Un pendentif orné d’une croix, porté sur un tee-shirt à l’effigie de Barack Obama, le candidat démocrate à l’éclection présidentielle américaine. Crédits photo : AFP
Démocrate atypique, visé par des rumeurs sur sa religion, le sénateur de l’Illinois fait assidûment la cour à l’électorat chrétien. Son adversaire républicain mise sur les enjeux du mariage et de l’avortement.
Sur le papier, Barack Obama est le candidat repoussoir idéal pour les chrétiens conservateurs américains. Il est favorable au droit à l’avortement, aux unions civiles entre homosexuels et à la séparation de l’Église et de l’État. Pourtant, il a abordé ce puissant bloc électoral comme les autres composantes du pays : en essayant d’élargir son pouvoir d’attraction en territoire a priori hostile.
En 2004, les quelque 70 millions d’évangéliques américains avaient voté pour George W. Bush à 77 %. Le président sortant n’avait à leurs yeux aucun défaut : il citait Jésus comme son «philosophe préféré», nommait des juges fédéraux conservateurs et prenait la décision d’envahir l’Irak sur le conseil d’un inspirateur «plus haut placé» que son père biologique. En conservateur orthodoxe, adversaire constant de l’avortement et défenseur du mariage traditionnel au Sénat, John McCain croyait hériter du même soutien. Le dernier sondage du Pew Forum sur la religion, publié la semaine dernière, le crédite de 67 % d’intentions de vote chez les évangéliques blancs, contre 24 % pour Obama. Les 10 % d’écart avec Bush pourraient peser lourd dans la balance le 4 novembre.
«Pas le Messie»
Le candidat démocrate n’a jamais prétendu inverser la tendance en sa faveur. Mais il a tout fait pour glaner quelques points sur le terrain de la foi. Son site Internet se répand sur le sujet : «Dieu est constamment présent dans nos vies, et sa présence est source d’espoir», y professe-t-il, ajoutant que, d’un point de vue stratégique, «les progressistes devraient aborder la foi et les valeurs avec audace». Il rappelle aussi que la séparation de l’Église et de l’État vise «à préserver à la fois notre démocratie et la vigueur de notre pratique religieuse». Dans ses discours et ses interviews, il confie «prier chaque jour», dire les grâces avant les repas et emporter sa bible en voyage. «La foi me maintient les pieds sur terre et fixe mes yeux sur les hauteurs», dit-il.
John McCain se montre moins prolixe sur ses convictions. Il a indiqué que la prière l’avait aidé durant sa captivité au Vietnam, mais il rechigne à se définir comme baptiste, préférant le label générique de chrétien. Sa plate-forme électorale ne mentionne pas la foi, préférant insister sur «l’interdiction de l’avortement» et «la protection du mariage». Lors d’un examen de passage, fin août, devant la mega-church du révérend Rick Warren en Californie, le républicain pensait avoir marqué un point en affirmant que «la vie commence dès la conception». Obama avait bafouillé que la question «dépassait (ses) compétences». Malgré cela, le Pew Forum voit le démocrate en tête chez les protestants traditionnels (48 %- 43 %), comme chez les catholiques (49 %-41 %).
Barack Obama est parti de loin dans cette course aux valeurs. À cause de son nom et de la religion musulmane de son père, une frange d’Américains (environ 12 %) croit toujours qu’il a prêté serment au Sénat sur le Coran. Le Clarion Fund, un groupe pro-McCain, a distribué à 28 millions de foyers et d’institutions religieuses un film de propagande le liant implicitement à l’islamisme radical. Baptisé en 1988 au sein de l’Église unie de la Trinité du Christ à Chicago, le candidat a dû prendre ses distances avec son pasteur, Jeremiah Wright, mis en cause pour des formules incendiaires telles que : «Dieu maudisse l’Amérique !» Depuis, pas un rassemblement électoral ne commence sans qu’un homme d’Église ne «remercie Dieu pour le messager Obama».
Le candidat plaisante qu’il n’est «pas le Messie», comme le prétend un blog voué à cette cause (obamamessiah.blogspot.com). Mais même Tom McClusky, du très conservateur Centre de recherche sur la famille, en convient : «Son discours sur la religion sonne plus familier et naturel que celui de McCain.»
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