Santé : Obama fait-il trop de concessions ?
Pour faire adopter sa réforme du système de santé, Barack Obama renonce à instaurer une assurance financée et gérée par l’État fédéral, et vide des dernières novations progressistes avancées le projet initial.
Plus avance le compromis sur la réforme du système de santé que Barack Obama entend attacher à sa présidence et moins le changement devient visible. Le président s’est réjoui samedi d’un accord conclu au sein de la majorité démocrate du Sénat qui ouvrirait la voie à une adoption de la réforme par la chambre haute du Congrès à la veille de noël. « Après un demi-siècle de batailles, nous sommes sur le point de faire aboutir la réforme », s’est-il aussitôt enthousiasmé. Le problème, c’est que le prix payé pour ce nouveau compromis est très élevé.
Compte tenu de l’opposition des républicains, les démocrates ont besoin de 60 des 100 voix du Sénat pour faire adopter le texte. Si cet objectif semblait atteint ce week-end, les concessions faites aux sénateurs démocrates les plus conservateurs ont vidé le document des dernières novations progressistes avancées dans le projet initial du président. Le document adopté est présenté officiellement comme un moyen de fournir une couverture à « 31 des 36 millions de citoyens des États-Unis » qui en sont dépourvus aujourd’hui. On voit mal cependant comment l’ambition de couvrir les plus démunis, déjà restreinte ‚Äö√Ñ√¨ puisque 5 millions de citoyens n’y accéderaient toujours pas d’après les chiffres mêmes produits par le plan en cours d’adoption ‚Äö√Ñ√¨, pourra fonctionner effectivement. Pour une raison simple : les membres de l’aile conservatrice du Parti démocrate sont parvenus à bannir tout recours à la fameuse « option publique » (l’instauration d’une assurance meilleur marché financée et gérée par l’État fédéral).
De plus le mode de fonctionnement retenu qui consisterait à accorder une aide aux salariés qui n’en ont pas les moyens pour qu’ils puissent souscrire une assurance privée sera bien difficile à mettre en œuvre. Et il risque donc de laisser sans assurance bien plus qu’une fraction des 36 millions de personnes répertoriées par l’administration. D’autant que, selon diverses sources non gouvernementales, ce sont en fait quelque 50 millions de citoyens qui seraient en réalité sans couverture sociale et ce chiffre est en train de grimper rapidement avec l’explosion actuelle du chômage.
Autre concession insupportable pour les progressistes et de nombreuses associations de femmes : toute aide publique sera interdite dès lors qu’elle sera destinée à financer un avortement. Le sénateur démocrate Ben Nelson, qui conditionnait son vote à l’insertion de cette disposition, a obtenu satisfaction sur toute la ligne. Á ce stade, les grands vainqueurs de la « réforme » sont donc les lobbies des assureurs privés et des associations opposées à l’IVG. Aux chapitres des avancées ne figurent plus que le principe retenu d’interdire aux compagnies de refuser une couverture à des citoyens ayant eu des problèmes de santé préexistants et l’extension du champ du programme Medicaid, sorte de minimum médical destiné aux plus pauvres. On est à des années-lumière d’une protection universelle et très loin du compte d’une réforme qui devait servir d’emblème à la présidence Obama. D’autant que, même en cas d’adoption par le Sénat d’ici à vendredi, la course d’obstacle ne sera pas terminée. Le texte adopté devra alors fusionner avec celui validé par la Chambre des représentants début novembre. D’ou la négociation de nouveaux compromis qui pourraient permettre aux républicains et aux démocrates conservateurs de poursuivre leurs forcings.
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