“Je n’abandonnerai pas l’arme nucléaire, garante de la sécurité de mon pays, de façon unilatérale, dans un monde aussi dangereux qu’il l’est aujourd’hui.” Nicolas Sarkozy réitérait ainsi, le 12 avril, à la télévision américaine, la conviction française de l’utilité persistante des armes nucléaires dans un contexte stratégique mondial lourd d’incertitudes.
Depuis que le président américain, Barack Obama, a lancé, en avril 2009, son mot d’ordre d’un “monde sans armes nucléaires”, le discours français se retrouve en apparence en porte à faux. La France se voit reprocher, par les militants pour l’abolition de l’arme suprême, son attitude sceptique. M. Sarkozy répète que l’abolition est un “rêve”, qu’elle relève d’un “monde virtuel”. Il n’hésite pas à se démarquer de l’ambition proclamée par M. Obama. La France n’est pas dépourvue d’arguments. Elle s’estime irréprochable en matière de désarmement et de transparence sur la taille de son arsenal, basée sur la notion de “stricte suffisance”.
La différence de vocabulaire est notable avec l’équipe Obama. Mais, sur le fond, les divergences ne sont pas si profondes. Nicolas Sarkozy a pu, à bon droit, constater que la nouvelle doctrine nucléaire américaine, tout en restreignant les conditions d’emploi de l’arme suprême, ne renonce en rien au rôle de la dissuasion. A Washington comme à Paris, chacun admet que les conditions sont loin d’être réunies pour éliminer tous les stocks d’armes dans le monde.
En 1963, le président John F. Kennedy mettait en garde contre l’apparition possible d’une vingtaine de puissances nucléaires dans le monde. Ces sombres prévisions ne se sont pas concrétisées, mais le régime de non-prolifération mis en place en 1968 pour enrayer la dissémination de l’arme atomique a subi de sérieux coups de boutoir. Aujourd’hui, neuf pays sont détenteurs de l’arme, contre cinq en 1968. Après les essais nucléaires de la Corée du Nord, l’autre crise urgente à traiter est le défi nucléaire iranien.
La conférence d’examen du traité de non-prolifération (TNP), qui s’ouvre lundi 3 mai à New York, pourra difficilement faire l’impasse sur ce dossier. Les Occidentaux sont en butte à une fronde des pays du Sud et du mouvement des non-alignés, qui demandent de nouveaux engagements des grandes puissances en matière de désarmement, et dénoncent la tolérance par les Occidentaux de l’arme atomique israélienne. Le clivage Nord-Sud sur le nucléaire est une des composantes du nouveau monde multipolaire.
M. Obama peut faire valoir l’accord de réduction des arsenaux stratégiques signé le 8 avril avec la Russie. Mais Moscou est peu désireux d’aller plus loin, conscient de son infériorité au plan conventionnel. La France rappelle que d’autres étapes essentielles doivent être franchies, comme l’interdiction complète des essais nucléaires et celle de la production de matière fissile dans le monde. Ce qui soulève, au passage, la question de l’accroissement constant, et en toute opacité, de l’arsenal de la Chine.
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