« Actually, we can’t » (en fait, on ne peut pas)
JUREK KUCZKIEWICZ
mercredi 14 janvier 2009, 09:28
Edito Le candidat Obama s’était fixé un formidable défi de changement, qu’il a réussi à faire endosser par des millions de fans. La réalité est venue supplanter ce défi avec un autre, herculéen celui-là : sortir le pays, et avec lui l’économie mondiale, de la crise.
A peine élu, il avait annoncé souhaiter que son équipe « touche le sol en courant » le 20 janvier prochain, date de son investiture. En fait de transition, on n’avait jamais vu cela : Obama et les siens se sont lancés si vite, et les urgences de la crise économique se sont faites si pressantes que le basculement du pouvoir a commencé avant même que le nouveau locataire s’installe dans le Bureau ovale.
La crise financière a été déterminante dans la victoire électorale d’Obama. (Sa courbe sondagière s’était littéralement cabrée à partir du lendemain de la faillite de la banque Lehman Brothers.) Il s’avère maintenant qu’elle est déjà déterminante dans le recalibrage de la présidence qui s’annonce. Lorsqu’Obama, comme son concurrent McCain, avait été interrogé sur les renoncements qu’il devrait concéder sur son programme face à la crise économique, Obama, comme son concurrent, avait refusé d’envisager ce cas de figure.
Depuis, la crise économique n’a fait que s’amplifier, obscurcissant les perspectives. Et force est de constater que le président élu, comme une bonne partie du camp démocrate qui pense déjà aux législatives de mi-mandat dans deux ans, ont actionné la machine à réduire les attentes. C’est vieux comme le monde : après le temps des promesses, vient celui de la « real politik ». Le « Yes, we can », un des plus beaux slogans des dernières décennies, se chante déjà sur l’air du « tout n’est pas possible ». L’atterrissage, déjà, avant le début même de la course…
Le candidat Obama s’était fixé un formidable défi de changement, qu’il a réussi à faire endosser par des millions de fans. La réalité est venue supplanter ce défi avec un autre, herculéen celui-là : sortir le pays, et avec lui l’économie mondiale, de la crise. Cette situation a ouvert un danger considérable devant Obama : ses électeurs le tiendront comptable du second, mais n’oublieront pas le premier, cette promesse « aspirationnelle » qui a défini sa stature. Plutôt que de réduire les attentes, l’heure est arrivée pour Obama de magnifier les difficultés. Comme Churchill, qui avait promis la victoire, mais après du sang et des larmes. Car on sait maintenant que ce sera le prix du changement. S’ils le veulent.
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