans will manage to force Russia to relinquish Crimea, a region that is 58 percent "Russian" and that Nikita Khruschev reunited with Ukraine in 1954. But on the other hand, the allies are determined to prevent the next blow and, as they have emphasized yet again, to strengthen their partnership and cooperation with Ukraine. To be sure, Putin has reassured that he has no intention of invading either Ukraine or Transnistria in Moldova.

But he has greatly alarmed the nations of the alliance, especially Poland and the Baltic countries. Isn't Lithuania located between Russia and the Russian enclave of Kaliningrad? Like the other allies, the Baltic countries are under the protection of Article 5 of the North Atlantic treaty of collective solidarity, which sees an attack on one ally as an attack on all. Instead, the United States has deployed 12 F16 combat planes to Poland and 10 F15Ss to the Baltic countries to reinforce air patrols.

However, as one diplomat highlights, it is not a matter of fortifying the eastern borders of NATO with troops. Because this could only be perceived as an aggressive act, something the allies do not want — even less so for the time being. Especially while NATO has other means, like the possible suspension of the foundational act of 1997 for Russia-NATO relations, according to which the organization does not have "any intention, plan or reason" to deploy nuclear arsenals to new member countries.

Besides the effective suspension of the NATO-Russia Council and military cooperation between the two entities, we cannot exclude that in order to reassure their Polish ally, the Americans will reinforce their troops in Poland. And as one diplomat emphasizes, while the West thinks that "it is easier to cut all ties with Syria than with Russia," the announcement of sanctions could have another effect on the already weakened Russian economy, notably accelerating the loss of capital.

Could the alliance win this new battle without firing a shot?


La « surprise stratégique » de Poutine et le réveil de l'Otan
EDITORIAL 03/04 | 06:00 | Par Jacques HUBERT-RODIER
Quel que soit le dénouement de la crise en Ukraine, l'annexion de la Crimée par la Russie a eu une importante conséquence : faire sortir de sa torpeur post-afghane l'Otan et recentrer l'Alliance atlantique sur l'Europe.

Selon la légende, l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (Otan) aurait gagné la guerre froide sans avoir tiré un coup de fusil. Mais l'alliance, qui a, contre toute attente, survécu à cette période, est à la recherche d'une nouvelle grande mission après son retrait d'Afghanistan, annoncé à la fin 2014. Et, quelques mois avant le sommet des chefs d'Etat ou de gouvernement de l'Otan en septembre au pays de Galles, Vladimir Poutine vient de la sortir de sa torpeur avec une « surprise stratégique ». Cette fois-ci, il ne s'agit pas de l'Asie centrale ou des côtes orientales de l'Afrique confrontées au terrorisme et à la piraterie, mais de la défense et de la sécurité de l'Europe, la raison d'être de l'Otan devenue aujourd'hui la plus grande alliance militaire jamais constituée, avec 28 pays membres représentant une population de plus de 900 millions de personnes.

Depuis la chute du mur de Berlin, l'Otan a, il est vrai, fait une poussée orientale, en s'élargissant à trois anciennes républiques soviétiques (Estonie, Lituanie, Lettonie) et à d'anciens alliés de l'URSS au sein du pacte de Varsovie, dissous en 1991 (Albanie, Bulgarie, Roumanie, Hongrie, Pologne, Tchécoslovaquie, et RDA), plus la Croatie et la Slovénie. Vladimir Poutine a néanmoins fixé une limite géographique à cet élargissement : « Les deux anciennes républiques soviétiques d'Ukraine et de Géorgie ne doivent pas faire partie de l'Alliance atlantique. »

Comme le président russe a récemment contribué à éviter la conclusion d'un accord d'association entre Kiev et l'Union européenne avant la destitution du président ukrainien Ianoukovitch, Poutine avait largement fait échouer en 2008, quelques semaines avant l'entrée des troupes russes en Ossétie du Sud, le projet du président George Bush d'accorder le statut de candidat à l'Alliance à l'Ukraine et à la Géorgie. Habilement, il avait su faire pression à la fois sur Angela Merkel et sur Nicolas Sarkozy.

