U.S.-Pakistan Relations Strained after the Bizarre Murders in Lahore

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Le 27 janvier dernier, Raymond Davis (ici en état d’arrestation, photo Reuters), un Américain employé au Consulat des Etats-Unis à Lahore, tuait en plein jour et au coeur de la ville, deux jeunes Pakistanais. Appelé en renfort, un 4×4 toujours appartenant au Consulat, aurait renversé et tué un troisième homme. Invoquant l’immunité diplomatique, Washington réclame la libération de Davis. Islamabad rétorque que cette immunité n’existe pas. Le ton monte entre les deux capitales.

L’histoire semble sortir tout droit d’un roman de John Le Carré. Et c’est sans doute bien d’espionnage qu’il s’agit, même si les Etats-Unis restent pour le moins discrets sur l’identité et les activités de Raymond Davis. Que faisait-il aux abords de la vieille ville de Lahore en ce beau matin de janvier ? Tout le monde le sait, le personnel diplomatique américain déployé au Pakistan a des consignes de sécurité draconiennes, et Davis n’aurait sans doute pas dû se trouver dans un tel quartier ce jour-là. A moins que…

La thèse la plus plausible est que l’homme ait eu rendez-vous avec un ou plusieurs “contacts” et que l’affaire ait mal tournée. La théorie selon laquelle il aurait été agressé et se serait défendu en tirant – et tuant – deux jeunes hommes est moins vraisemblable. Davis serait donc un espion travaillant pour le compte de la CIA. Une thèse largement partagée par les Pakistanais. Mais pourquoi ne pas lui reconnaître l’immunité diplomatique ? Parce qu’il n’appartient pas au corps diplomatique mais à la compagnie de sécurité Blackwater, rebaptisée Xe, clament les autorités de la Province du Pendjab, ce qui est loin d’être avéré.

Tristement, l’affaire vient de faire une nouvelle victime : désespérée, la jeune épouse – elle avait 18 ans – de l’un des hommes abattus par Raymond Davis s’est donné la mort dimanche.

Reste à savoir pourquoi le gouvernement d’Islamabad n’est pas, lui non plus, très loquace sur l’identité de Davis.

En ne dévoilant rien, en faisant semblant d’ignorer que l’homme était bel et bien un espion américain (il se serait d’ailleurs rendu à Peshawar et en d’autres lieux sensibles du pays sans problèmes), le gouvernement pakistanais fait une erreur monumentale, juge le quotidien Dawn. D’autant, souligne le journal, que de fuites en révélations, il est désormais connu que Raymond Davis a vécu pendant plusieurs années à Islamabad et à Lahore, où il a occupé divers emplois. Cela accrédite tout simplement la thèse selon laquelle le meurtrier travaillait bien pour la CIA au Pakistan, sur le terrorisme en zones urbaines. Et, ce qui est infiniment plus grave, avec l’accord tacite d’Islamabad. A l’heure où les extrémistes de tous poils redressent la tête dans le pays et où l’anti-américanisme y poursuit sa fulgurante ascension, le moins qu’on puisse dire est que la “bavure” américaine de Lahore tombe mal. Elle risque d’envenimer les relations entre Washington et Islamabad, mais aussi de placer une nouvelle fois le gouvernement pakistanais en porte-à-faux face à son opinion publique.

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