Le plus grand fonds obligataire du monde s’appelle Pimco Total Return. Il représente plus de 230 milliards de dollars d’économies d’épargnants de tous les niveaux de vie. Il est géré depuis Newport (Californie) par Bill Gross, une personnalité calme et pragmatique.
Ce gérant à la voix aigue et aux performances passées qui forcent le respect, implore depuis des mois les responsables politiques à Washington de réduire l’énorme déficit budgétaire des États-Unis. Il prône une combinaison de hausses d’impôts pour les plus riches et de baisses de dépenses. Il s’alarme du risque que représente pour le dollar, la poursuite de politiques monétaire et fiscale totalement laxistes au nom de la lutte courageuse contre le chômage. Il voit dans ces politiques une abdication des élus devant leurs responsabilités et une source d’inflation. En un mot, il représente l’opinion de beaucoup d’investisseurs. Mais comme Bill Gross gère plus de 230 milliards de dollars, on l’écoute plus que les autres.
Selon l’agence Reuters, Pimco Total Return s’est débarrassé de TOUTES ses obligations du Trésor américain, ainsi que de toutes ses obligations assimilées au risque du Trésor (Fannie Mae, Freddie Mac, etc…). C’est un signe incroyable de défiance à l’égard du papier émis par le Trésor.
Que conclure d’autre de cette décision ?
1) Gross peut anticiper une envolée des rendements obligataires sous l’effet d’une accélération de la croissance qui engendrerait une accélération de l’inflation.
2) Gross juge probablement que les taux américains ne peuvent plus que remonter, maintenant que la BCE signale à son tour une majoration de ses taux directeurs.
3) Gross n’a guère d’espoir dans la sincérité de Barack Obama qui parle que de réduire les dépenses publiques….mais ne propose que 10 milliards de dollars de réduction pour le budget de l’année en cours. Aller au delà serait mettre en danger l’emploi, l’éducation et l’avenir de l’innovation, dixit la Maison blanche. Cette affirmation est stupéfiante dans la mesure où le budget représente 3800 milliards de dollars ! Comment une réduction aussi marginale des dépenses pourrait-il avoir des conséquences aussi catastrophiques ?
Même en écartant les dépenses dites “obligatoires”, soit 800 milliards de dollars pour le programme de retraite Social Security, 900 milliards de dollars pour le grand programme de santé Medicare et 200 milliards pour les intérêts de la dette, il reste 1900 milliards de dollars de dépenses discrétionnaires…Rogner 10 milliards dans ce total n’est ni courageux, ni visionnaire, ni admirable. C’est au contraire la preuve du calcul électoral de Barack Obama de laisser les républicains se faire massacrer dans l’opinion pour oser toucher aux dépenses publiques, alors que le déficit reste proche de 10% du PIB.
4) Gross ne prend pas au sérieux les républicains qui parlent haut de réduire les dépenses publiques, mais ne s’attaquent qu’à des détails politiquement symboliques et évitent de toucher aux dépenses énormes qui sont au coeur du problème: le programme de retraite (Social Security), le programme de santé (Medicare) et le Pentagone…Tout au plus ils ont proposé 61 milliards de dollars d’économie dans le budget 2011. Si vous croyez les éditoriaux du New York Times, ces économies plongeront l’Amérique en ruine…
5) Gross estime clairement que d’autres émetteurs publics et privés ont un meilleur crédit: des pays qui ont des politiques fiscales moins suicidaires, et des entreprises qui peuvent surmonter une poussée de l’inflation.
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