Aujourd'hui, comme un joueur d'échecs, le président russe a avancé d'autres pions sur la carte de l'Europe. En annexant la Crimée, six ans après l'amputation de la Géorgie du tiers de son territoire, avec la proclamation de l'indépendance de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie sous la protection russe, il a pris au dépourvu l'Alliance atlantique.

Les « coups » de Poutine sont intervenus dans un contexte plus large marqué par un mouvement de retrait des forces américaines d'une Europe considérée comme pacifiée et sans risque de conflit majeur. Ce retrait, qui conduit à une réduction à 60.000 militaires américains, contre quelque 300.000 au moment de la guerre froide, n'a pas été accompagné d'une véritable avancée d'une Europe de la défense. L'heure est plutôt à la réduction des budgets militaires européens. Ces budgets représentent désormais 1,6 % de leur PIB, en dessous de l'objectif de 2 % de l'organisation, et loin des 4 % des Etats-Unis. En revanche, la Russie a annoncé une très forte augmentation de ses dépenses militaires dans les années à venir. Mais il ne faut pas exagérer la puissance militaire russe. Elle reste encore loin de celle des Etats-Unis, voire de la Chine. Et cet écart pourrait se creuser encore. Car s'il n'y a pas à proprement parler de retour à la guerre froide entre deux blocs antagonistes, le réveil de l'Otan oblige les alliés à resserrer les rangs et à encourager l'initiative du secrétaire général de l'Alliance, Anders Fogh Rasmussen, de « défense intelligente » (mutualisation de matériels et de projets). Certes, ni les Etats-Unis ni les Européens ne parviendront à obliger la Russie à lâcher prise sur la Crimée, une région à 58 % « russe » et qui avait été rattachée à l'Ukraine en 1954 par Nikita Khrouchtchev. Mais en revanche, les alliés sont décidés à empêcher le prochain coup et, comme ils l'ont encore souligné, resserrer leur partenariat et leur coopération avec l'Ukraine. Certes, Poutine a réaffirmé qu'il n'avait pas l'intention d'envahir ni l'est de l'Ukraine ni la Transnistrie, en Moldavie. Mais il a très largement mis en alerte les pays de l'Alliance, avec en première ligne la Pologne et, surtout, les pays Baltes. La Lituanie n'est-elle pas située entre la Russie et l'enclave russe de Kaliningrad ? Comme les autres alliés, les pays Baltes sont couverts par l'article 5 du traité de l'Atlantique Nord sur la solidarité collective qui prévoit qu'une attaque contre un allié est une attaque contre tous. Par prévention, les Etats-Unis ont déployé 12 avions de combat F16 en Pologne et 10 F15S dans les pays Baltes pour renforcer les patrouilles aériennes. En revanche, souligne un diplomate, il n'est pas question de « masser » des troupes aux frontières orientales de l'Otan. Car cela ne pourrait être que perçu comme une agression. Ce que les alliés ne souhaitent pas. Du moins pour le moment. D'autant que l'Otan a d'autres outils, comme la possibilité de suspendre l'Acte fondateur de la relation Otan-Russie de 1997, selon lequel l'organisation n'avait « aucune intention, aucun projet et aucune raison » de déployer des arsenaux nucléaires dans les nouveaux pays membres. Outre la suspension - effective - du Conseil Otan-Russie et des coopérations militaires entre les deux entités, il n'est pas exclu que, pour rassurer son allié polonais, les Américains renforcent leurs troupes en Pologne. Et si les Occidentaux, comme le souligne un diplomate, estiment qu' « il est plus facile de couper tous les contacts avec la Syrie qu'avec la Russie », l'annonce de sanctions peut avoir un autre effet sur l'économie russe déjà fragilisée, notamment en accélérant une fuite de capitaux. L'Alliance peut-elle gagner cette nouvelle bataille sans tirer un coup de fusil ?
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