Mitt Romney: “Ma religion est inhabituelle”
01/03/2012 — Rédigé par Lorraine Millot
Mitt Romney lance l’opération “Connect with people”, ont pu constater et apprécier ses supporters, lors d’un meeting ce mercredi à Bexley, dans l’Ohio. Tout juste rescapé du Michigan, et à une semaine de l’épreuve clé du “Super Tuesday”, l’ancien gouverneur du Massachusetts a visiblement compris qu’il manque de chaleur humaine ou de “liant” avec ses congénères. Avec le sérieux et la méthode qui le caractérisent, Mitt Romney s’emploie donc à y remédier.
Comme on l’avait déjà vu en Caroline du Sud, Mitt Romney continue de débuter ses meetings par un numéro, maintenant très bien rodé avec son épouse. A Bexley ce mercredi, c’est lui qui présente Ann Romney, qui ensuite le présente… Le petit speech d’Ann, pratiquement toujours le même, sert aussi à casser l’image un peu trop parfaite de la famille Romney. “Ma plus grande joie maintenant est de voir mes petits-enfants mal se conduire, lance-t-elle, expliquant prendre ainsi sa revanche pour tout ce que ses cinq fils lui ont infligé. Et ils vont être bientôt adolescents. On va bien s’amuser!” Quand c’est au tour de Mitt, qui par ailleurs porte toujours aussi bien ses vieux jeans, effilochés juste ce qu’il faut, il reprend le même thème: “Les petits-enfants c’est fabuleux. Tu n’as pas besoin de changer les couches, et ils t’adorent!”
Ce mercredi à Bexley, Mitt Romney a surtout l’intelligence de réduire son discours au plus court pour consacrer l’essentiel de son temps à une bonne dizaine de questions du public. Mieux: il apporte lui-même le micro aux mains qui se tendent. Et comme par enchantement, les questions l’invitent justement à montrer un peu plus de sa chair humaine. “On vous présente souvent comme quelqu’un qui n’a pas de coeur, lance un homme, félicité par Romney pour sa chemise “patriotique”, aux couleurs du drapeau américain. Pouvez-vous expliquer quels ont été vos engagements bénévoles, pour montrer aux Américains qu’en réalité vous avez vraiment du coeur et vous aimez les Américains?” C’est là, fait assez rare pour mériter d’être souligné, que Mitt Romney en vient à parler de son allégeance à l’Eglise de Jésus-Christ Des Saints des Derniers Jours: “Ma religion est inhabituelle, commence-t-il. Nous n’avons pas de prêtres salariés. Pendant près de dix ans, j’ai donc passé 20 ou jusqu’à 40 heures par semaine, en plus de mon travail, à faire ce travail de pasteur… C’est là notamment que j’ai vu que le chômage n’est pas qu’une statistique”. Tout cela est vrai: à Boston, ses amis mormons nous ont raconté comment durant ses années comme “évêque” Mitt Romney a passé un temps considérable, et très formateur, à écouter, guider et tenter de soulager ses coreligionnaires, qui ne sont pas tous millionnaires comme lui, mais comptaient aussi parmi eux des immigrés récemment débarqués aux Etats-Unis, de Haïti ou du Cambodge. Le grand problème pour Mitt Romney est qu’il préférait éviter jusqu’à présent de parler de cette page de sa vie, pour ne pas donner trop d’importance à son étrange religion, encore peu connue et peu appréciée aux Etats-Unis. Cela serait-il en train de changer? Vaut-il mieux encore, pour se qualifier à l’élection présidentielle, rappeler qu’on est ancien évêque mormon plutôt que de passer pour un robot, sans coeur, âme ni compassion?
A Bexley ce mercredi, le charme Romney opère en tous cas parfaitement. “Les républicains ont besoin d’un modéré pour battre Obama”, explique Cheryl Brown, 63 ans, institutrice à la retraite venue avec la fille de ses voisins, Sophie, 4 ans, vêtue de sa plus belle robe à paillettes. Sophie n’arrive plus à formuler pourquoi elle aime Romney, mais elle pose bien volontiers pour la photo, avec ses deux petits drapeaux.
Tous ne sont pas dupes pour autant. A l’entrée du meeting, un certain “Mr Lawless”, aux yeux bleus perçants à travers son masque jaune, s’est déguisé en mouton, pour exprimer ce qu’il pense des partisans de Mitt Romney. “Je pense que Romney est l’un des pires candidats républicains, explique-t-il. Entre lui et Obama, ça ne ferait pas de grande différence. Les grandes banques qui ont soutenu Obama en 2008 soutiennent maintenant Romney”. En 2008, Mr Lawless dit qu’il n’avait pas voté aux présidentielles. Cette année, il soutient Ron Paul, le vieux libertarien qui continue d’enflammer les plus jeunes.
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