Obama and the “Divine Surprise” of Copenhagen

Edited by June Polewko

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Le jour où le reste du monde aura fini de penser qu’il est le seul à pouvoir sauver la planète, Barack Obama pourra enfin respirer. Profondément. En dissociant son voyage à Oslo – où il se verra officiellement décerner aujourd’hui son prix Nobel de la paix -de sa participation à la conférence de Copenhague sur le climat, le président américain a pris un risque politique. Mais c’est un risque volontairement limité. Déjà confronté à une récession sans précédent depuis la Grande Dépression et à un taux de chômage record, le « nobélisé » Obama a déjà fort à faire sur son propre terrain. Malgré l’exaltation, voire l’angélisme, des croisés de la lutte contre le réchauffement climatique, sa priorité à Copenhague sera d’abord et surtout de préserver son « capital politique » en ne s’exposant pas à l’échec d’un objectif déraisonnable.

« Paris se réjouit de cette décision qui témoigne de l’importance accordée par les Etats-Unis au succès de cette conférence sur le climat », s’est ouvertement réjoui l’Elysée, à l’annonce du report de la visite de Barack Obama à Copenhague, initialement prévue le 9 décembre, afin de participer à la conclusion des travaux des 17 et 18 décembre. C’est à peine si les Européens ne s’arrogeraient pas d’ailleurs la paternité indirecte de ce « geste de bonne volonté » qui renforce les chances d’aboutir à un accord politique. Car, de l’aveu même du sénateur John Kerry, il n’est pas dit que le Sénat américain entérine l’objectif de 17 % au printemps.

De là à crier victoire, il y a un pas encore difficile à franchir. D’abord, parce que le retentissement médiatique disproportionné du prétendu « Climategate », – l’affaire des « courriels piratés » de l’université d’East Anglia -, brandi comme une preuve éclatante d’un complot scientifique par les sceptiques du réchauffement et l’Arabie saoudite, montre bien l’ampleur des résistances psychologiques à la lutte contre le changement climatique outre-Atlantique. Surtout lorsque la chaîne Fox News et le think-tank libertarien Cato Institute prennent soin d’attiser le tam-tam des blogs conspirationnistes. Mais aussi et surtout parce que la « divine surprise » de l’objectif chiffré des 17 % de réduction des émissions de CO2 (par rapport au niveau de 2005 et d’ici à 2020) officialisé par Barack Obama le 26 novembre n’en est pas vraiment une.

Présenté par la conseillère pour l’environnement de la Maison-Blanche, Carol Browner, comme un levier « ambitieux », l’objectif des 17 % correspond à la fourchette basse des textes de compromis en négociation au Congrès. En outre, rapporté au niveau de 1990 qui sert de référence aux Européens, il représente à peine une réduction de 3 % à 4 %, contre un objectif de 20 % sur la même période pour l’Union européenne. Pour l’experte américaine Adele Morris de la Brookings Institution, qui a participé aux négociations du « non-accord » de La Haye en novembre 2000, la priorité absolue de Barack Obama est surtout d’éviter la répétition du cuisant précédent du protocole de Kyoto, signé en novembre 1998 par Al Gore mais jamais ratifié par le Congrès. Car, de l’aveu même du sénateur John Kerry, il n’est pas dit que le Sénat américain entérine l’objectif de 17 % au printemps.

« A force de vouloir donner des leçons de morale sans comprendre les contraintes politiques qui pèsent sur le président américain, les Européens risquent de se retrouver le dos au mur comme à La Haye en 2000 », estime Adele Morris. Malgré le tam-tam médiatique dont il a bénéficié, l’avis définitif « historique » de l’Environmental Protection Agency (EPA) sur la dangerosité des émissions de CO2, rendu le 7 décembre, n’est qu’une formalité symbolique attendue. Tout juste pourra-t-il servir d’aiguillon tactique à usage interne vis-à-vis du Sénat.

Ne pas surestimer la force de persuasion de Barack Obama – sans sous-estimer ses contraintes de politique interne -serait paradoxalement la meilleure assurance d’une « divine surprise » à Copenhague.

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