Les limites de la puissance américaine
Les États-Unis auront mis 72 heures pour clouer au sol les avions 737 MAX de Boeing, après l’interdiction prononcée par la Chine, l’Union européenne et le grand voisin canadien. Une décision que l’on peut juger tardive mais sage. Reste qu’il est anormal et hautement suspect que cette décision ait été dictée par la Maison-Blanche et non prononcée par l’agence compétente, la FAA (Federal Aviation Administration). Le président Donald Trump se félicite d’avoir agi par précaution mais l’on ne peut s’empêcher d’y voir un aveu de faiblesse auquel il n’est pas habitué. Aurait-il pris la même décision si l’Europe et la Chine et d’autres pays n’avaient pas pris les devants? Pas sûr.
Évidemment, le président ne fera pas cette lecture. Tout montre que ses administrés, eux, la feront. Ils s’interrogent sur cette hésitation américaine. Ils n’ont pas oublié que, cette même semaine, le président américain proposait de couper dans les budgets de l’agence américaine chargée de la sécurité de l’aviation civile! Et cela alors que l’agence n’a plus de directeur depuis une année et est en proie à des luttes intestines qui nuisent à sa crédibilité. Le même président a tenté de placer à la tête de l’agence son ancien pilote privé, suscitant l’incompréhension outrée du Sénat.
En fait, c’est cela le plus inquiétant. Les États-Unis, qui ont inventé la plupart des normes de l’aviation, sont aujourd’hui pilotés par un président imprévisible et une agence décriée. En donnant lui-même l’ordre d’interdire de vol des Boeing 737 MAX, Donald Trump inflige à son administration un camouflet. Plus grave, il insinue le doute sur la réelle indépendance des agences gouvernementales dont la sécurité doit être la seule et unique priorité.
Dans l’aviation civile, on se méfiera désormais des prises de position d’une agence dont le monde entier attendait jusqu’ici les décisions avant d’agir. La souveraineté normative sans partage des États-Unis vient de subir un revers qui fera date. En prenant les commandes de la FAA, Donald Trump s’offre un peu de gloire populaire mais ternit l’image d’un pays jusqu’ici réputé pour l’impartialité de ses agences spécialisées.
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