Quand il s’agit de pulvériser la réforme santé d’Obama, les conservateurs n’ont peur de rien : “Le gouvernement veut forcer les gens à avoir une assurance maladie, pourquoi pas, tant qu’on y est, à acheter des brocolis ?” s’est ainsi insurgé Antonin Scalia, l’un des neuf juges de la Cour suprême des Etats-Unis.
Ce républicain plein d’imagination est donc l’un des neuf “sages” (cinq conservateurs et quatre démocrates nommés à vie) qui se sont penchés, trois jours durant, sur la réforme d’Obama pour décider si oui ou non, l’obligation pour tous les Américains de se doter d’une couverture maladie d’ici 2014 constitue une violation de la constitution. Trois jours durant lesquels les conservateurs ont à nouveau dénoncé cette intrusion tyrannique de l’état fédéral dans la vie des citoyens, et ce qu’ils estiment être une atteinte insupportable aux libertés individuelles.
Un projet ambitieux taxé d’abus de pouvoir
Les démocrates ont bien tenté d’arguer qu’on est obligé, après tout, d’assurer sa voiture… Oui, mais on a le choix d’acheter ou non une voiture, ont répondu les républicains… Ah bien sûr ! Car si le gouvernement commence à vouloir protéger la vie des citoyens, ou s’arrêtera-t-il ? Sera-t-on obligé, demain, d’avoir une assurance pour ses funérailles ? De faire de l’exercice deux fois par jours “dans des centres sportifs administrés par le gouvernement” (comprenez socialistes) ? Pourquoi pas, tant qu’on y est, de porter un casque en moto (qui n’est pas obligatoire aux Etats-Unis). Ou encore, donc, de manger des brocolis.
Le projet d’Obama, c’est de permettre aux quelque 32 millions d’Américains qui ne sont pas assez pauvres pour bénéficier de l’assurance publique (Medicaid), mais pas assez riches pour se payer une assurance privée, de se soigner normalement. Que les malades chroniques ne puissent plus être rejetés par les assureurs. Qu’une maladie grave ne risque pas de plonger toute votre famille dans la misère. Que les plus démunis soient protégés en cas d’accident de la vie.
Il proposait aussi d’élargir la couverture maladie des plus pauvres (Medicaid) à 16 millions d’Américains. Plus de la moitié des états ont considéré, à nouveau, qu’il s’agissait d’un abus de pouvoir du gouvernement fédéral.
Le système actuel, en pleine explosion
Certes, en cas d’urgence, on peut toujours aller à l’hôpital, qui ne peut pas refuser un patient, même s’il n’a pas d’argent ni de couverture maladie. Avec la crise, les Américains sont d’ailleurs de plus en plus nombreux à le faire. Ils recevront ensuite des notes pharamineuses : 4.000 dollars pour trois points de sutures, 10.000 dollars pour une nuit aux urgences, 100.000 dollars pour un accouchement difficile… Ceux qui ne peuvent pas payer jettent ces notes à la poubelle, creusant un trou que les hôpitaux tentent de le combler avec ceux qui peuvent payer. Résultat : les primes des assurances privées explosent, et le système avec lui. Les employeurs assurent moins de salariés, et les assurent moins bien. Les jeunes ne s’assurent pas. Les travailleurs indépendants non plus. Les vieux et les malades n’ont pas le choix : aucun assureur n’en veut.
Mercredi, alors que plusieurs centaines de personnes manifestaient en réclamant le maintien de la loi, les juges ont annoncé qu’ils rendraient leur verdict en juin prochain. S’ils décident que cette obligation, pour chacun, d’avoir une assurance maladie, est effectivement contraire à la constitution, la réforme d’Obama, la principale de son mandat, la plus symbolique, la plus forte, sera enterrée. Et pour longtemps.
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