Malgré l’embellie observée depuis cinq mois sur le flanc de l’économie, les États-Unis restent confrontés à d’énormes défis. Idem sur le front des relations internationales. Et que font les prétendants à l’investiture américaine? Ils se crêpent le chignon sur fond de religion quand ils ne s’écharpent pas sur les sujets sociaux.
Au terme des 22 caucus et primaires organisés jusqu’à présent, Mitt Romney a récolté 415 délégués, loin devant Rick Santorum qui, lui, en a conquis 176. Cette avance est attribuable aux moyens, notamment financiers, dont dispose l’ex-gouverneur du Massachusetts sur ses concurrents, mais aussi d’un changement de posture accompli au début de ce marathon.
En effet, après avoir mordu la poussière lors du scrutin tenu en Caroline du Sud remporté haut la main par Newt Gingrich, l’ex-patron du fonds spéculatif Bain Capital a modulé sa stratégie comme son discours de manière à ce qu’elle soit au diapason de celle conçue par le premier. En un mot, il a opté pour la diabolisation, la campagne de salissage, de ses frères ennemis.
Cette inflexion et la dynamique qu’elle a eue sur la suite ont eu une conséquence si corrosive sur les débats entre protagonistes, qu’ici et là on assure que jamais dans l’histoire moderne du Parti républicain on n’avait assisté à une campagne aussi basse, aussi avilissante. Par messages publicitaires interposés et petites phrases, ils ont fait le lit de l’intolérance. Au désespoir de certains mandarins républicains qui jugent que le tour imprimé à la campagne est tout bénéfice pour Barack Obama. À ce propos, certains bonzes démocrates ne cachent pas la joie qu’ils éprouvent à faire l’inventaire des péripéties qui agitent le camp d’en face.
Prenons Santorum. Ce fou de Dieu, cet adhérent aux thèses de l’Opus Dei, ne cache pas la haine qu’il a pour les laïcs en général et John F. Kennedy en particulier, dont le discours consacré à la séparation de l’Église et de l’État lui «donne envie de vomir.» La haine également pour les homosexuels et tous, on dit bien tous, les moyens de contraception. Ainsi que la haine qu’il peine à cacher pour ceux qui ne partagent pas sa conviction religieuse. Observer que Santorum est un bigot, relève de la lapalissade.
Ce biais a teinté à plus d’une reprise les exposés de Romney. À l’instar de Santorum et Gingrich, il a aiguisé les vices de l’intolérance. Le pétrole augmente? Sachez que ni le printemps arabe, ni la soif inépuisable de la Chine et autres puissances émergentes n’ont eu une quelconque influence sur le cours de l’or noir. Alors qui en est le responsable? Obama et ses politiques environnementales.
En matière d’économie dont il prétend être un crack en mettant de l’avant son expérience de financier, Romney a un programme qui, pour reprendre le qualificatif du New York Times, se réduit à un menu dessiné dans un «country club.» Le pays a plongé dans les affres de la pire crise économique depuis la crise des années 30 à cause notamment des politiques décidées par Bush fils? Romney veut les réintégrer. Il veut par exemple accorder des déductions fiscales à la frange la plus riche du pays. Il veut déréglementer tous azimuts en ne cessant pas de marteler que tout ce qu’Obama a réalisé à cet égard était nul.
En rabaissant le débat à l’expression de l’intolérance et de l’aveuglement, Romney et consorts ont réussi un prodige. Selon une étude du Pew Research Center, trois électeurs sur dix assurent que l’opinion qu’ils se font du Parti républicain s’est réduite à une peau de chagrin. Et d’une. Et de deux, la cote de popularité de l’actuel locataire de la Maison-Blanche grimpe avec constance depuis l’amorce de ce combat de coqs. Et de trois, le nombre de ces électeurs indépendants dits fameux parce que ce sont eux qui font pencher la balance lors de la grande finale est d’ores et déjà à l’avantage des démocrates. Autrement dit, si les choses demeurent plus ou moins en l’état, d’ici novembre, la formation d’Obama pourrait conserver la Maison-Blanche, mais également gagner des sièges lors des législatives. Il faut l’espérer.
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