(Québec) Qu’un jury ait parlé ne doit pas clore l’affaire Zimmerman-Martin aux États-Unis. Racisme et possession d’armes à feu composent bel et bien un duo explosif et meurtrier dans ce pays. Le nier et rester passif équivalent à accepter que des innocents soient encore tués en 2013 à cause de la couleur de leur peau et qu’une «pseudo» légitime défense vienne trop souvent justifier l’injustifiable.
L’acquittement samedi dernier de George Zimmerman, un Blanc qui a tué un Noir, Trayvon Martin, soulève bien de la colère et de l’incompréhension, toutes origines confondues, tant aux États-Unis qu’à l’extérieur de leurs frontières. Des rassemblements sont prévus samedi dans une centaine de villes pour réclamer du gouvernement la protection des droits civiques. Le président Barack Obama a lancé un appel au calme et à la réflexion.
Comment en effet un jury (six femmes blanches) d’un pays qui a rompu avec la ségrégation raciale, un État de droit par surcroît, peut-il arriver à un verdict qui laisse un goût si amer et qui jette un doute de plus sur la justice américaine?
Dès le début, l’affaire a soulevé les passions. Dans la soirée du 26 février 2012, Georges Zimmerman, gardien autoproclamé de son quartier en Floride, a utilisé son arme et tué le jeune Martin. L’adolescent de 17 ans marchait lentement sous la pluie, capuchon sur la tête, un sac de bonbons et un cellulaire à la main. Il n’était pas armé. Zimmerman l’a cependant trouvé louche et l’a suivi en voiture. Zimmerman ne badine pas avec la sécurité.
En un an, l’homme de 29 ans a fait 46 appels au 9-1-1. Le soir du 26 février, même si la police lui a dit de ne pas intervenir, celui-ci a fait fi de cet avis et a suivi Martin. Une altercation s’est produite sur le trottoir. Zimmerman a déchargé son arme plutôt que de tenter de fuir. Le jeune Martin est mort. Ce n’est toutefois que le 12 avril – oui, le 12 avril – que Zimmerman a fait face à une accusation de meurtre.
Aberrant à nos yeux de Québécois et de Canadiens, mais non à ceux de plusieurs Américains de la Floride et à ceux d’une vingtaine d’États qui, depuis 2005, ont adopté une loi Stand Your Ground. Leur Constitution permet à nos voisins de posséder et de porter une arme à feu.
Dans ces États, ils ont de plus le droit d’en utiliser une aussitôt qu’ils se sentent menacés. Pas besoin de penser à une solution de rechange moins violente, moins fatale. Pas besoin de penser simplement à fuir. Il suffit de presser sur la détente. Si en plus il s’agit d’un Noir, pourquoi se gêner? Les dérapages sont inévitables.
De telles lois créent des conflits dans nos quartiers et sapent la sécurité publique, déplore le ministre américain de la Justice, Eric Holder. Une évidence qui ne saute pourtant pas aux yeux des citoyens qui ont souhaité ce genre de lois et aux élus qui les ont votées. Autre paradoxe à l’américaine. On veut des armes pour se défendre, pour être davantage en sécurité, mais ces mêmes armes s’avèrent des instruments d’homicide, de tuerie dans des écoles et permettent à monsieur et madame Tout-le-monde de s’autoproclamer gardiens et justiciers. Quelque 10 000 Américains sont tués par des armes à feu chaque année. Un fléau.
Selon le ministre Holder, il est temps de remettre en cause ces lois qui étendent de manière stupide le champ de la légitime défense. Les Américains auront-ils la sagesse de mettre en question et de corriger leurs choix passés pour ne pas justement retourner à une époque pas très glorieuse de leur histoire, celle où régnait une discrimination systématique et honteuse entre Blancs et Noirs? Cela s’impose. Qu’ils ne se défilent pas comme ils le font lorsqu’il s’agit du contrôle des armes à feu.
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