Le Pari d’Obama 21 Juin
(Québec) Barack Obama a semblé durcir le ton à l’égard de l’Iran. Le président américain critique les dirigeants iraniens pour la répression des manifestations en Iran. Il l’a certes fait du bout des lèvres. Mais il fallait le leur rappeler.
«La manière dont [l’Iran] traite les gens qui essaient de se faire entendre par des moyens pacifiques enverra, je le pense, un signal fort à la communauté internationale sur ce que l’Iran est et n’est pas», a-t-il soutenu vendredi.
Il réagissait à une résolution votée presque au même moment par le Congrès, soutenant «tous les Iraniens qui défendent les valeurs de la liberté, des droits de l’homme, des libertés publiques et du règne du droit», et affirmant «l’importance d’élections démocratiques et équitables».
Il réagissait aussi au discours du guide de la révolution, l’ayatollah Ali Khamenei, le numéro un du régime, vendredi à Téhéran, qualifiant la victoire de Mahmoud Amahdinejad de «définitive» et d’«absolue» et adressant une sévère mise en garde aux
manifestants.
Mais Obama refuse de soutenir ouvertement le camp des réformateurs contre celui des conservateurs au pouvoir à Téhéran.
C’est affaire de réalisme. Les sondages préélectoraux, dont l’un commandé par le Washington Post, signalaient une avance d’Ahmadinejad de l’ordre de 2 à 1 sur son plus proche rival, Mir Hossein Moussavi. Ahmadinejad l’a bel et bien emporté, mais par une marge plus faible. Les tricheries et les anomalies de toutes sortes, soulignées lors du vote, le 12 juin, seraient ainsi de moindre ampleur qu’on ne le dit, et d’une utilité douteuse, mais dans certains cas, trop criardes. Elles ont, en tout cas, privé les réformateurs de ce second tour qui aurait permis au «miracle» de s’accomplir.
La politique de la main tendue d’Obama n’a pas été un enjeu de la campagne électorale. Tous les candidats se disaient prêts à transiger avec le nouveau président américain.
Si elle a pesé sur les événements, c’est notamment à cause de l’«enthousiasme» presque inconditionnel, dit-on, affiché par Moussavi, qui a scandalisé ses rivaux conservateurs, bien sûr, mais aussi certains de ses partisans réformateurs, ces «ex» de la gauche laïque qui, pendant la décennie d’après la révolution, ont acclamé son discours saluant la prise des otages américains à l’ambassade des États-Unis comme un élément fondateur de la république islamique. Même s’il s’est échelonné sur deux décennies, c’est un virage brusque difficile à digérer. Ces «ex» ont, au moins en partie, rallié le camp d’Ahmadinejad, gauchiste à sa manière, s’identifiant aux déshérités, incorruptible, austère et spartiate dans sa vie quotidienne. C’était un laïc aussi, islamiste certes. Mais il est hostile à ces mollahs religieux, corrompus, associés au clan de l’ex-président Hashemi Rafsandjani, surnommé «le requin», que les circonstances ont placé dans le camp des réformateurs, même s’il ne les appuie pas ouvertement. Ces «ex» ne sont pas légion, mais ce sont souvent eux qui fournissent le gros des machines politiques qui font sortir – ou compter – le vote.
La crise actuelle complique le dialogue avec les États-Unis. Mais celui-ci reste à l’ordre du jour pour presque tout le monde en Iran.
Toutes sortes de périls liés aux guerres en Irak et en Afghanistan ainsi qu’à la crise pakistanaise pèsent sur la république islamique. La crise actuelle peut les précipiter et les amplifier. Pour le meilleur et pour le pire, il faudra bien se tourner vers les États-Unis.
Le pari d’Obama est simple. Il y a plus de chance de changer les choses, en ce qui concerne le régime politique iranien, en maintenant le contact qu’en le coupant.
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