The Inflation Reduction Act: In the Face of Global Economic Competition, European Industry Is Defenseless

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Inflation Reduction Act : «Face à la compétition économique mondiale, l’industrie européenne est sans défense»

Alors qu’un plan prévoit d’allouer 369 milliards de dollars de subventions aux technologies propres, à condition qu’elles soient fabriquées sur le sol américain, François-Joseph Schichan plaide pour une réponse européenne qui prenne en compte les différences entre les structures industrielles des États.

Le déclin de l’industrie européenne s’accélère, et l’Union européenne reste impuissante. Dernière menace en date : les subventions massives accordées par le gouvernement américain à son industrie via l’Inflation Reduction Act (IRA).

Cette loi adoptée par le Congrès américain à l’été 2022 autorise, parmi d’autres dispositions, des dépenses de plus de 390 milliards d’euros (369 milliards de dollars) en faveur des énergies renouvelables et du développement durable. Elle impose également l’assemblage en Amérique du Nord de certains produits comme les voitures électriques. Il s’agit d’un des plus grands programmes de soutien industriel du gouvernement américain de ces dernières décennies.

Le danger représenté par ces subventions massives a bien été identifié par les institutions européennes et certains États membres. Le risque est la disparition de pans entiers de l’industrie européenne, incapable de faire face à la concurrence américaine, à un moment où sa compétitivité souffre des prix élevés de l’énergie. Pour leurs futurs investissements, les entreprises européennes risquent également de préférer les États-Unis à l’Europe.

Des protestations ont été transmises à Washington, y compris par Emmanuel Macron lors de sa visite d’État à Washington en décembre 2022. L’administration Biden a opposé une fin de non-recevoir : elle ne réécrira pas sa loi, et si tant est qu’elle le voulait, elle ne le pourrait probablement pas compte tenu des nouveaux équilibres politiques au Congrès issu des élections de mi-mandat de novembre 2022.

Face au refus prévisible des États-Unis de modifier leur approche, le débat s’est donc déplacé à Bruxelles et entre les États membres. Au sein de la Commission européenne, les interventionnistes, incarnés au sein de la Commission par Thierry Breton, se sont opposés aux libéraux, représentés par la Commissaire Margrethe Vestager, chargée de la concurrence. Même conscient des risques posés par l’IRA pour l’industrie européenne dans un contexte économique défavorable, l’exécutif européen reste largement désuni.

Aux divisions au sein de la Commission s’ajoutent celles entre États membres. Certains craignent un conflit économique et commercial avec les États-Unis – sans voir que celui-ci est, de fait, déjà en cours. D’autres ne veulent pas donner à la France ou à l’Allemagne, qui disposent de marges de manœuvre budgétaires plus importantes, la possibilité de soutenir massivement leur industrie au détriment de la leur. Enfin, il y a ceux qui restent attachés à la mission évangélisatrice de l’Union européenne en faveur du libre-échange et de la concurrence libre et non faussée, et qui estiment qu’elle doit continuer à donner l’exemple en limitant la capacité des États à agir dans l’économie. L’Allemagne, quant à elle, s’est rapprochée de la France pour défendre une approche interventionniste mais les libéraux de la coalition d’Olaf Scholz ne sont pas sur la même ligne que le Chancelier.

Ces divisions ont jusqu’à présent abouti à des mesures qui ne sont pas à la hauteur de l’enjeu et qui laissent l’industrie européenne largement sans défense. La Commission européenne a proposé un assouplissement des règles des aides d’État afin de permettre aux États membres de soutenir leur industrie dans les secteurs des énergies renouvelables et du développement durable – mais cet assouplissement ne sera que temporaire et ciblé, soumis aux autorisations de la Commission européenne, et sans financement crédible. De surcroît, ces propositions risquent d’être affaiblies au cours du processus de négociation à venir.

La situation de l’industrie européenne ne va pas s’améliorer. Avec ces subventions massives, les États-Unis confirment la tendance protectionniste des administrations américaines successives. S’il était encore besoin de le rappeler, qu’il s’agisse de Trump ou de Biden, c’est «America First» pour défendre les intérêts économiques du pays. De son côté, la Chine subventionne aussi son industrie, notamment dans les secteurs des énergies renouvelables et du développement durable. L’Union européenne est donc prise dans l’étau de la compétition entre les grandes puissances. L’unité du camp occidental tant vanté sur la guerre en Ukraine n’est plus d’actualité sur le plan des intérêts économiques.

En définitive, les divisions européennes sur la réponse à l’IRA sont le reflet des différences fondamentales entre les structures économiques et industrielles des États membres. Pour une part, ces différences ne sont pas réconciliables. L’approche européenne devrait en tenir compte en donnant aux États membres davantage de marges de manœuvre.

De son côté, les États-Unis ont en tête non pas les protestations européennes, mais la compétition avec la Chine et le maintien de leur prééminence dans les secteurs économiques d’avenir. Et à cette fin, ils sont prêts à accepter et même à favoriser une accélération du déclin économique et industriel de l’Europe.

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