La nouvelle modestie américaine
Paul Journet
Cela ne s’entend pas encore facilement, mais les cris « USA, USA, USA » ont perdu quelques décibels dans les dernières années.
Alors que les Américains ont célébré hier leur fête nationale, de récents sondages démontrent que le pays change. La nouvelle génération (18-33 ans) est moins patriotique et plus méfiante face aux grands partis. C’est en partie la conséquence de deux problèmes : le déclin de la superpuissance et l’hyperpolarisation qui empoisonne le débat public. Personne ne devrait s’en réjouir.
Le World Values Survey démontre que les Américains (56 %) sont fiers de leur pays, beaucoup plus que ne le sont par exemple les Suédois (39 %), les Russes (28 %), les Japonais (25 %) ou les Allemands (23 %). Mais cette fierté a chuté chez les jeunes.
Le nationalisme américain semble s’essouffler. Les raisons ne sont pas les mêmes que celles derrière les difficultés du Parti québécois. La question est complexe et les Américains ne forment pas un bloc monolithique. Au risque de simplifier : le nationalisme américain n’est pas avant tout associé à une langue commune et aux rapports entre deux peuples. Il se confond plutôt avec le patriotisme.
Ce patriotisme prend d’abord la forme d’idéaux partagés, incarnés dans la constitution. Autant la morale que l’identité de la communauté américaine découlent des principes de ce texte fondateur, comme sa vision de la liberté.
Le patriotisme américain prend aussi une seconde forme chez certains : la croyance que le pays, à cause de son destin particulier, est voué à influencer positivement le reste du monde.
La nouvelle génération se retrouve moins dans ce patriotisme. C’est la plus métissée de l’histoire du pays (43 % de non-Caucasiens). Elle a aussi grandi avec l’internet. Sa communauté et son espace public ne se limitent donc pas au territoire américain. Cette génération n’a aussi connu que le déclin de l’influence américaine. On en a eu un triste exemple avec l’impuissance du président Obama en Syrie.
La baisse de patriotisme n’est donc pas en soi problématique. C’est plutôt la conséquence d’un autre problème.
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La méfiance politique des jeunes Américains, l’autre grand constat de récents sondages (groupe PEW et American National Election Study), est un peu plus inquiétante.
Les jeunes ne sont pas forcément désengagés. Ce sont notamment les plus grands partisans des droits de gais (51 %) et de la protection des immigrants illégaux (55 %). Mais la moitié d’entre eux se disent désormais indépendants plutôt que démocrates ou républicains. Cette proportion était de 30 % dans les années 90.
L’écoeurement face à l’hyperpartisanerie en est probablement en partie responsable. Mais ces jeunes indépendants forceront-ils les grands partis à plus de bon sens pour les conquérir ? C’est loin d’être certain. Car malgré la polarisation actuelle, les jeunes sont aussi ceux qui voient le moins de différence entre les deux grands partis. Cette tendance s’observe dans d’autres pays.
Cela ressemble à un début de décrochage. On pourrait s’en consoler, en concluant à l’émergence de citoyens du monde. Mais le premier citoyen du monde était Diogène, aussi connu comme étant le père des cyniques.
La nouvelle génération (18-33 ans) est moins patriotique et plus méfiante face aux grands partis.
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