Restaurer la dignité salariale de l’Amérique
Le mouvement «Occupy Wall Street», qui était apparu à l’automne 2011, avait réduit le problème des Etats-Unis à un fossé grandissant entre le 1% d’ultra-riches et les 99% d’Américains globalement inclus dans une classe moyenne hétérogène. Ce slogan fourre-tout a occulté un fléau qui sape l’idée même du rêve américain: la pauvreté.
Dans un pays où la réussite est souvent synonyme d’héroïsme, 15% de la population sont pauvres. Après le succès du président Lyndon Johnson dans sa guerre contre la pauvreté menée à partir de 1964, la précarité s’est à nouveau aggravée sous la présidence de Ronald Reagan. Le phénomène s’est accéléré depuis une décennie, sous la pression de la globalisation.
Le faible niveau d’éducation qui fait des Etats-Unis l’un des cancres de l’OCDE, l’absence de couverture médicale pour 48 millions de citoyens, des familles monoparentales incapables de faire face à une nouvelle réalité économique… Les causes de la pauvreté sont complexes et souvent imbriquées. Mais l’une d’elles retient l’attention: les bas salaires.
Aujourd’hui, dans la fièvre de «Black Friday», la frénétique journée des soldes qui suit Thanksgiving, des employés de Walmart ont décidé de braver l’interdiction de faire grève, pour revendiquer des salaires annuels de 25 000 dollars et exhorter le géant américain à assumer sa responsabilité sociale.
Aux Etats-Unis, où est remarquablement cultivé l’esprit d’entreprise, des sociétés comme Walmart ont, toutefois, beau jeu de justifier leur politique salariale par la concurrence des pays émergents et de se reposer sur l’Etat, les œuvres de charité et de généreux philanthropes pour compenser l’insuffisante rémunération qu’elles octroient à leurs propres collaborateurs.
La précarité ne devrait pourtant pas être une fatalité de l’économie libérale. Le président Barack Obama a bien tenté d’augmenter le salaire minimum de 7,25 à 10 dollars de l’heure, comme une mesure parmi d’autres pour combattre la pauvreté.
Mais les républicains ne sont pas près d’entrer en matière. Ils préfèrent stigmatiser les pauvres, dont la condition ne serait que le résultat d’une éthique perdue du travail. A voir comment les plus démunis jonglent avec deux, voire trois emplois, l’éthique du travail devrait inciter ces mêmes républicains à exiger que les secteurs privé et public négocient un nouveau contrat social afin de restaurer la dignité salariale des Américains .
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