Nuclear Technology in Iran: How to Cope?

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Guillaume Metten (Belgique), Richard Dalton (Royaume-Uni), Steen Hohwü-Christensen (Suède), Paul von Maltzahn (Allemagne), François Nicoullaud (France), Roberto Toscano (Italie). Anciens ambassadeurs en Iran

Ambassadeurs de différents pays européens en Iran, nous avons suivi de près la montée de la crise entre ce pays et la communauté internationale sur la question nucléaire. Le long enlisement de ce dossier nous est inacceptable.

Le monde arabe et le Moyen-Orient entrent dans une nouvelle époque. Partout, de nouvelles perspectives se dessinent. Les périodes d’incertitude sont propices aux remises en question. Le moment est venu d’agir sur la question nucléaire iranienne.

En droit international, la position de l’Europe et des États-Unis est moins solide qu’il n’y paraît. Elle s’incarne, pour l’essentiel, en une série de résolutions votées au Conseil de sécurité qui font référence au chapitre VII de la Charte des Nations unies, autorisant la mise en œuvre de mesures coercitives en cas de « menaces contre la paix ».

Mais où est la menace ? Serait-ce l’enrichissement d’uranium dans les centrifugeuses iraniennes ? Il s’agit certes d’une activité nucléaire sensible, menée par un pays sensible, dans une région elle-même hautement sensible. L’Iran a un devoir à la fois moral et politique de répondre à l’inquiétude légitime de la communauté internationale. Mais rien en droit international, rien dans le Traité de non-prolifération n’interdit en son principe une telle activité, qui est soumise en Iran aux inspections de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). Certes, l’accord de garanties, datant des années 1970, est obsolète. Mais il est vrai aussi que l’AIEA n’a jamais relevé en Iran de détournement de matières nucléaires à des fins militaires.

La « menace contre la paix » serait-elle dans l’avancement d’un programme clandestin de construction d’une arme nucléaire ? Depuis au moins trois ans, la communauté américaine du renseignement ne retient plus cette hypothèse : « Nous continuons à penser que l’Iran garde ouverte l’option du développement d’armes nucléaires… Toutefois, nous ne savons pas si l’Iran décidera finalement de construire des armes nucléaires… Nous continuons de juger que le processus de décision de l’Iran en matière nucléaire est guidé par une approche en termes de coûts et d’avantages, ce qui offre des occasions d’influencer Téhéran », déclarait son directeur, J. Clapper. Aujourd’hui, une majorité d’experts, y compris en Israël, semble estimer que l’Iran cherche à se poser en « pays du seuil », techniquement capable de produire une bombe, mais s’abstenant pour l’instant de le faire. Rien en droit international n’interdit une telle ambition. D’autres pays que l’Iran, engagés comme lui à ne jamais se doter de l’arme nucléaire, ont déjà atteint un tel seuil, ou sont en passe d’y parvenir. Ils ne sont pas autrement inquiétés.

Mais, nous dit-on, c’est la mauvaise volonté de l’Iran, son refus de sérieusement négocier, qui ont obligé nos pays à saisir en 2006, le Conseil de sécurité. Là encore, les choses sont moins claires. Rappelons qu’en 2005, l’Iran était prêt à discuter d’un plafond au nombre de ses centrifugeuses et à maintenir le taux de son enrichissement très au-dessous des hauts pourcentages d’intérêt militaire. Il se montrait surtout disposé à mettre en œuvre le Protocole additionnel qu’il avait déjà signé avec l’AIEA, autorisant des inspections intrusives sur l’ensemble de son territoire, même sur des sites non déclarés. Mais à l’époque, les Européens et les Américains voulaient contraindre l’Iran à renoncer à son programme d’enrichissement. Avant d’accuser ce pays de bloquer la négociation, il est temps d’admettre que l’objectif « zéro centrifuge opérant en Iran », de façon définitive ou même temporaire, a tout d’une prétention irréaliste, et a conduit à l’impasse actuelle.

Reste un dilemme. Pourquoi offrir au régime iranien une ouverture qui pourrait l’aider à restaurer sa légitimité interne et internationale ? Ne vaut-il mieux pas attendre que lui succède un régime plus présentable ? C’est une vraie question. Mais on exagère peut-être l’effet de cette négociation nucléaire sur l’évolution des mentalités intérieures, bien plus profondes. Ronald Reagan qualifiait l’URSS d’« empire du mal ». Il a néanmoins mené d’intenses négociations avec Mikhaïl Gorbatchev en matière de désarmement nucléaire. Les pays intéressés par l’avenir de l’Iran doivent certainement maintenir la pression sur la question des droits politiques et des droits de l’Homme, mais aussi s’obliger à régler la question lancinante de la prolifération. Nous réduirions ainsi une source importante de tension dans une région qui aspire à la tranquillité.

L’échec de la rencontre de janvier dernier à Istanbul et le décevant échange de lettres entre les deux parties qui a suivi mettent en relief les difficultés de sortie d’un aussi long blocage. Sur la méthode, plus la négociation sera discrète et technique, plus elle aura de chances d’aboutir. Sur le fond, l’on sait déjà que toute solution se construira sur la qualité du dispositif d’inspection de l’AIEA.

Et là, ou nous avons confiance dans la capacité de l’AIEA à surveiller tous ses États membres, Iran compris. Ou nous ne lui faisons pas confiance, et pourquoi alors conserver une organisation efficace avec les seuls pays vertueux ? De fait, la première étape serait sans doute pour les deux parties de demander ensemble à l’AIEA ce qui lui paraîtrait nécessaire pour contrôler pleinement le programme nucléaire iranien et garantir de façon crédible qu’il est bien pacifique dans toutes ses dimensions. Sur la base de sa réponse, une négociation pragmatique pourrait alors s’engager.

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