ÉDITORIAL. Au cœur de la riposte à la pandémie de Covid-19, l’Organisation mondiale de la santé a tiré les leçons du fiasco de 2014 avec l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest. Faible financièrement, elle est cependant tributaire des grandes puissances
Faut-il brûler l’OMS à la lumière du Covid-19, la plus grave crise sanitaire mondiale depuis l’épidémie de grippe espagnole en 1918? Certains détracteurs de l’Organisation mondiale de la santé y ont songé en 2014 déjà, quand elle avait fortement tardé à saisir l’envergure de l’épidémie d’Ebola en Afrique de l’Ouest, qui a coûté la vie à plus de 11 000 personnes. Elle avait payé le prix fort d’un manque d’autorité du siège sur ses bureaux régionaux. Face à des gouvernements qui agissent de plus en plus sous la pression d’un nationalisme rampant, elle procure pourtant une vision globale essentielle de la pandémie. Individuellement, les Etats ne viendront jamais à bout du coronavirus, dont les conséquences seront sans doute dramatiques aussi bien en termes de mortalité (entre 2 et 3%) qu’en termes économiques.
Dans un contexte géopolitique qui favorise de plus en plus un affrontement entre la Chine et l’Occident, l’OMS navigue en eaux agitées. Dotée d’un budget comparable à celui des Hôpitaux universitaires de Genève, elle est faible financièrement. Avant tout normative, elle n’a pas le pouvoir d’imposer des règles telle une organisation supranationale. Sa déférence excessive par rapport à la Chine et à sa manière de gérer l’épidémie a quelque chose de choquant quand on sait que, comme en 2003 avec le SRAS, le pouvoir chinois a une nouvelle fois tardé à communiquer les premiers cas. Résister à celle qui deviendra un jour la première puissance économique de la planète est de moins en moins aisé. La forte politisation de l’organisation n’est pas sans danger: elle risque de saper sa nécessaire indépendance.
L’agence onusienne a tiré les leçons du fiasco de 2014 en mettant en place un solide programme dédié aux urgences sanitaires. Elle s’est aussi dotée d’une communication plus professionnelle et plus transparente. Depuis le début de la pandémie, l’OMS tient quotidiennement une conférence de presse. Mais cela ne suffira pas si la forte instrumentalisation politique de l’organisation perdure. Car une guerre entre la Chine et les Etats-Unis dans le cadre de l’OMS aurait de dramatiques répercussions, notamment une gestion déficiente de futures pandémies, avec à la clé un nombre affolant de victimes. Avec le Covid-19, l’OMS se trouve devant un test vital grandeur nature.
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