Le plan américain de relance économique, qui comportait des dispositions afin que ne soient utilisés, en exclusivité, que des matériaux américains dans les projets de travaux publics, était perçu comme une des pires calamités dont nous aurions pu nous passer en cette période de crise économique.
Les acteurs clés de la communauté internationale se sont mobilisés et ont intensifié leurs pressions sur la nouvelle administration américaine afin qu’elle abandonne ces dispositions. Et ils avaient une obligation de réussite. S’ils avaient échoué dans leurs démarches, il s’en serait suivi une guerre commerciale mondiale, coûteuse et douloureuse, qui aurait compromis les chances que nous avions de sortir d’une des pires crises économiques.
Les arguments ne manquaient pas aux leaders internationaux pour convaincre le président Obama d’amender le plan afin d’en retirer les mesures protectionnistes. Outre les règles de l’OMC et l’ALÉNA, il y en a deux qui restent particulièrement percutantes: l’engagement d’une nouvelle ère dans les relations internationales pris par le nouveau président américain, et l’interdépendance.
M. Obama a pris l’engagement de travailler à un monde meilleur, à des relations internationales beaucoup plus harmonieuses et plus respectueuses qu’elles ne l’ont été avec l’administration précédente. Il aurait été tout à fait paradoxal qu’une de ses premières réalisations le fasse passer à l’histoire comme celui qui a fait fi des règles internationales, comme celui qui a permis le déclenchement d’hostilités qui ont plongé l’humanité, plus profondément encore, dans la crise actuelle.
Vivre dans un monde interdépendant n’est pas qu’une figure de style. La présente récession nous le démontre. La crise financière qui a frappé Wall Street s’est rapidement transformée en récession internationale. Il en va de même des actions accomplies, dans le monde d’aujourd’hui, par les gouvernements nationaux. Le battement d’ailes d’un papillon, surtout lorsqu’il s’appelle États-Unis, déclenche rapidement un tsunami planétaire.
L’interdépendance est plus large encore et ne va pas que dans un sens. Aussi puissants et influents qu’ils puissent être, les Américains ont vite compris qu’ils avaient besoin des autres. Les centaines de milliards de dollars injectés dans l’économie, depuis le plan Paulson, doivent être financés sur les marchés internationaux. Les coffres américains sont à sec et imprimer des dollars enfoncerait davantage les États-Unis en doublant la crise actuelle d’une ère d’hyperinflation.
Depuis plusieurs mois, la Chine, par exemple, qui dépend largement du marché américain pour l’écoulement de ses exportations, est également un des principaux détenteurs et acheteurs de titres américains. Les États-Unis ont besoin de la Chine.
Le Canada, dont les États-Unis est le premier marché d’exportation, est un autre exemple probant. Le Canada est un des plus importants fournisseurs de pétrole et d’énergie verte des États-Unis. Nos voisins ont cruellement besoin de nous.
Si tous les leaders mondiaux ont contribué à désamorcer cette crise potentielle, le président des États-Unis d’Amérique en détenait la clé. Sa décision courageuse d’enlever les dispositions protectionnistes de son plan, en dépit des fortes pressions des lobbys américains et au-delà de tous les arguments, aussi percutants soient-ils, est peut-être, après Guantánamo, le véritable test qui fera passer le président Obama à l’histoire de la bonne façon.
Yvan Loubier
Économiste et conseiller principal à National-Québec
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