L’enjeu est de voir “les nouveaux emplois et les nouvelles industries s’enraciner dans ce pays, et pas ailleurs” : en une phrase, Barack Obama, dans son discours sur l’état de l’Union, prononcé mardi 25 janvier, a mis le doigt là où l’Amérique a aujourd’hui le plus mal.
Malgré le retour de la croissance, la perspective d’y faire baisser de manière importante le taux de chômage (9,4 %) est peu plausible à court terme. Pour y parvenir – M. Obama l’a dit plusieurs fois -, son pays devrait remodeler tout son modèle économique, tant il a aussi accumulé des handicaps : infrastructures obsolètes, éducation en berne, leadership technologique menacé… Les Etats-Unis affrontent un enjeu de court terme – créer massivement des jobs – qui ne trouvera de réelle réponse que sur le long terme.
L’équipe Obama était arrivée au pouvoir avec une stratégie en deux temps. Il s’agissait d’abord de renflouer le secteur bancaire pour desserrer le crédit et favoriser ainsi la reprise de l’investissement et de la consommation. Une fois la machine repartie viendrait le temps de la “Grande Réforme” qui verrait l’Amérique tourner le dos à un système entièrement axé sur l’endettement croissant de tous pour favoriser une croissance davantage fondée sur l’amélioration du pouvoir d’achat et le dynamisme des producteurs.
Deux ans plus tard, M. Obama se retrouve confronté à l’échec de la phase un. Certes, banques et entreprises voient revenir le temps des bénéfices, mais le pays s’enfonce dans un sous-emploi structurel. Pour M. Obama, “le monde a changé, et pour beaucoup ce changement a été douloureux”. Aujourd’hui, 15 millions d’Américains recherchent un emploi, et presque autant travaillent à temps partiel. Rapporté à la population active, près d’un salarié sur cinq est touché par une forme de chômage, alors que la protection sociale des chômeurs reste très inférieure à ce qu’elle est en Europe.
Dans de telles conditions, lancer la phase deux, celle de la “reconstruction de l’Amérique”, sera autrement plus ardu que prévu. D’autant que les frayeurs et les frustrations qui accompagnent le sentiment de tant d’Américains de perdre le statut d’hyperpuissance économique est lourd de menaces politiques intérieures.
Pourtant, M. Obama a préféré parler un langage de vérité à ses compatriotes. Il a évoqué la nécessité d’améliorer la compétitivité de son appareil industriel, de même que “l’innovation pour créer des boulots en Amérique et pas outre-mer”. Evoquant la Chine, la Corée du Sud, les pays d’Europe et la Russie, il n’a pas masqué les domaines où son pays prenait du retard. “Nous devons faire mieux”, a-t-il conclu.
Certes, ces paroles s’inséraient aussi dans un contexte politique : l’affrontement avec l’opposition républicaine sur la poursuite d’investissements publics essentiels ou la réforme fiscale, avec pour perspective l’échéance présidentielle en 2012. Reste que, si les Etats-Unis entendent réellement adapter leur économie et créer les emplois dont ils ont besoin, ils devront bien “faire mieux” qu’aujourd’hui.
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