Mais qu’est-ce qui peut désormais arrêter Barack Obama ? À moins de trois semaines de l’élection présidentielle américaine, le candidat démocrate paraît avoir course gagnée. Les sondages et les bookmakers le placent largement favori. Et les trois débats organisés contre John McCain ont plutôt été en sa faveur.
Dans quelques jours, donc, la plus grande nation du monde pourrait se donner un président noir. Une révolution dans ce pays où la couleur de la peau fut longtemps un motif de ségrégation. Rien ne dit d’ailleurs qu’elle ne soit pas encore une cause de rejet. Ce fameux «effet Bradley», du nom d’un candidat noir au poste de gouverneur de Californie, en 1982, donné vainqueur, mais finalement battu. À n’en pas douter, l’onde de choc que représenterait l’élection d’Obama serait planétaire.
Cet homme de 47 ans, sans grande expérience politique, inconnu hors de son État de l’Illinois il y a peu, a réalisé un parcours sans faute. Ou presque. Disposant d’une Hillary Clinton trop sûre d’elle à l’issue d’une primaire sans merci. Profitant de la crise financière pour distancer un McCain empêtré dans la tempête.
Son charisme, sa fraîcheur, sa nouveauté, son sex-appeal même lui ont servi de sésame pour s’imposer dans la campagne, pour forcer le destin. Avec des moyens humains et financiers énormes qu’il a su rassembler grâce à un audacieux usage d’Internet. Une première qui fera date dans l’histoire électorale.
Une belle gueule, une élégante prestance, un sang-froid et une intelligence des situations qui en font presque oublier son programme, sans grande originalité. Davantage de protectionnisme, moins d’esprit belliqueux, plus d’attention aux classes pauvres et moyennes, bref les classiques de l’orthodoxie démocrate. Quelques pétitions de principe distillées avec prudence. Rien ne permet de croire qu’avec Barack Obama l’Amérique saura trouver les bonnes solutions aux guerres d’Irak et d’Afghanistan, aux conséquences du chaos financier et à la récession.
S’il est élu le 4 novembre, passé l’effet produit par son élection, il devra vite affronter la sombre réalité. Et tenter de créer les conditions du retour à L’Amérique que nous voulons, pour reprendre le titre du dernier livre de Paul Krugman, couronné ces jours-ci du prix Nobel d’économie. Obama, le symbole, devra se révéler stratège. S’il ne veut pas décevoir tous ceux qui voient en lui un nouveau John F. Kennedy. S’il ne veut pas être la pâle copie du mythe. S’il veut enfin être à la hauteur des espoirs de son camp.
Depuis Lyndon Johnson, qui jeta l’éponge en 1968, seuls deux démocrates ont occupé la Maison-Blanche : Jimmy Carter, qui ne brilla guère, et Bill Clinton, aussi habile que maladroit en certaines circonstances. À l’exception d’Al Gore en 2000, battu à l’issue d’un scrutin serré, tous les candidats démocrates firent le plus souvent de la figuration. Obama, lui, a une chance réelle. Mais rien n’est gagné. Le souvenir d’Aznar, après les attentats en Espagne en 2004, reste tenace.
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